Une loi qui va coûter des milliards

Photo : AFP / MYCHELE DANIAU
L'application de la loi des conservateurs fédéraux, qui modifie le calcul des peines des criminels incarcérés avant leur jugement, devrait coûter de 7 à 10 milliards de dollars, selon le rapport à paraître du directeur parlementaire du budget.
La mise en oeuvre de la Loi sur l'adéquation de la peine et du crime, modifiant le calcul des peines des criminels incarcérés avant leur jugement, coûtera plus cher que prévu aux contribuables canadiens. En fait, la facture devrait atteindre de 7 à 10 milliards de dollars sur une période de cinq ans.
Voilà ce qui ressortira du rapport du directeur parlementaire du budget, Kevin Page, sur les coûts de l'application de la mesure législative, qui sera publié la semaine prochaine, ont affirmé mardi à la Presse canadienne des sources proches du dossier.
Entrée en vigueur en février, cette loi a aboli la pratique voulant que le temps de détention provisoire soit compté en double, sauf dans des circonstances exceptionnelles. Par conséquent, plusieurs criminels passeront davantage de temps derrière les barreaux, accentuant ainsi la pression sur des infrastructures chancelantes aux budgets serrés.
La plus grande part de la note sera assumée par les provinces, qui devront en débourser les trois quarts, indique également le rapport de M. Page. Les provinces les plus touchées seront le Québec et l'Ontario.
Une guerre de chiffres à prévoir
Le ministre fédéral de la Sécurité publique, Vic Toews, a au contraire affirmé, lors d'une entrevue à la Presse canadienne, que les provinces ne devraient pas subir d'augmentation des coûts. Il a affirmé au passage que la loi avait été adoptée essentiellement à la suite de demandes en ce sens des ministères provinciaux de la Justice.
M. Toews a par ailleurs indiqué que le gouvernement avait prévu, pour cette année et la suivante, 90 millions de dollars pour la mise en oeuvre de la loi au niveau fédéral et pour l'agrandissement de prisons, si cela s'avérait nécessaire.
« Nous ne sommes pas tout à fait certains des coûts exacts [de l'application de la loi]. Certaines estimations sont moins élevées, et d'autres prévoient davantage de dépenses, mais pas plus de 90 millions de dollars. »
Étant donné la disparité entre les calculs avancés, il faut s'attendre à ce que le gouvernement mette en doute la crédibilité de l'analyse de Kevin Page.
Le gouvernement Harper a toujours maintenu que la plus grande partie des coûts serait absorbée par le transfert de prisonniers vers des établissements ayant des cellules disponibles ou la détention de deux prisonniers par cellule.
Des critiques ont qualifié cette pratique de « mise en poulailler » qui représenterait une trahison des engagements internationaux du Canada en faveur du maintien des normes en milieu carcéral.
Les effets de la loi n'ont jamais été divulgués publiquement. Le gouvernement a toujours refusé de publier son analyse des impacts sur les populations carcérales et les coûts.
Kevin Page a rédigé son rapport à l'issue d'une analyse de six mois, vérifiée par des experts externes.