« De retour », le Parti québécois dérobe Jean-Talon à la CAQ

Pascal Paradis et Paul St-Pierre Plamondon célèbrent la victoire du Parti québécois dans Jean-Talon.
Photo : La Presse canadienne / Jacques Boissinot
Les électeurs de la circonscription de Jean-Talon ont choisi de punir la Coalition avenir Québec (CAQ) de François Legault, lundi, préférant élire le candidat du Parti québécois Pascal Paradis dans une victoire sans appel.
Le vote caquiste s'est complètement effondré, lundi soir, au terme de l'élection partielle déclenchée le mois dernier après la démission de la députée Joëlle Boutin.
La CAQ a en effet été éjectée de son siège sans équivoque. M. Paradis (44 %) a devancé la candidate caquiste Marie-Anik Shoiry (21 %), récoltant plus du double des voix de sa principale poursuivante. Quelque 55,21 % des électeurs se sont prévalus de leur droit de vote.
Pascal Paradis devient ainsi le quatrième mousquetaire péquiste à l'Assemblée nationale. Déclaré vainqueur vers 20 h 45, il siégera aux côtés du chef Paul St-Pierre Plamondon, du député madelinot Joël Arseneau et de Pascal Bérubé.
Le PQ de retour
M. Paradis a concrétisé lundi une remontée spectaculaire du Parti québécois (PQ) dans ce qui était autrefois un château fort libéral. Les péquistes avaient terminé troisièmes au dernier scrutin général, l'an dernier, avec 18,7 % des suffrages exercés.
Le chef du PQ, Paul St-Pierre Plamondon, a profité de la victoire de Pascal Paradis pour lancer un avertissement aux autres partis à l'Assemblée nationale, en particulier au gouvernement Legault.

Pascal Paradis entre triomphant dans la salle remplie de militants.
Photo : Radio-Canada
La Coalition avenir Québec n'est plus invincible. Nous avons démontré clairement aux Québécoises et aux Québécois que la CAQ pouvait être vaincue et qu'un seul parti est en mesure de le faire et c'est le Parti québécois
, a-t-il déclaré en s'adressant aux militants réunis dans un restaurant de Québec.
On peut se le dire avec beaucoup d'humilité et aussi beaucoup d'enthousiasme : ce soir, le Parti québécois est de retour à Québec. Le Parti québécois est de retour au Québec.
Pascal Paradis, triomphant, a promis de faire sa place rapidement au Salon bleu. Je serai une voix forte pour vous
, a assuré le vainqueur.
Ce soir, les gens de Sainte-Foy et de Sillery lancent un message au gouvernement sur sa façon de faire les choses. Pour le signaler, ils ont décidé d’envoyer, pour la première fois de l’histoire de la circonscription de Jean-Talon, un député du Parti québécois à l’Assemblée nationale
, a-t-il lancé.
Le PQ n'avait aucun représentant dans la région de Québec depuis le départ d'Agnès Maltais, en 2018.
Legault prend le blâme
Du côté de la Coalition avenir Québec, les mines étaient basses, accusant un retard de près de 10 points sur le score obtenu aux élections de 2022 par la députée démissionnaire Joëlle Boutin.
Il s’agissait d’un premier test pour la CAQ depuis l’abandon du projet de troisième lien, pourtant promis aux électeurs de la région.
Prenant la parole devant élus et militants, le premier ministre et chef caquiste, François Legault, a pris le blâme pour la déconfiture de ses troupes.

« Marie-Anik, comme je te disais tout à l’heure en privé, t’as pas perdu, c’est la CAQ pis moi qui avons perdu », a dit le premier ministre à sa candidate défaite.
Photo : Radio-Canada
Marie-Anik, tu n'as pas perdu, c'est la CAQ et moi qui avons perdu. Je veux te dire un énorme merci, tu as fait une campagne extraordinaire
, a-t-il dit. Je pense que les gens de Jean-Talon ont été les porte-parole de tous les citoyens de la grande région de Québec pour dire : "vous devez faire un examen de conscience". C'est ce qu'on va faire.
Ce soir, il y a une chose qui est claire, c'est que les gens de Québec nous ont envoyé un message.
Le premier ministre entend lancer une réflexion rapidement en vue des prochaines élections générales, dans deux ans. On va agir pour mieux répondre aux préoccupations, aux priorités et à comment vous voyez le développement de Québec sur la rive nord et la rive sud. On va vous écouter. Je suis déterminé à aller rechercher cette confiance
, a-t-il promis aux électeurs de la Capitale-Nationale et de Chaudière-Appalaches.
Les élus caquistes de la région de Québec étaient aussi conscients du message envoyé par la population. Ça nous dit qu'il y a des ponts à rebâtir, c'est le cas de le dire. Il y a un lien de confiance à reconquérir, puis on va y travailler. Donc, on doit se rassembler, nous, les gens de la CAQ, pour reconstruire ce lien de confiance là spécifique pour les gens de Jean-Talon
, a notamment réagi le député de la circonscription de Charlesbourg, Jonathan Julien.
La CAQ occupait Jean-Talon depuis 2019. Avant l'arrivée des caquistes, les libéraux avaient régné sans partage sur la circonscription depuis 1965.

