Chute mortelle d'échafaudage : une formation en sécurité rudimentaire

Photo : iStock / Cristian Baitg
Prenez note que cet article publié en 2015 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
L'un des deux survivants d'un accident de construction témoigne au procès de Vadim Kazenelson accusé de négligence criminelle relativement à l'effondrement d'un échafaudage le 24 décembre 2009 à Toronto.
Quatre ouvriers de l'ex-Union soviétique, qui ne portaient aucun harnais, sont morts en tombant du treizième étage de l'immeuble dont ils réparaient les balcons. L'accusé était leur contremaître.
Dilshod Marudov ne portait aucun harnais de sécurité, mais il a eu plus de chance que ses collègues : il s'est brisé la colonne vertébrale et la cage thoracique un sixième ouvrier, lui, a été encore plus chanceux, puisqu'il s'en était sorti indemne grâce à la corde à laquelle il était attaché. « Je ne me souviens plus de cette journée, explique-t-il en ouzbek par le biais de son interprète, des gens autour de moi me demandaient comment j'allais, je souffrais énormément. »
Le soudeur de formation ajoute qu'il est arrivé au Canada en septembre 2009 et qu'il voulait partir étudier dans un collège de Colombie-Britannique en janvier 2010. Il souligne qu'il avait été embauché la veille de l'accident par le superviseur du chantier qui est mort dans sa chute. « Fayzullo Fazilov est devenu un ami deux mois après mon arrivée au Canada, dit-il. Nous étions tous deux originaires de Samarkand. » L'homme de 26 ans explique que l'entreprise de fenêtres qui l'embauchait faisait relâche pendant les fêtes et que Fazilov lui avait offert un travail à 20 $ l'heure.
Je n'étais jamais monté sur un toit de ma vie.
Dilshod Marudov précise qu'il a rempli des papiers pour obtenir un permis d'ouvrier, mais il soutient qu'on ne lui a jamais présenté le contremaître Vadim Kazenelson. « Fazilov me l'a montré du doigt le premier jour, se rappelle-t-il à la barre, pendant qu'il me disait en quoi consistait ma tâche. » Le jeune Asiatique, qui semble être intimidé par l'accusé en cour, précise qu'il a reçu une petite formation sur la façon de porter un harnais et d'actionner un échafaudage sur les balcons dont il fallait refaire le béton.
Alcool et cannabis sur le chantier
Dans son contre-interrogatoire, la défense souligne que ce n'est pas son client qui a embauché Dilshod Marudov et qu'il ne l'a même jamais rencontré en personne. Elle rappelle que c'est le superviseur qui s'est occupé de son permis d'ouvrier et qui lui a montré brièvement les consignes de sécurité. On ignore pour l'instant les raisons pour lesquelles Marudov et quatre de ses collègues ne portaient aucun harnais. L'enquête policière a toutefois démontré qu'ils étaient six sur l'échafaudage, alors que la capacité maximale n'est que de deux personnes. Des bouteilles d'alcool vides avaient été retrouvées sur le chantier à l'arrivée des secours et le procès contre leur employeur a montré en 2012 que certaines victimes avaient consommé de la marijuana avant leur chute.
La couronne soutient que les propriétaires de l'immeuble étaient pressés de terminer les rénovations avant la fin de l'année. En cas contraire, ils ne pourraient renouveler leur hypothèque après avoir reçu un avertissement de leurs banquiers. Les Procureures ont démontré au début du procès que Vadim Kazenelson avait lésiné sur les mesures de sécurité pour respecter l'échéancier qu'il avait reçu.
La compagnie Metron avait plaidé coupable à des accusations d'avoir violé la loi provinciale sur la santé et la sécurité au travail. Elle avait été condamnée en 2012 à une amende de 750 000 $ en cour de l'Ontario, soit l'amende la plus sévère jamais infligée dans l'histoire du Canada pour ce genre de faute.