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Coup d'État de l'armée

Des militaires honduriens aux aguets autour du palais présidentiel

Des militaires honduriens aux aguets autour du palais présidentiel

Photo : Orlando Sierra

Radio-Canada

L'armée, qui aurait agi sur ordre de la Cour suprême, renverse le président Zelaya et le contraint à l'exil pour faire avorter la tenue d'un référendum qui lui aurait permis de briguer un deuxième mandat. Désigné chef d'État, le président du Congrès, Roberto Micheletti, décrète un couvre-feu.

Le président du Honduras Manuel Zelaya a été arrêté par des militaires, dimanche à l'aube, dans sa résidence, au terme d'une semaine de tensions croissantes entre l'armée et la présidence.

M. Zelaya a été ensuite conduit à une base aérienne, puis envoyé au Costa Rica contre son gré.

Des dizaines de militaires, fortement armés, ont pris position autour du domicile du président. En parallèle, dans la capitale, des centaines de soldats se sont aussi déployés autour du palais présidentiel, tandis que non loin des manifestants défiaient la police.

Des manifestants protestent contre le coup d'État militaire au Honduras.

Des manifestants protestent contre le coup d'État militaire au Honduras.

Photo : AFP / Orlando Sierra

Une centaine de partisans du président, portant des tee-shirts proclamant « oui » au référendum, ont bloqué la principale avenue devant le palais présidentiel. Ils ont jeté des pierres sur les soldats en cirant: « traîtres, traîtres! »

Selon l'agence Reuters, des coups de feu ont éclaté dimanche soir dans la capitale hondurienne Tegucigalpa, lors d'une manifestation de soutien à Manuel Zelaya. Les incidents se sont produits devant le palais présidentiel, où des centaines de partisans du président déchu s'étaient rassemblés.

Un ordre de la Cour suprême?

C'est la Cour suprême du pays qui aurait ordonné de déposer le président Zelaya pour l'empêcher d'organiser, dimanche, un référendum controversé qui lui aurait permis de briguer un nouveau mandat. L'armée et le plus haut tribunal du pays se sont opposés à cette consultation populaire, jugée illégale.

Le Congrès du Honduras a approuvé ce qui a été présenté comme une lettre de démission du président Manuel Zelaya, quelques heures après la destitution de celui-ci. La missive attribuerait le départ présumé du chef de l'État à la situation politique et à des « problèmes de santé fondamentaux ».

Manuel Zelaya a déclaré que cette lettre de démission était « totalement fausse », rappelant qu'il était toujours président.

Un nouveau président et un couvre-feu

Le président du Congrès du Honduras, Roberto Micheletti, a été désigné par les parlementaires comme nouveau chef de l'État, en remplacement de Manuel Zelaya.

Le Congrès, seule chambre parlementaire du pays, a décidé à l'unanimité de désavouer M. Zelaya, en raison de « sa conduite manifestement irrégulière », de ses « violations répétées de la Constitution et des lois » et de son « non-respect des résolutions et décisions des organes institutionnels ».

Roberto Micheletti assurera la présidence du pays jusqu'au 27 janvier 2010, date fixée pour la fin du mandat de M. Zelaya.

Aussitôt désigné, le nouveau président a décrété un couvre-feu de 48 heures dans le pays, à partir de 21 h, heure locale.

Manuel Zelaya n'en démord pas

Manuel Zelaya lors d'une conférence de presse à son arrivée au Costa Rica

Manuel Zelaya lors d'une conférence de presse à son arrivée au Costa Rica

Photo : AP/Kent Gilbert

S'exprimant sur la chaîne latino-américaine Telesur pour dénoncer « le coup d'État » et son « enlèvement », M. Zelaya a appelé ses concitoyens à résister de façon non violente, parlant du « complot d'une élite vorace qui veut garder le peuple dans la pauvreté ».

M. Zelaya a demandé à Washington de ne pas soutenir le geste des militaires putschistes.

Si [Washington] n'apporte pas son soutien à ce coup d'État, il peut empêcher cette attaque contre notre peuple et contre la démocratie », a-t-il fait valoir.

À son arrivée au Costa Rica, le président renversé a indiqué qu'il prendrait part au sommet des présidents des États d'Amérique centrale, lundi à Managua, la capitale du Nicaragua. Ce sommet, qui doit réunir les sept pays de la région et la République dominicaine, a été convoqué par le président du Nicaragua, Daniel Ortega, afin de dresser « un front de lutte centre-américain » pour « remettre (en fonction) le président Manuel Zelaya ».

Encore en pyjama, M. Zelaya a réitéré qu'il était le président constitutionnel du Honduras, déclarant que seul le peuple, « et pas une bande de gorilles », pouvait le chasser du pouvoir.

D'après Associated Press, le président déchu est en route vers Managua à bord d'un avion dépêché par le président vénézuélien, Hugo Chavez.

Des partisans du président Zelaya manifestent dans la capitale.

