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De 40 organismes fédéraux d'évaluation environnementale à 3

Sables bitumineux en Alberta

Sables bitumineux en Alberta

Radio-Canada
Prenez note que cet article publié en 2012 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.

Le ministre des Ressources naturelles du Canada, Joe Oliver, a annoncé mardi comment il comptait simplifier le processus d'examen environnemental pour les grands projets économiques. Un projet de loi devrait être bientôt déposé.

Une fois les changements apportés, seuls trois intervenants fédéraux auront leur mot à dire sur les évaluations environnementales, au lieu de la quarantaine d'organisations, d'agences et de ministères qu'il y avait auparavant :

  • l'Agence canadienne d'évaluation environnementale
  • l'Office national de l'énergie
  • la Commission canadienne de sûreté nucléaire

Pour être plus efficace, le gouvernement Harper veut d'abord éviter les dédoublements, en reconnaissant les examens environnementaux provinciaux comme substituts ou équivalents des processus fédéraux, « pourvu qu'ils satisfassent aux exigences de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale ». D'ailleurs, Ottawa compte désormais se concentrer sur les évaluations de projets d'importance nationale et laissera le soin aux provinces de s'occuper des initiatives plus modestes.

Le gouvernement veut aussi que l'Agence canadienne d'évaluation environnementale rende plus rapidement une décision sur le besoin de réaliser une évaluation fédérale, soit au cours des 45 premiers jours.

Les différents types d'audiences et d'évaluations auront chacuns leur échéancier :

  • 24 mois pour les commissions d'examen des grands projets miniers et énergétiques
  • 18 mois pour les audiences de l'Office national de l'énergie
  • 12 mois pour les évaluations environnementales courantes

Les provinces pourraient faire leurs propres évaluations, même pour un projet qui serait revu au fédéral. Reste à voir cependant si elles devraient compléter cet examen en deux ans.

Ces changements, annoncés dans le dernier budget, visent, selon le gouvernement, à faciliter la création d'emplois et la prospérité économique « tout en assurant le respect de normes de protection de l'environnement très rigoureuses ».

Selon le ministre Oliver, le nouveau plan « aidera à éviter les longs retards des examens des grands projets économiques qui neutralisent les possibilités d'emplois et paralysent la croissance économique en mettant en péril des investissements de grande valeur ».

En gros, le gouvernement Harper veut « une révision par projet dans une période de temps définie ».

Le gouvernement fédéral poursuit ainsi quatre objectifs principaux :

  • rendre les examens environnementaux plus prévisibles et rapides;
  • diminuer les dédoublements et les chevauchements dans le travail des différents intervenants gouvernementaux;
  • renforcer la protection de l'environnement;
  • renforcer le processus de consultation des autochtones.

Sur ce dernier point, le ministre Oliver a déclaré que le nouveau régime s'appliquera au projet Northern Gateway, qui a fait l'objet de nombreuses critiques des communautés autochtones en Colombie-Britannique.

Exclusion de certains groupes?

Le gouvernement introduit aussi dans son projet de loi la notion d'« intérêt direct » pour déterminer qui pourra participer aux consultations sur des projets de développement économique majeurs.

Ni M. Oliver ni ses fonctionnaires n'ont fourni des explications sur les critères qui seront utilisés pour considérer qu'un participant a un intérêt dans le projet à l'étude.

En janvier dernier, le ministre Oliver s'en était pris aux « défenseurs de l'environnement et autres groupes radicaux » financés par des « groupes d'intérêt étrangers » qui faisaient traîner en longueur les consultations sur les grands projets, selon lui.

Rapidité, mais règles plus sévères

Ottawa prévoit des mesures plus sévères pour protéger l'environnement. Les inspecteurs auront plus de pouvoirs et les promoteurs pourraient devoir payer des amendes considérables, qui pourraient aller jusqu'à 400 000 $.

Le gouvernement semble également vouloir se pencher plus précisément sur le bilan environnemental de l'industrie pétrolière en la réglementant plus et en faisant passer de 100 à 150 le nombre d'inspections annuelles des oléoducs et des gazoducs.

