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Le réseau de la santé du Québec craint un déficit d’un milliard $ et des compressions

Tous les établissements de santé prévoient finir l'année dans le rouge, a découvert Radio-Canada dans des documents budgétaires.

Gros plan sur une affiche indiquant la direction pour se rendre à l'urgence d'un hôpital.

Presque tous les PDG du réseau de la santé du Québec anticipent d'importants déficits. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers

Selon nos sources, les PDG du réseau de la santé du Québec ont reçu le message de réduire leurs dépenses autant que possible, alors que presque tous anticipent d'importants déficits. Des données budgétaires obtenues par Radio-Canada prévoient un trou d'un milliard de dollars dans leurs caisses en 2023-2024.

Le recours à la main-d'œuvre indépendante, les heures supplémentaires et l’inflation plombent le début de l'année financière de nombreux établissements de santé du Québec.

Le cabinet du ministre de la Santé assure que le mur sera évité, qu'il n'y aura aucune coupe et qu'aucun service pour les patients ne sera touché, mais, pour le moment, les directions d'établissements sont loin d'être rassurées. Les mots rationalisation des dépenses et optimisation, habituellement synonymes de compressions, sont sur toutes les lèvres.

Le message aux PDG et même au MSSS est de ne pas faire de nouveaux développements et de dépenser moins. [...] Ils doivent viser l'équilibre budgétaire.

Une citation de Une source au ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec

Le défi est grand, car, pour le moment, tous les autres établissements de la province, sans exception, pensent finir dans le rouge, certains de beaucoup.

Précision

Dans une première version de ce texte, il était écrit que le CISSS de Lanaudière était le seul à prévoir un équilibre budgétaire à la fin de l'année, mais, finalement, l'établissement nous a informé, mercredi matin, qu'il se trouve dans la même situation que les autres.

Le cabinet du ministre Christian Dubé dit croire que l’année financière ne se terminera pas avec un déficit aussi important. Il affirme que les chiffres s’ajustent au fil des semaines, au fur et à mesure que Québec rembourse certaines dépenses aux établissements et que les financements sont reconduits. L’année dernière, par exemple, le déficit a été trois fois moins grand qu’anticipé.

N’empêche, plusieurs gestionnaires d’établissements s’inquiètent et agitent un drapeau rouge dans les documents budgétaires qu’ils ont remis au ministère de la Santé en début d’année. Tant qu’ils n’ont pas reçu la confirmation du refinancement de certains programmes, ils n’ont d'autre choix que d’indiquer un manque à gagner.

Le CISSS des Laurentides affirme, dans un document budgétaire, qu’à défaut d’une réponse positive, des mesures seront prises, sans spécifier lesquelles. Le CIUSSS du Nord-de-l’Île-de-Montréal écrit que certaines incertitudes demeurent et pourront avoir des impacts immédiats et non négligeables sur nos résultats. L’équilibre budgétaire est très fragile, peut-on également lire dans un document du CIUSSS de l’Estrie-CHUS.

On doit faire preuve de grande prudence avec les chiffres, car il s’agit d’estimations prenant en compte seulement les 12 premières semaines de l’année financière, tient à spécifier le cabinet du ministre Dubé.

Encore beaucoup d'argent pour la main-d'œuvre indépendante

Certains établissements sont tellement dépendants du personnel des agences de placement que leur budget en subit les conséquences. Par exemple, le CISSS de la Côte-Nord prévoit dépenser 146 millions de dollars pour faire venir ces travailleurs en 2023-2024, soit 27 % de son budget total.

Radio-Canada avait dévoilé en février que le recours à la main-d'œuvre indépendante avait coûté 3 milliards de dollars au réseau de la santé entre 2016 et 2022. La COVID-19 a été l’un des prétextes, même si la hausse s’est poursuivie en 2022-2023, au moment où la pandémie se résorbait grandement.

Des établissements ont vu leurs dépenses dans les agences de placement privées exploser encore plus depuis 2015-2016. C'est 77 fois plus au CISSS des Îles, 48 fois plus au Bas-Saint-Laurent, 36 fois plus en Gaspésie et 24 fois plus en Abitibi-Témiscamingue.

Les établissements de santé ont reçu le message de couper dans l'utilisation des agences de placement. Dès mercredi, un nouveau règlement entre en vigueur pour imposer un plafond de rémunération de 71,87 $ l'heure pour l'embauche d'une infirmière d'agence. Québec s'attend à ce que cette mesure produise d'importantes économies.

On va aussi commencer la transition pour mettre fin au recours aux agences dès octobre 2024 pour les grands centres et jusqu’en octobre 2026 pour les régions plus éloignées, rappelle le cabinet du ministre.

Les heures supplémentaires, source importante de dépenses

Pour d’autres établissements, ce sont les heures supplémentaires qui creusent le déficit. Le CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal, le CISSS de Laval et celui de Chaudière-Appalaches s’apprêtent à y recourir quatre fois plus en 2023-2024, par rapport à 2015-2016.

Québec demande aux établissements de mettre en place de meilleures pratiques en matière de ressources humaines, afin de réduire leurs coûts. Par exemple, l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont est parvenu à éliminer les heures supplémentaires obligatoires cet été, une première en 25 ans.

On doit être plus efficace et ça passe par un changement de culture. Nous vivons actuellement une gestion du changement et il faut être capable de travailler différemment.

Une citation de Le cabinet du ministre de la Santé du Québec, Christian Dubé

Le cabinet du ministre Dubé affirme également avoir économisé 40 millions de dollars en ce qui a trait aux absences prolongées. Un total de 1300 travailleurs du réseau seraient revenus en équivalent temps complet, ce qui se traduira par des résultats favorables dans les budgets des établissements.

Les effets de l'inflation se font sentir

Plusieurs établissements montrent aussi du doigt la hausse des prix et les taux d’intérêt sur les emprunts. À l'heure actuelle, Québec n’est pas en mesure de chiffrer les effets de l’inflation sur le réseau. Le gouvernement pourrait effectuer des remboursements avant la fin de l’année pour en réduire les répercussions.

Dans un document budgétaire, le CISSS de l'Abitibi-Témiscamingue évoque la hausse du coût des médicaments comme un facteur qui creuse le déficit. Au ministère, on nous confirme que certains traitements ont vu leur prix monter en flèche.

Par ailleurs, des établissements de santé attendent encore le remboursement par le ministère de millions de dollars dépensés durant la pandémie pour lutter contre la COVID-19.

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