Rolland dans la cour des grands

Pierre Rolland
Photo : AFP / Pascal Pavani
Prenez note que cet article publié en 2011 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
QUÉBEC - Pierre Rolland figure parmi les têtes d'affiche des Grands Prix cyclistes de Québec et de Montréal, qui se tiendront respectivement vendredi et dimanche. Mais n'eût été son incroyable chevauchée au Tour de France, il serait presque passé incognito.
C'est lui qui a tiré Thomas Voeckler jour après jour dans les étapes de montagne. Il a ainsi permis au premier vainqueur du Grand Prix de Québec de rivaliser avec les puissants grimpeurs que sont les Schleck, Contador et autres Evans pour s'accrocher à son maillot jaune pendant 10 jours.
Pourtant, depuis quelques années déjà, Rolland représente l'un des plus beaux espoirs du cyclisme français. Attentes qu'il a confirmées au mois de juillet en finissant 11e de la Grande Boucle, avec en prime le maillot blanc pour le meilleur jeune, mais surtout en s'imposant au sommet de l'Alpe d'Huez. Ce qu'aucun Français n'avait réussi depuis 25 ans, depuis Bernard Hinault en 1986.
« La victoire à l'Alpe d'Huez ressort un peu de tout ça parce que quand on est grimpeur, avoir son nom en haut de cette montagne, c'est quelque chose d'extraordinaire, de très fort, a dit le coureur d'Europcar à Radio-Canada Sports la semaine dernière. Pour moi, si je ne dois garder qu'un truc, ce sera forcément ça. C'est une montagne en France qui est énormément connue. »
Sa victoire a marqué l'imaginaire. Ce n'est pas tous les jours qu'on peut se targuer d'avoir largué Alberto Contador dans un col hors catégorie, surtout que le triple champion du Tour de France avait passé sa journée à initier les attaques sur le groupe maillot jaune.
« Ça m'a fait mal aux jambes sur le coup, mais après ça m'a fait forcément plaisir. Peu importe qui termine 2e, 3e, le principal, c'est d'avoir gagné en haut de l'Alpe d'Huez. »
Quand, à 12 km du sommet, Contador a dépassé Rolland, alors aux avant-postes de l'ascension avec le Canadien Ryder Hesjedal, le Français croyait bien les carottes cuites. Mais l'Espagnol est humain, il a faibli dans les derniers kilomètres. Un autre Espagnol, Samuel Sanchez, a rejoint Rolland. En travaillant de concert, le duo a grugé l'écart pour revenir sur Contador.
Encore là, Rolland ne donnait pas cher de sa peau contre deux Espagnols, par surcroît deux grands amis.
« Je me suis dit que je devais tenter le tout pour le tout et que je devais donner le maximum jusqu'en haut. Il restait 2,5 km. J'ai attaqué une fois, deux fois, trois fois. Et la troisième fois, ils ne m'ont pas suivi, explique le cycliste d'Orléans.
« Et là, je me suis dit que j'allais sûrement gagner, même si je n'y croyais pas trop. J'ai donné à fond jusqu'à l'arrivée. Sur le coup, on ne réfléchit pas énormément et ça passe très, très vite. »
Rolland et Voeckler comme chefs de file?

Thomas Voeckler
Photo : AFP / Pascal Pavani
Une telle performance vous donne des ailes parce qu'elle confirme aussi votre potentiel. Évidemment, en 2012, Rolland veut améliorer son classement. Mais il veut aussi que son statut change à court ou à moyen terme.
« C'est sûr que je veux être leader ou coleader, être à deux leaders qui ne se battent pas sur les mêmes terrains, ça peut aller parfaitement. Forcément, sur le tour, j'aimerais être un peu protégé pour le classement général. »
Est-ce le signe de la fin de son entente avec Europcar, pourtant valide jusqu'en 2013? Parce qu'avec sa prestation cette année, Voeckler ne risque pas de perdre son statut.
« Il n'y aura jamais de souci avec Thomas parce qu'on est tous les deux des personnes très honnêtes l'une envers l'autre et envers nous-mêmes. Alors, il n'y aura jamais de problèmes, assure Rolland. Si lui est plus fort, je courrai pour lui et vice-versa. »
Preuve de la bonne entente entre les deux coureurs, Voeckler a refilé quelques petits conseils à Rolland avant son premier départ pour le Canada.
« Il m'a dit que c'était des parcours urbains assez difficiles. Il m'a dit de faire aussi bien que lui! Je vais essayer. Faire mieux ce n'est pas possible, faire aussi bien, ça serait déjà pas mal. »
Par contre, Voeckler avait oublié de l'aviser que les organisateurs avaient ajouté une boucle supplémentaire à chacun des parcours.
« Ah oui! Ça fera encore plus de kilomètres, ça va être une course très dure. »
Rolland tient cependant à minimiser les attentes. Sa forme est à des années-lumière de celle du Tour de France. La folie qui a suivi le Tour, il en a profité, sauf que les horaires déments des nombreux critériums ont nui à son entraînement et à sa préparation pour ses deux dernières courses de la saison.
« Après le Tour, il y a eu beaucoup de sollicitation. Les critériums, c'est bien parce qu'on a le contact du public. Mais on engendre beaucoup de fatigue supplémentaire. On finit tard le soir, il y a beaucoup de route, on se débrouille nous-mêmes parce que ce ne sont pas des épreuves officielles. On ne peut pas toujours manger ce que l'on veut. Quand on est professionnel, ce n'est pas forcément idéal.
« Une chose est sûre, je vais essayer de donner le maximum pour faire une belle prestation. Je mise plus sur les autres coureurs que sur moi-même. »
C'est drôle, Voeckler avait aussi dit qu'il n'avait pas la forme à son arrivée à Québec l'an dernier!