Identité de genre dans les écoles : la Saskatchewan utilisera la disposition de dérogation

Une casquette de la Saskatchewan illustrant le drapeau de la Fierté LGBTQ+ à Saskatoon le 1er juin 2023.
Photo : La Presse canadienne / Heywood Yu
Le premier ministre de la Saskatchewan, Scott Moe, a affirmé qu'il utiliserait la disposition de dérogation pour faire passer sa politique sur l'identité de genre dans les écoles. Cette décision fait suite à celle d'un juge d'accorder une injonction empêchant temporairement l'implantation de cette politique.
Cette dernière rendait obligatoire le consentement des parents pour qu'un établissement scolaire utilise le pronom et le nom choisis par un élève de moins de 16 ans.
La décision a été prise par le juge de la Cour du Banc du Roi Michael Megaw.
La protection des jeunes surpasse les intérêts émis par le gouvernement dans l'attente d'une audience complète sur la constitutionnalité de cette politique.
Malgré cette décision, le premier ministre de la Saskatchewan, Scott Moe, a demandé, jeudi, que les députés provinciaux se réunissent à l'Assemblée législative, et ce, dès le 10 octobre, pour voter en faveur de cette politique pour protéger le droit des parents
.

Au cours des dernières semaines, Scott Moe avait laissé entendre qu’il pourrait utiliser la disposition de dérogation pour faire passer la politique. (Photo d'archives)
Photo : La Presse canadienne / Heywood Yu
Notre gouvernement est extrêmement préoccupé par le fait que la cour a outrepassé ses responsabilités judiciaires en bloquant la mise en oeuvre d'une politique sur le consentement et l'inclusion des parents
, note Scott Moe dans une déclaration écrite. Une politique qui a le soutien de la majorité de la population, en particulier des parents.
C'est pour cette raison que notre gouvernement s'assurera que les droits des parents sont protégés et que cette politique est mise en place [...] en utilisant la disposition de dérogation de la Constitution canadienne.
Qu'est-ce que la disposition de dérogation?
La dérogation est une disposition de la Charte des droits et libertés qui permet aux gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux d'adopter des lois qui dérogent à certains droits garantis par la Charte pendant une période pouvant aller jusqu'à cinq ans.
Je suis absolument choquée, horrifiée que mon gouvernement s'apprête à priver ma communauté de ses droits
, affirme, pour sa part, la directrice générale de l'organisme LGBTQ+UR Pride, Ariana Giroux. C'est cet organisme qui a intenté une action en justice contre la province pour s'opposer à la mise en œuvre de la politique sur l'identité de genre dans les écoles.
Mme Giroux est toutefois heureuse de savoir que le juge Michael Megaw a accordé une injonction.
J'étais ravie, si heureuse, vous savez... Je suis si heureuse de savoir que le tribunal reconnaît cela pour ce que c'est et que c'est potentiellement dommageable pour la communauté transgenre et pour tous les enfants
, explique-t-elle.
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Le Nouveau Parti démocratique de la Saskatchewan (NPD), quant à lui, se réjouit de la décision du juge Michael Megaw.
Les néo-démocrates demandent à la province de délaisser la politique d’identité de genre dans les écoles. Ils affirment que cette politique forcera des enfants vulnérables à révéler leur identité sexuelle.
Le NPD dénonce d'ailleurs la décision du premier ministre d'utiliser la disposition de dérogation pour maintenir sa politique.
Je pense que ce n'est absolument pas la bonne décision à prendre. Il attaque la situation avec un marteau-pilon.
Nous ne trouvons pas normal que ce premier ministre utilise les pouvoirs du gouvernement pour intimider des enfants déjà vulnérables
, dit le porte-parole néo-démocrate en matière d'éducation, Matt Love.
De son côté, l'Association canadienne des libertés civiles a, elle aussi, tenu à condamner la décision du premier ministre saskatchewanais.
Invoquer la disposition de dérogation signifie que le gouvernement de la Saskatchewan reconnaît que sa politique est inconstitutionnelle
, affirme-t-elle dans un courriel.
Une politique qui fait des vagues
En août dernier, le gouvernement de la Saskatchewan a dévoilé sa nouvelle politique exigeant le consentement des parents pour l'éducation à la sexualité et les questions de genre pour les élèves de moins de 16 ans.
Conformément aux nouvelles directives, il était désormais requis que les parents des élèves donnent leur consentement aux établissements scolaires en ce qui concerne l'utilisation du prénom ou du pronom choisi par les élèves.
Pendant plusieurs semaines, la mesure du gouvernement provincial a suscité de nombreuses critiques. Cette politique mettrait les enfants vulnérables dans une situation de plus grand risque
, a affirmé la chef du Nouveau Parti démocratique de la Saskatchewan, Carla Beck.

« Cette politique présente un choix impossible : être dénoncé à la maison ou être mal genré à l'école, même lors de séances de conseil individuelles avec le personnel de l'école », indiquait UR Pride au début du mois de septembre. (Photo d'archives)
Photo : La Presse canadienne / Eduardo Lima
Au début du mois de septembre, l'organisme UR Pride, qui travaille en faveur des droits des personnes LGBTQ+ à Regina, a choisi de poursuivre le gouvernement de la Saskatchewan pour s'opposer à cette politique.
Les avocats représentant l'organisme affirment que cette politique provinciale est discriminatoire, car elle conduit les enseignants à mégenrer les élèves qui ne sont pas en mesure d'obtenir le consentement de leurs parents.
Ils arguent que cela va à l'encontre de la Charte des droits et libertés, notamment le droit à l'égalité et le droit à la sécurité.
UR Pride demandait donc une injonction afin de suspendre temporairement l’application de la politique provinciale, le temps de déterminer si cette dernière est constitutionnelle ou non.
Les avocats représentant le gouvernement de la Saskatchewan, pour leur part, affirment que la politique a été mal interprétée.
La province soutient que les parents doivent être impliqués si leur enfant choisit de changer de nom ou de pronom.
Des audiences doivent se poursuivre cet automne sur la contestation de la politique.
Avec les informations de La Presse canadienne