Plusieurs milliers de tonnes de déchets canadiens déversés aux Philippines

Manifestation contre le déversement de déchêts canadiens aux Philippines.
Photo : Greenpeace Philippines
Entre 50 et 100 conteneurs remplis d'ordures canadiennes pourrissent sur les plages des Philippines, selon le Basel Action Network (BAN) un groupe environnementaliste basé à Seattle, spécialiste des cas de déversements illégaux d'ordures.
L'affaire dure depuis plus de deux ans et passe mal aux Philippines où des pétitions ont été lancées et des manifestations organisées. Le chargement a été transporté à la fin de l'été 2013 du Canada vers Manille, indique Jim Puckett, directeur général du BAN, qui affirme aussi que la plupart des ordures proviennent de la région métropolitaine de Vancouver.
En vertu de la Convention de Bâle, le Canada n'est pas autorisé à déverser des déchets dans les pays en développement, dont les Philippines font partie.
Qu'est-ce que la Convention de Bâle?
La Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination est un traité international entré en vigueur en 1992 qui a été conçu afin de réduire la circulation des déchets dangereux entre les pays. Il concerne surtout l'exportation des déchets des pays industrialisés en vue de leur élimination à bon marché dans des pays en développement. (Source : Environnement Canada (Nouvelle fenêtre))
« Pour déverser les ordures, nous avons besoin du feu vert de ministère de l'Environnement des Philippines, et l'exportateur des déchets ne l'a pas obtenu. C'est donc manifestement illégal et le Canada ne fait absolument rien contre cela ! », dénonce Jim Puckett.
« Une honte nationale, une question de fierté »
La division philippine de BAN a relayé cet appel localement et demande au gouvernement canadien de reprendre les conteneurs sur son sol. Une vidéo (sous-titrée en anglais) (Nouvelle fenêtre) avec des images des ordures et des entrevues avec des résidents vient appuyer leur requête.
Greenpeace Philippines s'est également saisi de l'affaire publiant des photos sur son site internet (Nouvelle fenêtre). On y découvre une manifestation de plusieurs dizaines de personnes aux Philippines clamant que leur pays n'est pas la poubelle du Canada.
Selon un récent communiqué de presse du Sénat philippin, les conteneurs étaient mal étiquetés et comportaient la mention « matériaux plastiques recyclables ». Deux sénateurs locaux Francis Escudero et Loren Legarda ont farouchement critiqué la main-d'œuvre locale qui a fait entrer les conteneurs sur leur territoire et appellent, eux aussi, le Canada à reprendre ses déchets. « C'est une honte nationale et une question de fierté pour les Philippines », ont-ils déclaré le mois dernier lors d'une audience devant le comité environnemental du Sénat.
« Un litige commercial privé », dit Ottawa
Du côté canadien, on se renvoie la balle. Selon la reporter britanno-colombienne Janet Brown, Metro Vancouver affirme que les déchets ne proviennent pas du Lower Mainland mais principalement de la ville de Whitby en Ontario.
#Metro Vancouver says trash said to be piling up in #Philippines is not from #Vancouver but most likely from #Whitby, #Ontario.
— Janet Brown (@JanetBrown980) 13 Octobre 2015
Dans un courriel adressé à Radio-Canada, le ministère des Affaires étrangères semble aussi vouloir se dédouaner. « Ce dossier est un litige commercial privé impliquant une entreprise canadienne et son partenaire d'affaires aux Philippines. Le gouvernement du Canada travaille en étroite collaboration avec le gouvernement des Philippines sur cette question », indique François Lasalle, porte-parole du ministère.
« Il n'y a aucune loi canadienne qui peut obliger l'expéditeur (des déchets) à retourner les conteneurs au Canada. »
Il précise que le Conseil de Gestion de l'environnement des Philippines (faisant partie du Ministère de l'Environnement et des ressources naturelles des Philippines) a déterminé que les déchets en question n'étaient ni dangereux ni toxiques.
Il affirme également que le gouvernement des Philippines examine plusieurs façons de disposer de ces déchets en conformité avec ses propres lois et règlements. Le gouvernement canadien, de son côté, « travaille à renforcer les règlements s'appliquant aux déchets et matières recyclables ménagères », conclut-il.