L'embourgeoisement à l'origine de vandalisme dans Saint-Henri?

Vitrine fracassée dans un commerce de St-Henri
Photo : Radio-Canada/Thomas Gerbet
Une nouvelle vague de vandalisme dans le quartier Saint-Henri force le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) à ouvrir une enquête. Les vitrines de boutiques de la rue Notre-Dame Ouest, déjà frappées dans le passé, ont été fracassées au cours du week-end.
Coups de bâtons de baseball, jets de boules de billard... Certains commerces ont été violemment pris pour cibles dans la nuit de samedi à dimanche. Il s'agit pour la plupart de boutiques qui avaient déjà été visées ces derniers mois par des militants dénonçant l'embourgeoisement du quartier.
« Ça fait peur, c'est triste », réagit Jesse Bowden, copropriétaire du café et de la boutique de mode Campanelli : « Ces gens veulent freiner la revitalisation du quartier ».
Le commerce d'en face, le salon de barbier de luxe Notorious, est lui aussi une victime récurrente. « On a cassé deux fois la vitre, une fois la porte, la troisième fois, on a mis de l'acide sur la vitre », racontait le copropriétaire Corey Shapiro, en décembre 2014. « Peut-être une fois par semaine, on retrouve du caca devant la porte. », ajoutait-il.
À l'époque, les attaques avaient été revendiquées sur un blogue anarchiste qui reprochait aux commerçants de contribuer, en participant à la revitalisation du quartier, à chasser les pauvres du quartier au profit de jeunes bobos.
« Les travailleurs-euses précaires, sans emploi ou tout autre marginal de la société se retrouvent toujours perdant-e-s dans ce processus de "revitalisation" »
L'embourgeoisement du quartier Saint-Henri remonte à plusieurs années déjà. « Il y a plus de restaurants, il y a moins de magasins pour t'habiller », constate Lucie Cantin qui vit dans un logement social de Saint-Henri depuis 50 ans. Elle doit maintenant magasiner ailleurs, parce que les nouveaux commerces sont trop chers pour elle. Pourtant, elle ne critique pas l'embourgeoisement : « En ayant des condos, il y a plus de monde qui est plus équilibré », croit-elle.
Le défi de la mixité
Le maire de l'arrondissement du Sud-Ouest, Benoît Dorais, croit qu'il s'agit de l'œuvre de quelques individus isolés qui ne représentent pas l'état d'esprit de l'ensemble de la population. Il convient toutefois recevoir des témoignages de familles qui trouvent difficile de voir disparaître certains commerces implantés dans le quartier depuis longtemps aux profits d'autres, moins accessibles.
L'arrondissement tente de revitaliser ses artères, mais avec un défi important celui de la diversité et de la mixité.
M. Dorais soutient que son administration travaille avec la nouvelle société de développement, Quartier du canal, pour développer une diversité de commerces qui tiennent compte de l'ensemble de la population. « On veut une diversité de commerces pour toutes les gammes de prix », soutient-il.
Le maire de l'arrondissement soutient que la rue Notre-Dame a périclité pendant plusieurs années et qu'elle n'est plus ce qu'elle était autrefois.
« Les commerçants fermaient les uns après les autres même dans les dernières années », précise M. Dorais. Il ajoute que certains commerçants ont fermé leurs portes non pas en raison des hausses du coût des loyers, mais bien en raison du faible achalandage.