Le Barreau canadien ajoute sa voix aux critiques du projet de loi antiterroriste

Le ministre de la Justice Peter MacKay, le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile Steven Blaney, le directeur du Service canadien du renseignement de sécurité Michel Coulombe et le commissaire de la GRC Bob Paulson arrivent au comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes.
Photo : La Presse canadienne / Adrian Wyld/CP
Radio-Canada a obtenu l'ébauche de la présentation que fera l'Association du Barreau canadien devant le comité parlementaire chargé d'étudier le projet de loi C-51. L'Association qualifie d'intenable et de sans précédant l'idée qu'un juge étudie, lors de procédures secrètes, la possibilité de permettre la violation de droits protégés par la Charte canadienne des droits et libertés.
Le Barreau canadien pourra finalement témoigner mercredi prochain devant le Comité permanent de la sécurité publique et nationale, après avoir fait part de sa déception d'avoir été exclu de la liste initiale de témoins.
Le témoignage qu'il s'apprête à livrer n'est pas tendre à l'endroit du projet de loi C-51. Le Barreau soulève des doutes sur la constitutionnalité de plus d'une mesure proposée dans le projet de loi antiterroriste. L'Association remet aussi en question l'impact que certaines dispositions pourraient réellement avoir sur la sécurité publique.
Les nouveaux pouvoirs des services de renseignement
Une des principales critiques formulées touche les nouveaux pouvoirs qui seraient accordés au Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS). Le Barreau note que le projet de loi prévoit que le SCRS pourrait, après avoir obtenu un mandat d'un juge, violer n'importe lequel des droits garantis par la Charte. Pour l'Association du Barreau canadien, l'ensemble de la Charte serait ainsi à risque, ce qui serait sans précédent. Le Barreau affirme que le Parlement ne devrait pas donner le pouvoir au SCRS ou aux juges d'ignorer le fondement constitutionnel du système juridique.
« Si c'est en fait l'intention des législateurs, d'avoir des juges qui autorisent d'enfreindre les droits et les libertés sous la Charte, ce serait une transformation très grande et pour nous, ce ne serait pas constitutionnel. »
23 recommandations d'amendement
Le Barreau canadien propose 23 amendements. Notamment :
- Limiter les informations qui pourraient être partagées en vertu de C-51 et s'assurer qu'elles soient fiables.
- Éliminer la section du projet de loi qui criminaliserait la préconisation ou la fomentation du terrorisme.
- Maintenir le statu quo pour les périodes maximales de détention préventive et les seuils nécessaires pour en démontrer la nécessité.
- Créer un office de conseillers en sécurité nationale. Celui-ci agirait en tant que comité d'experts chargé d'examiner l'ensemble des activités relatives à la sécurité nationale.
- Créer aussi un comité d'examen parlementaire qui aurait accès à de l'information secrète.
- Soumettre le projet de loi dans son ensemble à un examen rigoureux du Parlement après trois ou cinq ans.
Réaction du ministre de la Justice
Si le ministre Peter MacKay assure que le gouvernement écoute le témoignage des experts devant le comité parlementaire, il semble déjà vouloir minimiser l'importance de celui de l'Association du Barreau canadien. « Le Barreau, c'est juste un groupe. Il y en a beaucoup qui présentent [un mémoire] au cours des trois ou quatre prochaines semaines », a-t-il dit.
En effet, le Barreau canadien n'est qu'un des groupes à avoir fait part de préoccupations au sujet de C-51. Mais il ne représente pas moins de 36 000 juristes.