Elizabeth May, chef du Parti vert
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Elizabeth May, chef du Parti vert

Virulentes critiques

Sans surprise, l'opposition à Ottawa et les groupes environnementalistes dénoncent les changements apportés par le gouvernement Harper.

Le Parti vert souligne entre autres que l'Agence canadienne d'évaluation environnementale, qui sera l'une des trois organisations qui réalisera les évaluations, verra son budget amputé de beaucoup en vertu des coupes décrétées dans le dernier budget fédéral. Elle aura donc moins de moyens pour faire son travail, alors qu'il y aura plus de travail à faire.

« L'Agence d'évaluation environnementale a été charcutée par les coupes du gouvernement Harper et on voit qu'elle peine à faire son travail. Ce que cette annonce démontre c'est que le gouvernement fédéral n'a pas l'intention de protéger l'environnement. Cette façon de faire n'a pour seul but que d'accélérer le développement des ressources, plus rapidement même que ce que demande l'industrie », affirme Elizabeth May, chef du Parti vert et députée de Saanich-Gulf Islands.

Quant à Megan Leslie, députée du Nouveau Parti démocratique dans la circonscription d'Halifax, elle s'inquiète de voir la plupart des évaluations environnementales remises entre les mains des provinces.

« C'est nécessaire d'avoir un rôle pour le gouvernement fédéral. C'est un rôle pour la coordination. Souvent les évaluations provinciales ne sont pas aussi fortes, solides, que les évaluations fédérales. Alors, je pense que c'est nécessaire d'avoir un système fédéral pour tout le Canada, pour coordonner les provinces », dit-elle.

Toutefois, pour Steven Guilbeault, du groupe Équiterre, les dédoublements d'évaluation que le gouvernement veut éviter sont un peu de la poudre aux yeux. « Pour plusieurs provinces, c'est déjà pratique courante. Il y a déjà des ententes pour les grands projets de faire des évaluations conjointes, comme pour Northern Gateway. Je pense que ça ne change pas grand-chose. On essaie de nous faire croire qu'on est en train d'appliquer un remède là où il n'y a pas de problème », lance-t-il.

M. Guilbeault n'accorde pas plus de crédibilité à la hausse des amendes payées par les entreprises. « C'est bien beau de dire qu'on va mettre en place des amendes beaucoup plus sévères. Si on ne les impose jamais ces amendes-là, ça ne donnera absolument rien », commente-t-il.

Steven Guilbeault critique aussi les éventuelles limites imposées pour participer aux audiences publiques, ce qui serait une première, selon lui. La pollution n'a pas de frontières, notamment pour ce qui est des changements climatiques, souligne-t-il, ajoutant qu'un projet pétrolier en Alberta pourrait intéresser un citoyen du Québec ou du Nouveau-Brunswick.

En fait, M. Guilbeault pense lui aussi que les changements apportés par le gouvernement visent tout simplement à éliminer les bâtons qui sont dans les roues de l'industrie. « Il faut noter que le ministre de l'Environnement n'a pas prononcé un seul mot sur la question, et que tout le travail est revenu au ministre des Ressources naturelles ».

Cette opinion est reprise par tous les groupes écologistes, que ce soit Greenpeace, qui affirme que « ces changements ne visent qu'à permettre d'accorder plus rapidement une approbation aux compagnies pétrolières et minières », ou Environmental Defence, qui déplore l'affaiblissement des règles auparavant mises en place.

Cette opinion est cependant réfutée par David Collyer, le président de l'Association canadienne des producteurs pétroliers. M. Collyer indique que les changements proposés ne donnent pas plus de chances aux grands projets d'être acceptés, et ne font que clarifier les échéanciers et ainsi aider de possibles investissements.

De son côté, Jordan Graham, d'Ethical Oil, avance que la nouvelle législation permettra au Canada de réduire sa dépendance envers l'énergie provenant d'ailleurs.

À Québec, le ministre de l'Environnement, Pierre Arcand, s'est montré prudent, sans spéculer sur l'impact que pourraient avoir les évaluations transférées aux provinces sur la charge de travail de Québec. « S'il s'agit de simplification et on prend les évaluations québécoises, ça, on ne peut pas être contre une certaine efficacité », a déclaré M. Arcand.

Avec les informations de La Presse canadienne
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