Ottawa aurait fermé les yeux au sujet des wagons-citernes DOT-111

Wagons DOT-111
Prenez note que cet article publié en 2014 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Transports Canada avait été informé dès 2011 par le plus important lobby de chemins de fer en Amérique du Nord, l'Association of American Railroads (AAR), des risques concernant les wagons-citernes DOT-111.
Ces wagons tout usage, qui peuvent transporter aussi bien des produits tout à fait inoffensifs, comme de la mélasse, que des produits dangereux, comme du pétrole, ont été au cœur de la tragédie de Lac-Mégantic.
Ce n'est pas la première fois que les DOT-111 sont impliqués dans des déraillements avec déversements, puis des feux. On en a eu un petit peu partout. Lac-Mégantic a été la cerise sur le sundae.
Selon des documents obtenus en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, l'AAR réclamait depuis 2011 l'adoption de nouvelles normes, tant au Département des transports des États-Unis qu'à Transports Canada.

Lettre envoyée à Transport Canada
L'AAR demandait notamment l'installation de boucliers aux extrémités des wagons et le renforcement du réservoir. À Lac-Mégantic, de telles mesures auraient peut-être évité que les wagons soient éventrés ou que ceux-ci explosent.
On aurait pu retarder la montée de température dans les wagons au niveau de la résistance aux explosions par pressurisation. On aurait pu gagner du temps à ce niveau-là.
D'ailleurs, en octobre 2011, devant l'inaction des gouvernements, l'AAR a demandé à ses membres d'adopter sur une base volontaire les nouvelles normes qu'elle propose pour tout nouveau wagon-citerne destiné au transport de produits dangereux.
Sur les 335 000 wagons-citernes qui circulent en Amérique du Nord, seulement 18 000 ont été construits selon ces normes.
Il va falloir à un moment donné que quelqu'un mette ses culottes et fasse quelque chose. Il y a des règlements à réécrire et des compagnies à se conformer.
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Transports Canada a refusé de nous accorder une entrevue, mais rappelle que le Canada a adopté en avril dernier des normes très sévères pour l'utilisation des DOT-111 pour le transport de produits dangereux, qui vont dans le sens de celles réclamées trois ans plus tôt par l'AAR.
L'AAR n'a pas voulu nous parler non plus, mais a félicité Transports Canada pour ces mesures, alors que les États-Unis n'ont toujours pas emboîté le pas au Canada.
Suite à ce qui s'est passé à Lac-Mégantic, s'ils avaient voulu faire quelque chose, on s'entend-tu qu'ils avaient toute la latitude pour le faire.
« Il y avait urgence, pourquoi ils ne l'ont pas fait? Il y a eu 47 morts et des familles qui ont été touchées », souligne Michel Lonergan, ex-représentant en santé et sécurité au CP, ajoutant que les régulateurs des deux côtés de la frontière auraient pu agir plus vite.
Selon lui, Transports Canada et le département des transports des États-Unis auraient pu adopter les normes proposées par l'AAR bien avant Lac-Mégantic et ainsi rendre le transport de pétrole par chemin de fer beaucoup plus sécuritaire. Mais cela aurait été onéreux.
C'est une question d'argent.
Depuis avril, environ 5000 wagons DOT-111 trop vieux pour être mis à niveau ne peuvent donc plus transporter de pétrole au Canada, mais ce n'est pas le cas aux États-Unis. Et d'ici trois ans, ces wagons devront être complètement retirés de la circulation.

Entre-temps, trois employés de la Montreal, Maine & Atlantic Railway (MMA), ainsi que la compagnie, doivent répondre à 47 chefs d'accusation de négligence criminelle entraînant la mort dans la tragédie du 6 juillet 2013. Le Bureau de sécurité dans les transports devrait remettre son rapport d'enquête d'ici peu.