Des actions vendues sans preuve d'achat

Schéma du frein intégral
Photo : www.carbibles.com
Des actionnaires n'ont jamais reçu de papiers confirmant leurs investissements dans la firme de Blainville. Newtech n'a jamais commercialisé son frein révolutionnaire et est aujourd'hui dans la ligne de mire de l'Autorité des marchés financiers.
De nombreux actionnaires ayant investi leurs économies dans Newtech, une entreprise de Blainville qui projetait de commercialiser un frein révolutionnaire, n'ont jamais reçu de preuves écrites de leurs investissements.
Le projet n'a finalement jamais vu le jour, et des milliers de personnes qui ont investi des millions de dollars dans cette firme de Blainville, au nord de Montréal, se demandent ce qu'il est advenu de la compagnie et de son projet de frein à disque à contact intégral.
Radio-Canada a révélé mardi que l'Autorité des marchés financiers (AMF) enquête sur Newtech. Le chien de garde des marchés financiers québécois se fait toutefois avare de commentaires dans cette affaire.
Les investisseurs n'ont aucune nouvelle des dirigeants de la compagnie, Yvon et Claude Rancourt, et sont d'autant plus inquiets que plusieurs d'entre eux n'ont rien pour prouver leur investissement. « Personne n'a de certificat », déplore un homme qui a investi des dizaines de milliers de dollars dans l'entreprise.
Cet investisseur, qui désire garder l'anonymat de crainte de subir des représailles, soutient qu'il a fait affaire avec un dénommé Marcel Pontbriand. D'autres personnes disent avoir vécu la même situation avec le même homme, mais refusent d'accorder des entrevues.
Le nom de Marcel Pontbriand revient en fait dans plusieurs poursuites judiciaires liées à la vente d'actions de Newtech. Selon une décision de la Cour supérieure du Québec rendue contre lui en 2006, M. Pontbriand a aidé Newtech à se sortir du pétrin en 2001, en achetant des actions qu'il a ensuite revendues.
La juge Diane Marcellin a écrit que Marcel Pontbriand est un homme d'affaires qui ne s'embarrasse pas avec les règles et qui prend les moyens qu'il estime utiles pour parvenir à ses fins. M. Pontbriand a par ailleurs déjà été condamné à une amende pour exercice illégal de la profession de médecin par le Collège des médecins du Québec.
Radio-Canada a tenté de retrouver Marcel Pontbriand. L'homme possède des compagnies de meubles et de transport, ainsi qu'une maison à Beloeil, au sud-est de Montréal. Sa résidence a toutefois été mise en vente par un prêteur privé, et les locaux de ses entreprises sont vides.
Radio-Canada a appris que Marcel Pontbriand vivait depuis plusieurs mois à Phoenix, en Arizona. Toutes les tentatives pour le joindre sont demeurées vaines. Les dirigeants de Newtech, Yvon et Claude Rancourt, n'ont pu être joints non plus, malgré plusieurs tentatives.
Un projet avorté
Personne ne sait avec exactitude ce qu'il est advenu du projet de frein à disque intégral, qui devait révolutionner le monde des transports et qui soulevait l'intérêt des grands de l'industrie automobile.
En 2004, le président-directeur général de Newtech, Yvon Rancourt, se montrait pourtant optimiste dans une entrevue accordée à Radio-Canada depuis son usine d'assemblage en Chine. « On introduit le produit au Québec prochainement, et les premiers camions sur roues vont être au Québec, définitivement », affirmait-il.
Le projet ne s'est finalement pas concrétisé: l'entreprise a semblé manquer de financement pour mettre son produit révolutionnaire sur le marché, tant au Québec qu'ailleurs dans le monde.
Dans la même période où M. Rancourt a accordé une entrevue à Radio-Canada, des problèmes ont surgi. Des créanciers ont entamé des poursuites de plusieurs centaines de milliers de dollars contre l'entreprise pour se faire payer. De son côté, l'AMF a interdit à Newtech de négocier ses titres.
Les actionnaires de Newtech sont au désespoir. Certains ont investi des dizaines de milliers de dollars, d'autres, des centaines. À une exception près, tous les investisseurs contactés ont refusé de parler. Certains entretiennent toujours l'espoir que le projet se concrétise et ne veulent pas lui nuire.