Les coûts de la flotte des F-35 pourraient doubler, selon un chercheur

F-35 de Lockheed
Une nouvelle étude du Centre canadien des politiques alternatives (CCPA) montre que l'ensemble des coûts de la flotte des F-35 pourrait facilement doubler et atteindre plus de 90 milliards de dollars, plutôt que les 45 milliards de dollars estimés par le gouvernement canadien.
Dans son rapport publié mardi, Michael Byers, professeur de sciences politiques et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en politiques mondiales et droit international de l'Université de la Colombie-Britannique, déclare que de tels coûts obligeraient les Forces armées canadiennes à significativement réduire leurs dépenses pour absorber les dépassements de coût des F-35. « Il n'y aurait plus d'argent pour le reste de l'armée, pour la formation, les bateaux de sauvetage, les navires », avertit-il.
Le rapport a été publié en collaboration avec le CPAA et l'Institut Rideau, deux organismes de gauche. Mais l'universitaire Michael Byers explique qu'il a produit son rapport en analysant les données provenant de la Défense nationale du Canada, ainsi que des données provenant du gouvernement américain.
Le gouvernement conservateur a estimé les coûts du cycle de vie de 65 appareils F-35 (incluant, entre autres, l'entretien et les mises à niveau des avions) en se basant sur les frais de fonctionnement des CF-18, une grave erreur selon M. Byers.
D'après les données du gouvernement américain, le coût réel d'exploitation de ces nouveaux avions serait 11 milliards de dollars de plus que prévu par le gouvernement canadien. Les risques de dépassement de coût sont d'autant plus élevés puisque l'avion est toujours en développement, ajoute le professeur.
De plus, M. Byers craint que le gouvernement ne planifie pas suffisamment pour les incertitudes entourant le développement et l'achat des F-35. Par exemple, une hausse de l'inflation, la fluctuation du taux de change et une augmentation du coût du carburant pourraient avoir un impact significatif sur le coût final. Enfin, l'ajout d'armes sur les appareils pourrait ajouter 218 millions de dollars à la facture. Selon ses prévisions les plus pessimistes, les coûts du cycle de vie atteindraient 126 milliards de dollars.
« Il est irresponsable de traiter cet achat comme un projet sans risque. [...] Nous devons planifier pour les fluctuations », ajoute M. Byers. L'achat des F-35 « n'est pas viable », dit le professeur, et le gouvernement doit réfléchir à d'autres solutions de rechange.
Pas de conseil à prendre d'un « proche allié » du NPD, rétorquent les conservateurs
« Nous ne prendrons pas de conseil de Michael Byers qui a été décrit comme un "proche allié politique du chef du Nouveau Parti Démocratique, Thomas Mulcair" par le Calgary Herald », a réagi le cabinet de la ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, Diane Finley.
« De vrais experts indépendants, ayant accès aux faits réels, vérifient que les rapports préparés par le MDN sont rigoureux et impartiaux », a affirmé sa directrice des communications, Alyson Queen. « La Mise à jour annuelle a été validée par le comité des sous-ministres chargés de la gouvernance, qui compte deux membres indépendants, l'ancien vérificateur général Denis Desautels et l'économiste Ken Norrie. En plus, l'estimation du coût du cycle de vie contenu dans la Mise à jour annuelle a été vérifiée séparément par d'autres experts indépendants, KPMG et Raymond Chabot respectivement, sur la base d'un cadre exhaustif élaboré par KPMG à partir des bonnes pratiques internationales », a-t-elle ajouté.
Une étude dans les mains du premier ministre
En avril, la ministre Diane Finley a indiqué que le gouvernement a reçu une étude-clé sur le programme des chasseurs F-35. Les données de cette analyse, commandée en 2012 à la suite d'un rapport accablant du vérificateur général, n'ont toutefois pas été divulguées. En 2012, le vérificateur général a accusé la Défense nationale et les Travaux publics de sous-estimer les coûts du programme de chasseurs furtifs.
M. Byers demande au gouvernement de rendre cette étude publique afin que les « Canadiens aient une idée des vrais coûts associés à l'achat des F-35. » Le temps presse, rappelle-t-il, puisque la durée de vie des CF-18 tire à sa fin.
Le gouvernement fédéral n'a toujours pas confirmé s'il irait de l'avant avec son programme d'achat des F-35 ou s'il lancerait un appel d'offres pour le remplacement de la flotte vieillissante des CF-18.
« Au cours des prochaines semaines, les ministres examineront soigneusement un certain nombre de rapports d'évaluation des options en vue d'obtenir des avions de chasse pour les Forces canadiennes, sur les retombées industrielles, les coûts et d'autres facteurs en lien avec la décision de remplacer notre flotte de CF-18 », a indiqué mardi le cabinet de la ministre Finley.