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En région, vivre dignement coûte plus cher qu’en ville, selon une nouvelle étude

Une cliente poussant un panier regarde des légumes emballés dans des pellicules plastique dans une épicerie.

Avec l'augmentation des distances parcourues, le prix des biens – et surtout des aliments – augmente, ce qui tire le revenu minimum viable vers le haut.

Photo : Getty Images / Romeo Gacad

Si les loyers sont souvent moins chers en région, la vie à l'extérieur des grands centres s'accompagne de hausses de frais considérables, si importantes, en fait, que plus de la moitié de la population vivant seule n'est pas en mesure de vivre dignement dans la quasi-totalité des municipalités examinées dans une étude de l'Institut de recherche et d'informations socioéconomiques (IRIS).

L'IRIS s'appuie sur sa définition d'un revenu viable pour parvenir à ses conclusions. Ce revenu est le seuil monétaire nécessaire non seulement pour répondre aux besoins de base, tels que calculés pour déterminer l'indice des prix à la consommation, mais aussi pour vivre dignement, c'est-à-dire en se permettant des loisirs, par exemple, ou encore des vacances.

Il s'agit également du seuil financier jugé nécessaire pour pouvoir parer aux imprévus, sans retomber immédiatement dans la pauvreté.

Dans le cadre de ses travaux, l'auteur de l'étude, Guillaume Tremblay-Boily, s'est penché sur les données socioéconomiques des habitants de 33 villes réparties dans 3 régions du Québec, soit la Montérégie, la Gaspésie et la Côte-Nord. Dans 25 d'entre elles, les personnes vivant seules seraient ainsi coincées sous ce seuil de vie digne, même si elles ne sont pas nécessairement sous le seuil de la pauvreté.

Cela fait depuis 2015 que l'IRIS calcule le revenu viable au Québec, mais c'est la première fois que l'on calcule le revenu viable pour des localités situées en dehors des grands centres urbains, explique M. Tremblay-Boily en entrevue à Radio-Canada.

Cela permet de braquer les projecteurs sur des régions rurales et éloignées, dont on entend souvent moins parler, [...] histoire d'avoir un portrait plus complet de la pauvreté au Québec.

Difficultés en région

D'ailleurs, écrit-on dans le document, les personnes vivant seules n'atteignent pas le seuil de vie digne dans toutes les municipalités de la Haute-Côte-Nord et de Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine.

À l'opposé, on dénombre sept municipalités où le revenu médian dépasse le seuil financier d'une vie digne. Selon l'IRIS, il s'agit soit de villes où ce revenu est particulièrement élevé – comme Saint-Lambert, Fermont, Havre-Saint-Pierre ou encore Vaudreuil-Dorion – soit des municipalités où le système de transport collectif rend possibles les déplacements sans voiture, comme Saint-Lambert, encore, mais aussi des villes relativement proches de Montréal, comme Longueuil et Saint-Jean-sur-Richelieu, sans oublier Châteauguay.

D'ailleurs, selon l'étude, Châteauguay, Longueuil et Saint-Jean-sur-Richelieu sont les trois seules villes, parmi toutes celles ayant fait l'objet d'un examen par l'IRIS, où le revenu viable est plus bas que celui de Montréal, soit entre 30 000 et 32 000 $, environ.

La métropole n'est cependant pas la grande ville où ce revenu viable est le moins important : à Québec, mais aussi à Sherbrooke et à Trois-Rivières, le montant minimum nécessaire pour qu'une personne seule puisse subvenir à ses besoins et atteindre un certain niveau de dignité est moindre.

À Sept-Îles, cependant, l'autre grande ville servant de point de comparaison, ce même montant minimal flirtera avec les 40 000 $ par année, toujours pour une personne seule.

Les montants avancés par l'IRIS vont aussi bondir, dans toutes les municipalités examinées, si l'on parle plutôt d'un ménage de deux personnes (un adulte et un enfant fréquentant un centre de la petite enfance) ou encore un ménage de deux adultes et de deux enfants en CPE.

La nourriture et le transport au cœur du phénomène

Qu'est-ce qui explique ces différences en matière de revenu viable, alors que l'on pourrait penser que le montant des loyers, dans les grandes villes, viendrait faire bondir ce revenu digne?

Selon Guillaume Tremblay-Boily, cette disparité s'explique par deux facteurs : les frais reliés au transport et ceux associés aux aliments.

Puisqu'il est nécessaire de consacrer davantage de temps et d'argent au transport des biens et services dans les régions plus éloignées, ces déboursés supplémentaires vont se répercuter sur le prix du panier d'épicerie, affirme-t-il.

Par ailleurs, la présence d'un réseau de transport collectif, qui vient mitiger les frais de déplacement des résidents, que ce soit pour aller travailler, effectuer des achats ou simplement se rendre du point A au point B, permet aussi de réduire le revenu minimum viable dans une municipalité.

Avec des options en matière de transport en commun, les résidents peuvent réaliser des économies annuelles allant jusqu'à 7600 $, soutient-on.

Voilà pourquoi l'étude prône un meilleur aménagement des villes, afin de pouvoir déployer des réseaux de transport collectif et réduire les frais de transport des biens et des individus.

Oui, nous estimons qu'il est possible d'investir dans le transport collectif [et d'obtenir des changements] à moyen terme, mais il y a des choses qui peuvent se faire à partir de ce qui existe déjà, mentionne l'auteur des travaux.

Selon lui, la restauration des voies de chemin de fer en Gaspésie fait partie des solutions envisageables pour réduire le recours à la voiture. Idem pour la route 138, sur la Côte-Nord, où pourraient circuler des autobus selon des horaires réguliers pour desservir les localités de cette région, avance-t-il.

Et pour étayer son argument à propos de l'importance des aménagements urbains dans le calcul du revenu minimum viable, M. Tremblay-Boily évoque le cas de Fermont, sur la Côte-Nord, où ce seuil, pour un ménage de deux adultes et deux enfants en CPE, est d'un peu plus de 73 000 $, alors qu'il grimpe à plus de 82 000 $ à Havre-Saint-Pierre, pourtant située dans la même région.

C'est le célèbre mur-écran de Fermont, qui regroupe la plupart des commerces et des services, qui réduirait la nécessité d'utiliser un véhicule, contribuant du même coup à des économies pour les citadins.

Selon les données du gouvernement du Québec, le revenu nécessaire pour se procurer un panier de biens et de services jugés essentiels pour couvrir les besoins de base s'établissait en 2019 à environ 20 500 $ pour une personne seule vivant à Montréal.

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