Survivre sur le toit du monde
Le mont Everest a mené à leur perte près de 200 alpinistes au fil des ans. Le Québécois Manuel Pizarro a bien failli être l'un d'entre eux. Antoine Deshaies l'a rencontré.
Gravir le mont Everest est un exploit que peu de gens parviennent à réaliser. Près d'un alpiniste sur dix y laisse sa vie.
Pourtant, un Québécois de 36 ans, Manuel Pizarro, a réussi l'exploit en mai dernier. Il a dû affronter d'immenses défis impossibles à prévoir. Voici le récit d'une d'aventure inimaginable...
Comme tous les alpinistes qui s'attaquent à l'Everest, Manuel Pizarro a retenu les services d'un sherpa pour l'assister. Tout se déroule bien jusqu'au dernier camp avant le sommet, à 8300 mètres (l'Everest fait 8848 m).
Après s'être installé dans un campement avec un alpiniste tchèque et un autre japonais, son sherpa appelle sa femme avec un téléphone satellite. L'appel bouleverse le sherpa: il annonce à Manuel Pizarro qu'il ne monte plus.
« Il m'a expliqué que sa femme avait eu un mauvais rêve. Que la mort l'entourait. Mais je me suis dit que c'était maintenant ou jamais. J'ai pris la décision, puis je suis parti. »
Si près du but, Pizarro décide de poursuivre sans son Sherpa et sans ses collègues alpinistes, trop vulnérables à ses yeux. Il réussit l'impensable et atteint le sommet en solitaire.
Le choc
À son retour au camp, son équipement a disparu, tout comme son sherpa. C'est la consternation, puisque les trois hommes devaient l'attendre. Seul le corps gelé de l'alpiniste tchèque gît dans la neige.
« Ce qui a suivi a été simplement une réalisation que ça allait être une nuit difficile. » L'alpiniste se trouve de quoi survivre: de la nourriture, une tente abandonnée et même une bonbonne d'oxygène.
Le lendemain, il reprend la route et retrouve son sherpa. Puis, au campement suivant, Pizarro retrouve aussi le grimpeur japonais, lui aussi est mort.
« Là on réalise que le rêve de la femme du sherpa s'était réalisé. Les deux hommes qui étaient assis à sa droite et à sa gauche le soir avant le sommet étaient décédés... »
Aujourd'hui, Manuel Pizarro ignore s'il retournera un jour sur le toit du monde. Chose certaine, l'expérience l'a grandi.
« Quand l'Everest décide que tu restes, tu restes. Quelque part, je me sens chanceux également parce que l'Everest m'a donné une chance. »
Oui, la chance d'être en vie... et de partager son expérience.