Déforestation dans Péninsule : Alain Deneault veut qu’on cesse d’exploiter la forêt

Alain Deneault, vice-président d'Imaginons la Péninsule acadienne autrement, est préoccupé par ce qu'il voit et entend dans le débat entourant l'avenir de l'ancien champ de tir de Tracadie.
Photo : Gracieuseté de Faustine Lefranc
Le philosophe Alain Deneault, professeur au campus universitaire de Shippagan de l'Université de Moncton en a long à dire sur la déforestation qui a cours depuis des années dans la Péninsule acadienne.
Résident de cette région, il est engagé dans la communauté. Depuis le printemps dernier, il est le vice-président du collectif Imaginons la Péninsule acadienne autrement, un organisme que se veut un catalyseur d'initiatives environnementales
.

Les terres déboisées à l'ouest de Tracadie-Sheila sont destinées à la monoculture du bleuet.
Photo : Radio-Canada / Louis-Philippe Trozzo
Il a vu ces images de déforestation qui ont été diffusées au cours des derniers jours.
Il faut cesser de penser le territoire comme si on le colonisait encore comme il y a 200 ans.
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On n'est pas au 21e siècle quand on voit ces images-là
, affirme-t-il. C'est l'affaire d'acteurs sociaux rétrogrades. Il ne faut pas être du 21e siècle pour penser qu'on peut réduire la forêt à un strict site d'exploitation, d'abord pour le bois puis pour le sol.

L'ancien champ de tir de Tracadie est un lieu apprécié des amateurs de chasse, de pêche et de plein air.
Photo : Radio-Canada / Alix Villeneuve
Il fait référence au débat qui entoure l'avenir de l'ancien champ de tir de Tracadie, où le gouvernement du Nouveau-Brunswick veut remplacer des arbres par des champs de bleuets en faisant miroiter d'importantes retombées économiques. Les bleuetières sont étendues sur plus de 8000 hectares dans la région. Le projet du gouvernement prévoit de faire presque tripler leur surface.
Le philosophe suit ce débat avec beaucoup d'intérêt. Il a déjà pris part à une manifestation pour la préservation du territoire.

On voit ici Alain Deneault, au centre de la photo, tenant une pancarte, durant une manifestation sur l'ancien champ de tir de Tracadie.
Photo : Gracieuseté
Il est notamment préoccupé par les effets de la déforestation sur les changements climatiques.
Les forêts sont des puits de carbone dont on a besoin si on veut éviter une catastrophe planétaire
, explique-t-il. Et la question climatique, elle concerne aussi la Péninsule acadienne. Nous avons nous aussi notre rôle à jouer.
On ne peut pas voir les choses à courte vue et simplement voir dans un site forestier de l'argent, du capital et exploiter à merci comme s'il n'y avait pas d'autres enjeux en cause.
Il soutient la création d'un centre récréotouristique sur l'ancien champ de tir de Tracadie, en lieu et place des bleuetières. Il croit que cela permettrait de protéger la forêt et participer à l'économie locale.
Une « crise de confiance » envers les politiciens
D'autres aspects dans tout ce débat autour de la déforestation et des projets de bleuetières dans l'ancien champ de tir de Tracadie le font sursauter.
Il se dit par exemple très mal à l'aise et embêté
de voir que le principal porte-parole de l'industrie du bleuet, Donald Arseneault, directeur général de Bleuets Nouveau-Brunswick, est un ex-ministre libéral des Ressources naturelles et ancien vice-premier ministre.
Cela soulève, à son avis, plusieurs questions, notamment au plan éthique. Une telle situation n'est pas étrangère d'après lui à une crise de confiance
de la population envers les politiciens.

Le directeur général de Bleuets N.-B., Donald Arseneault, est un ex-ministre des Ressources naturelles.
Photo : Radio-Canada
Les députés qui aujourd'hui réagissent comme tout le monde aux images en étant émus, en étant inquiets, sont des députés libéraux qui s'inscrivent en faux contre un projet qui est porté par un ancien collègue
, fait-il remarquer.
Une mobilisation plus importante?
Quant à assister à une plus importante mobilisation populaire et des élus pour sauver les forêts, le philosophe ne se berce pas d'illusions.
Cela surviendra lorsqu'on comprendra collectivement qu'une approche passéiste, industrielle et capitalistique de l'exploitation de la forêt dans la Péninsule acadienne est nuisible à plusieurs titres pour la population et que celle-ci n'en profite pas
, dit-il.