Les conservateurs montrés du doigt

Photo : Luc Lavigne
Prenez note que cet article publié en 2009 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
À Ottawa, l'opposition accuse les conservateurs d'avoir laissé tomber les régions. Par ailleurs, le grand patron du diffuseur public reproche au gouvernement Harper de donner au privé l'aide qu'il refuse d'accorder à Radio-Canada.
Les compressions à Radio-Canada ont continué d'alimenter la période des questions à la Chambre des Communes, jeudi, au lendemain de l'annonce de la suppression de 800 postes d'un océan à l'autre.
Les partis d'opposition ont accusé le gouvernement Harper d'avoir laissé tomber les régions et les communautés francophones hors Québec. Celles-ci seront durement frappées par les compressions d'au moins 171 millions de dollars.
Tous s'accordent pour dire que les conservateurs sont les premiers responsables des compressions. À leur avis, le pire aurait pu être évité si Ottawa avait accordé au radiodiffuseur public l'aide financière d'urgence qu'il réclamait.
Inquiétude pour les services en régions
Le député néo-démocrate d'Acadie-Bathurst, Yvon Godin, craint que les stations régionales de sa circonscription ne deviennent des coquilles vides. Plusieurs postes de journalistes et de recherchistes seront supprimés, ainsi que des émissions régionales.
Quant au député libéral Marcel Proulx, de la circonscription de Hull-Aylmer, il s'inquiète pour les techniciens et les travailleurs du milieu culturel de l'Outaouais et de l'Ontario français qui perdront leur emploi au cours des prochaines semaines.
Dans une intervention musclée, son collègue Pablo Rodriguez a été jusqu'à reprocher au ministre du Patrimoine, James Moore, d'envoyer Radio-Canada « au diable » en n'intervenant pas.
Pour sa part, le Bloc québécois a souligné que la disparition de plusieurs émissions de radio et de télévision aura des conséquences sur des milliers de créateurs du secteur privé, C'est notamment le cas des producteurs, des réalisateurs, des comédiens et des recherchistes.
Selon leur porte-parole en matière de patrimoine, Carole Lavallée, ce sont 3200 travailleurs qui sont menacés, dont une majorité de pigistes, d'artistes et d'employés de sociétés de production.

Photo : Luc Lavigne
C'est pourquoi la députée bloquiste entend demander des explications à ce sujet au ministre du Patrimoine, ainsi qu'au PDG de Radio-Canada, Hubert Lacroix. Lundi dernier, elle avait déposé une motion pour les entendre en comité la semaine prochaine. Cette requête devrait être appuyée par le Parti libéral et le NPD.
Ce comité se consacre à une étude sur l'évolution de l'industrie de la télévision. En effet, Radio-Canada n'est pas la seule entreprise de radiodiffusion à voir ses revenus diminuer tandis que ses frais augmentent. D'ailleurs, jeudi, aux Communes, le premier ministre Harper a répété que Radio-Canada n'est pas le seul diffuseur qui est en difficulté au pays.
En effet, la plupart des télévisions privées traditionnelles ont récemment annoncé des compressions dans leurs services d'information. C'est notamment le cas chez CTV et le réseau Global.
Les reproches d'Hubert Lacroix
Le grand patron de Radio-Canada, Hubert Lacroix, a reproché au gouvernement Harper de donner aux télédiffuseurs privés l'aide qu'il refuse d'accorder à Radio-Canada. En effet, Ottawa a l'intention de leur accorder des allégements fiscaux.
Ce qui m'irrite, ce qui me déçoit, c'est de voir de l'aide potentielle en allègement fiscal [...], alors qu'on ne nous permet pas, nous, une attention adéquate sur notre concept de flexibilité financière.
Dans un discours prononcé jeudi devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, Hubert Lacroix a également laissé entendre que Radio-Canada pourrait faire de nouvelles mises à pied si la société d'État ne réussissait pas à obtenir 125 millions de dollars pour les actifs qu'elle a planifié de vendre.
« Le plan qu'on a présenté hier [mercredi] à nos employés, auquel j'ai fait référence encore aujourd'hui, a comme hypothèse de départ une hypothèse importante, qui est la possibilité pour nous de vendre 125 millions de dollars d'actifs pour équilibrer le budget. Si on n'est pas capables de faire ça ou on n'est pas capables de garder le produit de ces transactions-là, il est certain qu'il va falloir qu'on fasse des coupures additionnelles pour pouvoir équilibrer le budget. On ne peut pas s'en sortir », a-t-il admis.
Le PDG de Radio-Canada a précisé que ces 125 millions de dollars d'actifs proviennent de deux sources: des immeubles et « une monétisation de flux de trésorerie ».
Le président du Syndicat des communications de Radio-Canada (CSN), Alex Levasseur, craint lui aussi ce qui risque d'arriver si la SRC ne parvient pas à vendre tous les actifs qu'elle souhaite vendre. « Si jamais on n'a pas les confirmations, c'est sûr que ça pourrait être beaucoup plus que ça. On pourrait aller à 1200, 1300 mises à pied », a-t-il déclaré au terme de l'allocution de M. Lacroix.
Ventes d'actifs : James Moore se fait rassurant
Questionné jeudi sur les ondes de RDI sur ce qui adviendra des éventuels revenus de ventes d'actifs de CBC/Radio-Canada, le ministre du Patrimoine James Moore a déclaré qu'il entendait permettre à la société d'État de garder cet argent.
« Oui, la Société Radio-Canada va être capable de recevoir cet argent pour les possibles ventes qui s'en viennent. S'il y a des choix de faire des ventes, ça va venir devant le cabinet et on va prendre ces décisions dans le meilleur intérêt des Canadiens et l'argent va être retourné à la Société Radio-Canada », a déclaré le ministre Moore.
Lors d'une entrevue à Newsworld, l'équivalent anglophone du Réseau de l'information, le ministre du Patrimoine canadien a également annoncé que son gouvernement versera encore cette année une enveloppe spéciale de 60 millions de dollars à Radio-Canada. Le diffuseur reçoit cette somme d'appoint depuis 2001.
Avec les informations de La Presse canadienne