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Le Protecteur du citoyen donne raison à Louis Robert sur le fond de l’affaire

Des enquêtes confirment des dénonciations faites par le lanceur d'alerte envers le MAPAQ et un organisme.

Portrait de Louis Robert, dans un champ en partie inondé.

Louis Robert avait été injustement congédié du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec.

Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers

Près de cinq ans après sa dénonciation et maintenant à la retraite, l'ex-fonctionnaire Louis Robert peut maintenant se satisfaire d'avoir eu gain de cause sur la forme et sur le fond. Au cœur de cette affaire : l'indépendance de la recherche financée par le gouvernement sur les pesticides « tueurs d'abeilles ».

Le rapport du Protecteur du citoyen conclut que le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec (MAPAQ) avait été informé dès 2012 de problèmes au Centre de recherche sur les grains (CÉROM), qu'il finance, mais il n'a pas réagi en temps opportun aux différents signalements, ce qui constitue une situation grave de mauvaise gestion.

À l'époque, une étude réalisée par une chercheuse du CÉROM avait conclu qu'avec ou sans insecticides néonicotinoïdes, les rendements étaient les mêmes. En bref, ils étaient inutiles, tout en nuisant à l'environnement.

Les champs de sarrasin visités par Geneviève Labrie sont des lieux de biodiversité incroyables et regorgent d'insectes.

L'ex-chercheuse du CÉROM Geneviève Labrie était l'auteure de l'étude.

Photo : Radio-Canada

En 2018, une enquête de Radio-Canada révélait que cette chercheuse avait subi des pressions de la part du conseil d'administration du CÉROM pour camoufler ces résultats.

Une note ministérielle remise confidentiellement par le fonctionnaire Louis Robert faisait état de tentatives d'intimidation de la direction sur les chercheurs et d'ingérence de quelques membres du CA, et notamment de son président, dans la diffusion et l'interprétation des résultats de projets de recherche.

Le rapport publié jeudi vient confirmer la validité de ces informations. De façon exceptionnelle, le Protecteur du citoyen a décidé de nommer le ministère et l'organisation visés, puisque le dossier a déjà fait l'objet d'une médiatisation, mais il ne nomme pas les personnes concernées.

En mars 2022, l'ex-président du conseil d'administration du CÉROM, Christian Overbeek, avait affirmé devant public (Nouvelle fenêtre) que le Protecteur du citoyen l'avait blanchi. Les conclusions du Protecteur étaient alors confidentielles.

Christian Overbeek, lors d'un point de presse.

Christian Overbeek est président des Producteurs de grains du Québec, un syndicat membre de l'Union des producteurs agricoles.

Photo : Radio-Canada

Dans son rapport de jeudi, le Protecteur du citoyen rappelle que le mis en cause assumait des rôles au sein du CÉROM et des Producteurs de grains du Québec. Le Protecteur ajoute qu'il s'affichait publiquement en faveur des néonics et était inscrit au registre des lobbyistes pour s'opposer à une nouvelle réglementation qui voulait restreindre leur usage.

Le rapport conclut qu'il a outrepassé les limites de ce pouvoir en s'adressant directement au MAPAQ pour avoir une incidence sur certains sujets de recherche.

En discréditant les recherches du CÉROM, le mis en cause s'est placé de façon récurrente en situation de conflit d'intérêts. [...] Le mis en cause a jeté le discrédit sur l'organisme et ses chercheurs, affectant la confiance du public.

Une citation de Rapport 2022-2023 du Protecteur du citoyen

Il s'agit, selon le Protecteur, d'un manquement grave aux normes d'éthique et de déontologie.

Christian Overbeek n'assume, aujourd'hui, plus aucun rôle au sein du CÉROM. Les organisations ont bien collaboré et les manquements ont pris fin, a assuré le Protecteur du citoyen Marc-André Dowd, lors d'une conférence de presse, jeudi, à l'Assemblée nationale.

Invité à réagir, Christian Overbeek nous a fait parvenir la déclaration suivante, via une agence de relations publiques : Les Producteurs de grain (PGQ) et leur président analysent le rapport actuellement. Les PGQ remarquent que les nombreuses recommandations adressées au MAPAQ sont appliquées ou en cours d’application. Aucune entrevue ne sera accordée sur le sujet pour le moment.

Le Protecteur avait déjà blâmé le MAPAQ pour le congédiement de Louis Robert

Louis Robert, qui avait plus de 30 années d’expérience au MAPAQ, avait été congédié pour avoir transmis à Radio-Canada ces documents. Quelques jours plus tard, la protectrice du citoyen annonçait l’ouverture d’une enquête.

Dans son rapport, la protectrice avait sévèrement blâmé le ministère de l’Agriculture pour ne pas avoir respecté la loi et pour ne pas avoir protégé l’identité du divulgateur. C’est parce qu’il avait perdu confiance dans son employeur que Louis Robert s’était tourné vers les médias.

À la suite de la publication de ces conclusions, le 13 juin 2019, le premier ministre du Québec François Legault avait présenté des excuses au lanceur d’alerte, au nom de l’État québécois, et annoncé des discussions pour lui faire réintégrer son poste ou lui offrir une compensation.

Une des hauts fonctionnaires qui n'avaient pas suivi la procédure, Geneviève Masse, est toujours en poste au MAPAQ. En revanche, le sous-ministre de l'époque, Marc Dion, a quitté ses fonctions après la publication du premier rapport du Protecteur.

Marc-André Dowd s'adresse aux journalistes.

Le Protecteur du citoyen du Québec, Marc-André Dowd, présentait jeudi son rapport annuel.

Photo : La Presse canadienne / Jacques Boissinot

Usage abusif de fonds publics au CÉROM

Une seconde enquête du Protecteur, dévoilée dans le rapport, conclut qu'une autre personne du CÉROM mise en cause avait produit des réclamations financières injustifiées et abusives auprès du MAPAQ. Cette personne se serait aussi octroyé des augmentations de salaire importantes, sans l'approbation de quiconque, indique le rapport.

Deux personnes au CÉROM ont pu commettre les gestes reprochés du fait que le MAPAQ n'a pas surveillé le CÉROM comme il aurait dû le faire. [...] Les deux organismes n'ont pas fait preuve de la rigueur et de la transparence attendues.

Une citation de Rapport 2022-2023 du Protecteur du citoyen

La loi permet la levée de ses obligations de loyauté et de confidentialité à l'égard de son employeur lors de la divulgation d'un acte répréhensible et protège contre les représailles ceux qui dénoncent et ceux qui collaborent à une enquête comme témoins.

Selon La Presse, la présidente du Conseil du Trésor, Sonia LeBel, envisage de modifier la loi pour que les lanceurs d'alerte s'adressent uniquement au Protecteur du citoyen et non à leur ministère ou organisme d'attache. Actuellement, les divulgateurs ont le choix de l'un ou l'autre.

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