La vice-première ministre Geneviève Guilbault au rassemblement de la CAQ, au Centre de glace Intact Assurance, en attendant les résultats de l'élection.
Photo : Radio-Canada
QS tend la main au PQ
Chez Québec solidaire (QS), le candidat Olivier Bolduc échoue une troisième fois consécutive à se faire élire dans Jean-Talon depuis 2019.
M. Bolduc a été investi candidat dans la controverse pour le présent scrutin. L’exécutif national avait invité les militants de la circonscription à voter pour une candidature féminine. Ces derniers ont finalement préféré M. Bolduc à la professeure Christine Gilbert.
Accompagné lundi soir du co-porte-parole solidaire Gabriel Nadeau-Dubois, M. Bolduc a admis être en réflexion pour les élections générales de 2026. Plutôt que de réserver leurs attaques pour le Parti québécois, les deux hommes ont plutôt tendu la main à Pascal Paradis.

Gabriel Nadeau-Dubois et le candidat solidaire Olivier Bolduc
Photo : Radio-Canada / David Rémillard
Plus que jamais, il faut un tramway à Québec
, a insisté M. Bolduc, imité quelques instants plus tard par Gabriel Nadeau-Dubois. On espère que le PQ va se joindre à Québec solidaire.
Les solidaires sont représentés dans la région de Québec par Étienne Grandmont (Taschereau) et Sol Zanetti (Jean-Lesage).
Avec le PQ, les solidaires espèrent travailler contre
les caquistes au cours des prochains mois. Ils espèrent trouver une entente sur des enjeux comme la qualité de l'air, la crise du logement et le coût de la vie.
Sans chef à l'heure actuelle, les libéraux n'ont même pas passé près de reprendre une circonscription qui leur avait souri dans le passé. La candidate Élise Avard Bernier n'a obtenu qu'un peu moins de 9 % du vote.
Les conservateurs d'Éric Duhaime, représentés par Jesse Robitaille, ont pris le cinquième rang avec 6 % du suffrage.
On se réjouit de la défaite de la CAQ, a répondu le Parti conservateur. François Legault ne mérite pas l’appui de la population de Québec après ses mensonges au sujet du 3elien. Félicitations au candidat du Parti québécois pour sa victoire! Maintenant, on aurait souhaité que les gens votent pour un parti qui partage les idéaux de la population de Québec, un parti contre le tramway et pour un 3e lien autoroutier Québec-Lévis.
L'ex-péquiste Martine Ouellet ferme la marche avec 1,2 % des bulletins de vote, elle qui s'est présentée sous la bannière de Climat Québec.
Un pavé dans la mare
Avocat et directeur général d’Avocats sans frontières, Pascal Paradis s'est rapidement retrouvé sous les projecteurs cet été, forcé d'admettre qu'il avait eu des échanges avec la CAQ à l’aube des élections générales d’octobre 2022.
Il a profité de l'occasion pour jeter un pavé dans la mare. Lors de ses discussions avec le parti de François Legault, Pascal Paradis dit avoir exprimé son désaccord concernant l'idée de construire un tunnel autoroutier entre Québec et Lévis, soit le fameux troisième lien, projet aujourd'hui abandonné.
On m’a dit : "Vous savez, le troisième lien, ça ne se fera pas, mais on ne parlera pas de ça pendant les élections, ça va être après"
, a lancé M. Paradis. La réaction avait été épidermique chez les caquistes, qui ont accusé M. Paradis de mentir, et vice versa.