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Au Manitoba, les « droits parentaux » deviennent un enjeu électoral

Les progressistes-conservateurs promettent de changer la Loi sur les écoles publiques pour donner davantage de droits aux parents – une tactique électorale dangereuse, s’inquiètent des groupes LGBTQ+.

Une femme tient une pancarte sur laquelle est écrit « L'idéologie de l'identité de genre n'a pas sa place à l'école ».

Des manifestations contre « l'idéologie de l'identité de genre » ont eu lieu aux quatre coins du pays, le 20 septembre dernier.

Photo : Radio-Canada

L’atmosphère est tendue à Winnipeg. D’un côté, des manifestants qui se réclament du mouvement parental. Sur leurs pancartes, des slogans contre l’éducation sexuelle et « l'idéologie » de l'identité de genre. Face à eux, des contre-manifestants en défense des droits LGBTQ+.

Ces scènes se sont répétées d’un bout à l’autre du pays. Christian Michalik les a observées avec tristesse, mais sans grande surprise. Cet été, sa commission scolaire a été la cible d’un petit groupe de manifestants qui voient l’école publique comme un lieu d'endoctrinement.

Ils sont devant nos écoles, à distribuer des pamphlets, à vouloir dialoguer avec les parents, explique le directeur général de la division scolaire Louis-Riel. Ce sont des accusations sans fondement, que nous sommes pédophiles, qu’il y a de la pornographie dans nos écoles.

Il y a cette idée qu’on cache aux parents ce qui se passe dans nos salles de classe, alors que c’est tout le contraire.

Une citation de Christian Michalik, directeur général, Division scolaire Louis Riel
Christian Michalik debout à l'extérieur.

Christian Michalik dénonce la « méfiance » grandissante à l'endroit des enseignants et de l'école publique.

Photo : Radio-Canada / Hugo Levesque

Élections au Manitoba 2023

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Palais législatif du Manitoba

Christian Michalik y voit un mouvement organisé, mais extrêmement marginal. Les gens qui veulent imposer ces discours [...] ne sont pas des parents qui ont des enfants dans nos écoles, note-t-il.

Mais, depuis quelques mois, le vocabulaire des droits parentaux a quitté les groupes Facebook pour gagner l’espace public. C’est même devenu l'un des principaux slogans électoraux de progressistes-conservateurs manitobains que l'on peut lire sur les bancs de parcs, les autobus ainsi que sur des panneaux d’affichage.

Une pancarte sur laquelle on peut lire « The only party fighting for parental rights in school ».

Les conservateurs manitobains se targuent d'être « le seul parti qui se bat pour les droits parentaux dans les écoles ».

Photo : Radio-Canada / Hugo Levesque

Pas une question marginale, affirment les conservateurs

Les gens nous en parlent tout le temps aux portes, assure la progressiste-conservatrice Réjeanne Caron. La candidate constate que la question des droits parentaux résonne avec un large électorat : des parents, mais aussi des grands-parents, des tantes, des oncles, des sœurs, des frères, explique-t-elle.

Les parents veulent savoir ce qui se passe avec leurs enfants.

Une citation de Réjeanne Caron, candidate progressiste-conservatrice
Reéjeanne Caron devant un parc pour enfants.

Réjeanne Caron se présente dans la circonscription de Fort Rouge, à Winnipeg. Elle est policière depuis environ 30 ans.

Photo : Radio-Canada / Hugo Levesque

S’il est réélu, son parti a promis de modifier la Loi sur les écoles publiques du Manitoba. Les progressistes-conservateurs disent notamment vouloir mieux informer les parents de situations d’intimidation, mais leur cheffe entretient le flou sur les questions d’identité de genre ou d’éducation sexuelle.

Réjeanne Caron reste elle aussi évasive sur ces questions. La candidate se contente de répéter que son parti est à l’écoute des parents et qu’il faut mettre à jour la loi pour mieux refléter notre époque.

Le test manitobain

Je crois que plusieurs forces politiques conservatrices dans le pays sont très attentives à ce qui se déroule en ce moment au Manitoba, fait pour sa part remarquer le politologue Félix Mathieu.

Il affirme que la thématique des droits parentaux pourrait convaincre différents électorats : indécis des banlieues, communautés culturelles, ou sympathisants du convoi de la liberté.

Un homme qui tient une pancarte sur laquelle on peut lire « Laissez nos enfants tranquilles ».

À Winnipeg, manifestants et contre-manifestants se sont invectivés devant l'Assemblée législative.

Photo : Radio-Canada

Ça devient un enjeu un peu fourre-tout pour rassembler des personnes qui sont en réaction à l’évolution des mouvements sociaux sur la scène politique canadienne, observe le professeur à l’Université de Winnipeg.

Pour les progressistes-conservateurs, ça s’est révélé être une arme assez importante pour faire des gains.

Une citation de Félix Mathieu, professeur en sciences politiques à l'Université de Winnipeg

Les conservateurs manitobains ne sont pas les premiers à flirter avec le mouvement parental. La Saskatchewan et le Nouveau-Brunswick ont récemment adopté des politiques qui forcent les écoles à informer les parents de changements à l’identité de genre de leur enfant.

Après la Saskatchewan et le Nouveau-Brunswick, le Manitoba pourrait être la prochaine province à légiférer sur les droits parentaux en matière d'identité de genre et d'éducation sexuelle. Le Parti progressiste conservateur en a fait son cheval de bataille en vue des élections, mardi prochain. Des groupes y voient une plateforme homophobe et s'inquiètent de la polarisation grandissante sur cette question. Le reportage de Yasmine Mehdi

Une stratégie dangereuse, avertissent les groupes LGBTQ+

Selon le directeur du développement au Rainbow Resource Centre de Winnipeg, le soi-disant mouvement parental est d’abord et avant tout un mouvement homophobe, qui veut faire reculer les droits de sa communauté.

Je pensais que ces débats étaient finis depuis des années, mais on [voit] que ça recommence, déplore Evan Maydaniuk.

[Le mouvement parental] donne la permission aux gens d’afficher leur homophobie plus ouvertement.

Une citation de Evan Maydeniuk, directeur du développement, Rainbow Resource Centre

Le jeune Manitobain rappelle que des groupes religieux organisés œuvrent au sein de ce mouvement, qui a pris naissance aux États-Unis. C’est le même langage qu’en Floride, où il y a des don’t say gay laws, dit-il.

Une adolescente avec un drapeau arc-en-ciel sur une joue, un drapeau trans sur l'autre.

À Winnipeg comme ailleurs au pays, les contre-manifestants en soutien à la communauté LGBTQ+ étaient nombreux.

Photo : Radio-Canada / Tyson Koschik

Evan est déçu de voir que les droits parentaux sont devenus un enjeu électoral : une distraction, croit-il. Christian Michalik est du même avis, et aurait voulu que les partis débattent plutôt d'autres enjeux qui touchent les élèves manitobains (la maternelle à temps plein, par exemple).

Au lieu de ça, on donne de la crédibilité à des discours haineux et à des accusations qui ne sont pas fondées, regrette le directeur de division scolaire winnipegois.

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