Des partisans du président Zelaya manifestent dans la capitale.

Photo : AFP / Orlando Sierra

Obama préoccupé

À Washington, le président Barack Obama s'est déclaré vivement préoccupé par l'arrestation puis l'expulsion du président Zelaya et a demandé aux « acteurs politiques et sociaux » du pays de respecter la démocratie et l'État de droit. Il a appelé à un règlement sans interférences extérieures.

Un porte-parole de la Maison-Blanche a peu après affirmé que « les États-Unis n'étaient aucunement impliqués dans les actions prises contre le président Zelaya ».

La secrétaire d'État Hillary Clinton a par ailleurs affirmé que tous se devaient de condamner ce qui a été fait au président hondurien.

« Nous reconnaissons Zelaya comme étant le président constitutionnel régulièrement élu du Honduras. Nous n'en voyons pas d'autre », a déclaré un responsable du gouvernement américain qui a requis l'anonymat.

Vague de condamnations

Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-Moon, a demandé que le président Manuel Zelaya soit rétabli dans ses fonctions et que les droits de la personne soient totalement respectés.

L'assemblée générale des Nations unies se réunira en urgence, lundi, pour examiner la situation politique au Honduras.

Le Groupe de Rio, qui comprend 23 pays latino-américains, a exprimé « sa plus énergique condamnation du coup d'État perpétré au Honduras qui a interrompu l'ordre constitutionnel et la démocratie dans ce pays en destituant de manière illégitime le président Manuel Zelaya de sa charge ».

Réunis d'urgence, les membres de l'Organisation des États américains (OEA) ont condamné les événements. Le secrétaire général de l'OEA a dénoncé le « coup d'État ».

Le président socialiste vénézuélien, Hugo Chavez, a dénoncé sans tarder ce « coup d'État », suivi par le président bolivien Evo Morales. Le président Chavez a peu après réagi à l'annonce de l'arrestation présumée de son ambassadeur au Honduras en affirmant que ses troupes étaient en état d'alerte

L'Équateur a fait savoir qu'il refuserait de reconnaître tout gouvernement issu de ce coup d'État.

Le Brésil a condamné pour sa part le coup d'État militaire au Honduras et a demandé à l'OEA de se maintenir en assemblée permanente pour analyser la question. Le gouvernement brésilien exige que le président Zelaya soit « immédiatement et inconditionnellement reconduit dans ses fonctions ».

L'Union européenne (UE) s'est, elle aussi, rapidement exprimée pour dénoncer la situation. « Cet acte constitue une violation inacceptable de l'ordre constitutionnel au Honduras. L'UE appelle à la libération immédiate du président et un retour rapide à la normalité constitutionnelle », a fait savoir l'UE.

De conflit larvé à crise ouverte

La Cour suprême a ordonné à l'armée de déposer le président dans la foulée de sa décision de s'opposer à son projet de référendum sur une modification de la Constitution.

Le président, la Justice et l'armée sont à couteaux tirés depuis un certain temps. Les militaires s'opposent à la volonté du président d'aller de l'avant avec une réforme constitutionnelle, qui aurait permis à un président en exercice de briguer un second mandat.

Une consultation populaire prévue à cet effet devait avoir lieu ce dimanche, mais la Cour suprême a fait valoir plus tôt cette semaine qu'elle n'aurait aucun caractère légal. Une telle réforme permettrait au président Zelaya de briguer un deuxième mandat le 29 novembre prochain, mais il s'est jusqu'ici défendu d'en avoir l'intention.

Le refus de l'armée de l'appuyer a incité cette semaine M. Zelaya à limoger le chef d'état-major des forces armées. Cette décision a provoqué la démission du ministre de la Défense, suivie de celle des chefs de l'armée de terre, de l'air et de la marine.

La Cour suprême s'est peu après déclarée de façon unanime pour le retour en poste du chef d'état-major.

Élu en 2006 comme conservateur, M. Zelaya s'est depuis rapproché des dirigeants de la gauche antilibérale de la région, au premier chef le président socialiste vénézuélien Hugo Chavez.

Une entrevue troublante à El Pais

Dans une entrevue accordée avant les événements au quotidien espagnol El Pais, publiée dimanche, M. Zelaya affirme qu'un coup d'État avait été préparé, mais que le refus de Washington de l'avaliser l'avait fait échouer.

« Tout était en place pour le coup, et si l'ambassade américaine l'avait approuvé, il aurait eu lieu, dit M. Zelaya. Je suis toujours en poste uniquement grâce aux États-Unis. [...] Vendredi, autour de 1 h du matin, le Congrès adoptait un décret me rendant inapte à exercer mes fonctions, et l'armée se mobilisait. Des coups de téléphone ont été donnés - je ne peux pas dire à qui et par qui - mais ces appels ont empêché le coup. »

Avec les informations de Agence France-Presse, Associated Press, Reuters et BBC

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