Un doctorat posthume pour une étudiante de l’Université d’Ottawa décédée d’un cancer
La Faculté des sciences sociales rendra hommage à Stéphanie Bacher, doctorante décédée cet automne à l’âge de 34 ans.

Un diplôme de doctorat posthume sera décerné par l’Université d’Ottawa pour souligner l’excellence du travail accompli par Stéphanie Bacher.
Photo : Avec la gracieuseté de Guillaume Deschênes-Thériault
Stéphanie Bacher a mené sa vie avec passion jusqu’au bout. Aux soins palliatifs, elle discutait encore avec enthousiasme de politique comparée et de politique africaine avec ses professeurs venus lui faire leurs adieux. La Faculté des sciences sociales de l’Université d’Ottawa décernera un rare diplôme de doctorat posthume à cette étudiante d’exception.
La candidate au doctorat en science politique avait reçu un tout premier diagnostic de cancer en 2009. Malgré plusieurs récidives, les traitements lui ont permis de profiter de la vie à 200 %, comme le souligne son mari, Guillaume Deschênes-Thériault.
Le crabe a finalement emporté son amoureuse le 29 septembre dernier. Stéphanie Bacher avait 34 ans.
Le doctorat posthume, ça n’enlève pas la peine, mais ça fait un petit baume au cœur de dire que son travail est reconnu à sa juste valeur.

Stéphanie Bacher et Guillaume Deschênes-Thériault, lors d’un voyage en Égypte en juillet pour célébrer leur premier anniversaire de mariage.
Photo : Avec la gracieuseté de Guillaume Deschênes-Thériault
Stéphanie Bacher refusait de se définir par sa maladie. Elle avait tellement d'autres projets à vivre, tellement d'autres choses à faire qu’être malade. Ce n'était pas ça son quotidien
, résume son conjoint avec lucidité.
L’étudiante, qui a été reporter au journal étudiant La Rotonde, se passionnait pour la démocratie et les droits de la personne. Elle a notamment agi comme bénévole auprès de l’organisation Amnistie internationale, en plus de siéger au Centre de recherche et d’enseignement sur les droits de la personne de l’Université d’Ottawa.
Son doctorat, récompensé par une bourse du Conseil de recherches en sciences humaines, porte sur la résilience du régime autoritaire en Ouganda. Malgré son cancer, Stéphanie s’est rendue à deux occasions dans ce pays pour mener ses recherches.

Stéphanie Bacher a décalé des traitements médicaux pour lui permettre d’effectuer ses recherches terrain en Ouganda.
Photo : Gracieuseté : Guillaume Deschênes-Thériault
C’est vraiment pas tout le monde qui aurait eu la capacité et la détermination de se rendre sur ces terrains-là
, concède l’homme qui a pu partager le plaisir du voyage avec sa complice dans la dernière année.
Les amoureux ont profité de 2023 pour courir le monde, sans savoir qu’ils tissaient ensemble leurs ultimes souvenirs : Nouvel An en Toscane, Pâques à la Barbade, visite des pyramides d’Égypte en juillet... et Las Vegas en août, pour les noces de la sœur de Guillaume. Quelques semaines plus tard, Stéphanie poussait son dernier souffle.
Une évidence et une marque de reconnaissance importante
L’idée que la Faculté des sciences sociales décerne un diplôme de doctorat posthume à Stéphanie Bacher s’imposait, selon le directeur de l’École d’études politiques, Frédéric Vairel. Il s’agit d’une marque de reconnaissance rarissime dans l’histoire de l’Université.
C’était une évidence, parce que c’était une personne solaire, brillante, d’une intelligence extrêmement vive. Disons que la question ne s’est pas posée
, affirme celui qui était aussi membre de son comité de thèse. Pour lui, les capacités de sa jeune collègue se révélaient tout simplement hors normes
.

Pour le professeur Frédéric Vairel, Stéphanie Bacher laisse un souvenir marquant pour ses pairs à l’École d’études politiques.
Photo : Radio-Canada / Stéphanie Rhéaume
Avec l’appui des autres membres du comité et l’accord du conjoint de Stéphanie Bacher, Frédéric Vairel a entrepris les démarches administratives pour faire reconnaître le doctorat de sa consœur universitaire.
C’est la chose la plus difficile que j’ai eu à faire
, admet-il, l’émotion dans la voix.
À la différence d’un diplôme in memoriam, le doctorat posthume ne se contente pas de rendre hommage, mais reconnaît le travail académique accompli.
Compte tenu de l’avancement des travaux de l’étudiante et du fait que sa thèse aurait pu être terminée dans l’espace d’une session à temps plein, toutes les conditions étaient réunies pour lui accorder son doctorat.
Ce diplôme posthume sera décerné à Stéphanie Bacher au cours de la prochaine cérémonie de collation des grades qui se tiendra en juin à Ottawa.
Ça va être un moment riche en émotions
, concède son mari, Guillaume Deschênes-Thériault, lui aussi doctorant en science politique. C'est elle qu'on aurait voulu voir monter à l’avant pour chercher son doctorat
.
Avec les informations de Marie-Lou St-Onge et Marie-Eve Dumulong