Syrie : crimes contre l'humanité dans les deux camps

Des rebelles syriens, le 3 juin, à Hama.
Photo : AFP
Prenez note que cet article publié en 2013 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Torture, meurtres, viols : « les crimes de guerre, les crimes contre l'humanité et les violations généralisées des droits de l'homme continuent d'augmenter » en Syrie, disent dans leur dernier rapport les enquêteurs de la commission d'enquête de l'ONU dans ce pays.
Leur rapport, qui parle d'un niveau inégalé de violence dans le conflit syrien, recense 17 massacres du 15 janvier au 15 mai 2013 et 30 depuis septembre.
Les autorités syriennes devront rendre des comptes pour leur politique qui comprend le siège et le bombardement de villes et des exécutions de civils, disent les enquêteurs. Ces derniers condamnent d'autre part les insurgés qui « continuent à mettre en danger la population civile en plaçant des objectifs militaires dans des zones civiles ». Les crimes de guerre commis par les rebelles n'ont toutefois pas atteint l'intensité et l'ampleur de ceux auxquels se livrent les forces gouvernementales et leurs alliés, précise le rapport.
Je suis très surprise par la violence et la cruauté des actes criminels, surtout les actes de torture. Un autre élément qui m'a aussi perturbée, c'est l'utilisation des enfants dans les combats.
La commission d'enquête, qui a déjà élaboré une liste confidentielle de noms impliqués dans des violations des droits de l'homme en Syrie, demande au Conseil de sécurité des Nations unies de s'assurer que les responsables de ces crimes seront traduits en justice, devant la Cour pénale internationale de La Haye.
Le temps où il faudra rendre des comptes viendra. Il viendra, quoi qu'il arrive.
Ce n'est toutefois pas la première fois que la commission d'enquête émet cette requête auprès du Conseil de sécurité, sans résultat.
Utilisation d'armes chimiques

Paulo Sergio Pinheiro est le président de la Commission d'enquête internationale indépendante sur la Syrie, créée le 23 août 2011 par le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies pour enquêter sur toutes les violations des droits de l'homme perpétrées en Syrie. Les autres membres de la commission sont Karen AbuZayd, Carla Del Ponte et Vitit Muntarbhorn.
Photo : AFP / FABRICE COFFRINI
Les experts disent avoir des « motifs raisonnables » de penser que des armes chimiques ont été utilisées par les deux parties, mais surtout par les forces de Bachar Al-Assad, dans quatre attaques distinctes, en mars et avril.
Ils ajoutent cependant qu'il est impossible de déterminer de quelle sorte d'agents chimiques il s'agit ni de quelle façon ils ont été utilisés. Les experts ont de nouveau réclamé du gouvernement syrien qu'il permette à une commission d'établissement des faits, qui vise à faire la lumière sur les allégations d'utilisation d'armes chimiques, de se rendre en Syrie. Pour produire son rapport, la commission a dû s'appuyer sur des entrevues avec des victimes, des réfugiés et du personnel médical.
La France affirme avoir la certitude que le régime Al-Assad a employé du gaz sarin à au moins une reprise. Le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, a soutenu qu'il n'avait « aucun doute » sur la question. Des journalistes du quotidien Le Monde ont récemment fourni aux autorités françaises des échantillons de potentielles armes chimiques rapportés de Syrie.
Il y a une ligne qui est franchie incontestablement. Nous discutons avec nos partenaires de ce qu'il va falloir faire et toutes les options sont sur la table.
Prudence à Washington
Du côté de la Maison-Blanche, le porte-parole de Barack Obama, Jay Carney, a affirmé qu'il fallait « augmenter le faisceau de preuves [...] avant de prendre une décision ». « Il nous faut enquêter davantage », a soutenu M. Carney lors de son point de presse quotidien, soulignant toutefois que l'utilisation de produits chimiques représenterait « une violation très claire » de la part du régime syrien.
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Enfin, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a jugé que le dernier rapport de la commission d'enquête était « écoeurant et atterrant ». Son porte-parole, Martin Nesikry, a indiqué que les récentes « atrocités » renforçaient la nécessité de trouver une solution politique à « ce carnage » et de permettre aux experts des Nations unies d'enquêter sur le terrain.
Les enquêteurs ont aussi dénoncé l'envoi d'armes en Syrie, alors que l'Union européenne a levé son embargo sur les armes et que le régime syrien a affirmé avoir reçu des missiles russes. Le rapport précise que les armes envoyées peuvent servir à commettre des crimes contre l'humanité et qu'il pourrait y avoir « une coresponsabilité criminelle », a averti la magistrate Carla del Ponte.
Avec les informations de Agence France-Presse et Reuters