Les émissions de gaz à effet de serre du Canada ont augmenté en 2022, selon un rapport

Les secteurs du pétrole, du gaz et du bâtiment ont, à eux trois, contribué pour près des trois quarts à l'augmentation des émissions totales du Canada entre 2021 et 2022. (Photo d'archives)
Photo : Associated Press / Darryl Dyck
Les émissions de gaz à effet de serre (GES) du Canada ont connu une hausse de 2,1 % en 2022 par rapport à 2021, d'après une analyse préliminaire de l'Institut climatique du Canada (ICC). L'analyse révèle que les secteurs pétrolier, gazier et industriel sont les principaux responsables de cette augmentation.
Si, l'an dernier, le Canada a réussi à réduire de 6,4 % ses émissions totales de GES par rapport à ses niveaux de 2005, celles-ci ont cependant augmenté de 14,2 mégatonnes d’équivalents de dioxyde de carbone entre 2021 et 2022.
Près des trois quarts de cette augmentation, soit 72 %, sont dus aux émissions provenant des secteurs pétroliers, gaziers et industriels, d'après le document publié jeudi.
Presque tous les secteurs de l'économie ont enregistré des diminutions importantes de leurs émissions. Celui de l’électricité, par exemple, en est à 56 % de réduction de gaz à effet de serre
, note Julien Bourque, analyste à l’ICC.
Il souligne que le secteur du pétrole et du gaz et celui du bâtiment entachent ce bilan, car ils connaissent une augmentation constante de leurs émissions depuis 2005.
Les analystes de l’ICC attribuent la hausse des émissions dans le secteur du bâtiment à l’augmentation des besoins en chauffage, qui nécessite notamment du gaz naturel.
Dans les secteurs pétroliers et gaziers, cette hausse est en partie attribuable à la reprise de l’économie, qui a entraîné une augmentation de la production. On a eu une augmentation de 3 % du produit intérieur brut, ce qui est quand même important
, souligne Julien Bourque.

Analyste à l'Institut climatique du Canada, Julien Bourque souligne que les secteurs du pétrole, du gaz et du bâtiment entachent le bilan des émissions du pays à cause de l'augmentation constante de leurs émissions depuis 2005.
Photo : Radio-Canada
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Des gains compromis?
L’ICC souligne que la hausse nette globale des émissions du pays aurait pu être plus importante, sans l’effet combiné des politiques climatiques et du développement de technologies plus propres, comme les voitures électriques et les thermopompes.
Ces deux facteurs ont évité au Canada d’émettre 22,9 mégatonnes de gaz à effet de serre de plus entre 2021 et 2022, d’après le rapport.
Le Réseau action climat Canada dénonce pour sa part que la hausse constante des émissions de l’industrie de l’énergie fossile et du secteur du bâtiment compromette les progrès réalisés par d'autres secteurs et par les politiques climatiques qui commencent à prendre effet
.
Ottawa salue le rapport, l’Alberta circonspecte
Steven Guilbeault, le ministre fédéral de l’Environnement et du Changement climatique, salue ce rapport préliminaire, dont il qualifie les conclusions d’encourageantes
.
L'inventaire officiel des émissions du Canada pour 2022 sera publié au printemps prochain.

Le ministre fédéral de l'Environnement, Steven Guilbeault, soutient que le Canada peut créer des emplois et de la prospérité tout en réduisant ses émissions de gaz à effet de serre. (Photo d'archives)
Photo : La Presse canadienne / Arlyn McAdorey
Le ministre affirme par ailleurs que le contenu du nouveau rapport prouve, une fois de plus, que nous pouvons créer des emplois et de la prospérité tout en réduisant nos émissions
.
En tant que première province émettrice de GES au pays en 2021, selon Environnement Canada, la réaction de l’Alberta était attendue.
La première ministre Danielle Smith a affirmé que la province a diminué ses émissions de méthane de 45 %, en marge d’une conférence de presse, jeudi. Je pense donc que nous faisons preuve de leadership
, a-t-elle indiqué.
L’Alberta étant le fer de lance de l'industrie pétrolière et gazière au pays, Danielle Smith dit miser sur les technologies pour réduire les émissions de ces secteurs. Cependant, « il faut être capable de mettre en œuvre la technologie au fur et à mesure qu'elle est disponible [...], et cela prend du temps », a-t-elle souligné.
Selon elle, la province dispose de projets de capture et de stockage du carbone à grande échelle, et elle est en train d’explorer d’autres voies.
Je pense qu’il est important d'avoir à l'esprit que cette étude a été financée par le département du ministre [Steven] Guilbeault
, dénonce pour sa part la ministre de l'Environnement de l'Alberta, Rebecca Schulz.

La hausse des émissions dans le secteur du bâtiment est attribuable à la hausse des besoins en chauffage, selon l'Institut climatique du Canada. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / Evelyne Asselin
Pour une règlementation plus rigoureuse
Des groupes de défense de l'environnement appellent Ottawa à prendre des mesures plus contraignantes pour obliger les pétrolières à réduire leurs émissions.
Les compagnies pétrolières et gazières prétendent qu'elles sont sur la voie de la carboneutralité, [...] mais il est clair qu'on ne peut pas leur faire confiance pour réduire les émissions de leur propre chef
, dit Alex Cool-Fergus, directrice des politiques nationales au Réseau action climat Canada.
Un plafonnement plus rigoureux des émissions de ces secteurs bénéficierait, de plus, d'un fort soutien de l'opinion publique, selon elle.
L’ICC recommande aussi à Ottawa d’accélérer l’application de futurs plafonds d’émissions pour le secteur pétrolier et gazier, la Stratégie canadienne pour les bâtiments verts, ainsi que la réglementation sur le méthane et celui sur l’électricité propre.
Tous les paliers gouvernementaux sont appelés à mettre les bouchées doubles pour atteindre notamment les objectifs de réduire les émissions nationales de 40 à 45 % d'ici 2030. « Ces objectifs restent toujours réalisables », si le Canada parvient à diminuer ses émissions de 5,4 % par année d'ici à 2030, croit l'ICC.
Avec les informations de Marc-Antoine Leblanc et Nassima Way