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Quelle est l’identité du TIFF en 2023?

Le logo du TIFF dans une fenêtre du théâtre Pricess of Wales.

Le logo du TIFF dans une fenêtre du théâtre Princess of Wales.

Photo : Radio-Canada / Michael Wilson

Le Festival international du film de Toronto (TIFF) s'achève ce dimanche. C'est l'occasion de faire le bilan de cette 48e édition troublée par les grèves mais qui pousse aussi à s'interroger sur l'identité du plus célèbre festival de cinéma au pays.

Ouvert avec la première internationale du dernier film d’Hayao Miyazaki, le Festival a présenté samedi son film de clôture, le documentaire Sly, produit par Netflix, qui met en vedette Sylvester Stallone.

Du film d'animation au documentaire en passant par les grandes productions américaines ou par le cinéma d'art et essai, le TIFF est connu pour aborder le 7e art dans toute sa pluralité. Cependant, cette année, le festival a donné l’impression de chercher ses repères.

Dans une édition perturbée par la grève des acteurs et des scénaristes à Hollywood, l'absence des stars, qui agissent généralement comme le moteur du Festival, s'est faite remarquer, surtout pour un événement réputé pour être une plateforme de lancement de la saison cinématographique nord-américaine et le point de départ de la course aux Oscars, dont la cérémonie doit avoir lieu en mars 2024.

Toronto a-t-il toujours les moyens de rivaliser avec Cannes et Venise, dont la sélection est plus pointue, ou avec le Festival de Berlin, qui joue aussi la carte de l’ouverture et de la diversité de genres? À moins de deux ans du cinquantième anniversaire, les invités partagent leur vision sur son identité.

Deux personnes de profil sous des projecteurs.

La réalisatrice Sophie Dupuis et l'acteur Théodore Pellerin étaient à Toronto pour le TIFF afin de présenter en première mondiale leur film «Solo».

Photo : Radio-Canada / Rozenn Nicolle

Festival international du film de Toronto 2023

Consulter le dossier complet

Affiche officielle du Festival international du film de Toronto 2023.

Voir du cinéma d’auteur en mangeant du popcorn

Le TIFF met en lumière et dans de bonnes conditions des gens à qui on ne laisse pas toujours la place dans l’industrie, pense Sophie Desmarais, qui incarne une cheffe d’orchestre dans Les Jours heureux. Ainsi, le Festival serait parmi les plus ouverts et les plus démocratiques, comme le pense Andréa Picard, une des programmatrices.

Diversité est aussi le terme choisi par la réalisatrice Sophie Dupuis, qui a présenté Solo. Elle apprécie de voir toutes sortes de genres de cinéma. Il est vrai que le TIFF est connu pour projeter des courts métrages de trois minutes et des documentaires de trois heures et demie, souligne Andréa Picard.

Cette qualité est appréciée des cinéastes à l'œuvre parfois radicale. Isiah Medina, qui réalise des films expérimentaux, a présenté cette année He Thought He Died. Il s’agit d’une réflexion pointue sur le monde de l’art, sa conservation et son rapport à l’argent. Le jeune homme le résume ainsi : Le TIFF, c’est peut-être la seule occasion de voir des films comme les miens avec un seau de popcorn sur les jambes et un verre de boisson gazeuse à la main.

Un cinéma au carrefour des mondes

Le critique de film Elijah Baron a le sens de la formule : Quand on me dit "TIFF", je pense à un lieu où tous les chemins se croisent. Il apprécie la possibilité d’être plongé à la fois en Europe, en Asie, en Afrique et en Amérique, un sentiment partagé par Apolline Traoré, venue présenter Sira, qui souligne que le Festival est le lieu où tous les films, où toutes les idées, peuvent être réunis à un même moment.

Un homme est debout dans la rue.

Le critique cinématographique Elijah Baron est de passage au TIFF pour attribuer le prix FIPRESCI, une récompense décernée par la Fédération internationale de critiques de films.

Photo : Radio-Canada / Alexis Raymon

Ce goût de la découverte est une valeur commune des programmateurs. Robyn Citizen est l’une d'elles : Nous essayons vraiment de mettre en lumière les nouvelles voix, assure-t-elle.

Ainsi, le TIFF apporte une nuance bienvenue dans l’industrie. Apolline Traoré dit connaître des festivals difficiles dans leur sélection, qui n’acceptent que des films qui remplissent certains critères arrêtés. Ce n’est pas le cas du TIFF, plus ouvert.

Une idée récurrente dans les témoignages des participants est celle de plonger dans des mondes différents, comme le dit D. W. Waterson, une réalisatrice qui présentait cette année Backspot. Nataleah Hunter-Young, programmatrice de la section Afrique et Moyen-Orient, met aussi en avant cette volonté de l’organisation : Il s’agit d’un espace où on accueille les personnes qui veulent voir le monde [sous un nouvel angle] et être en connexion avec tous les peuples.

Le TIFF serait aussi le reflet des valeurs de Toronto. Le chanteur Mark Clennon,qui joue le rôle principal dans le film I Don’t Know Who You Are, se félicite que ce festival se déroule dans sa ville d’adoption : Cet événement est très représentatif des valeurs de Toronto. En dix jours, on peut voir dix films de pays différents et on apprend sur dix cultures et langues différentes. Selon lui, tous les festivals n’ont pas cette richesse.

Portrait d'un homme.

Mark Clennon joue le rôle principal dans « I Don't Know Who You Are » de M. H. Murray.

Photo : Vortex Film

Anticiper les réactions du public

Ce festival a la réputation de permettre de prévoir la manière dont les films vont être reçus à leur sortie en salle. Andréa Picard assure qu’il s’agit d’un véritable festival public. En effet, en dehors de celles réservées à la presse, la plupart des séances sont remplies de cinéphiles dont le métier n’a pas forcément de rapport avec le milieu.

Alors qu’elle était à la soirée d’ouverture, Sophie Desmarais, actrice principale des Jours heureux, a noté ceci : Il y avait quelque chose de très démocratique ce soir-là. J’ai pu voir des gens avec des chaussures de course et du popcorn. Les personnes sont là pour voir des films, pas pour paraître.Cameron Bailey, le PDG du TIFF, approuve : Notre public, ce ne sont pas des snobs du cinéma, seulement des gens qui souhaitent partager leur passion.

Chloé Robichaud, la réalisatrice des Jours heureux, compare le TIFF avec les autres festivals : J’ai vécu Cannes et Venise et, à la différence du TIFF, c’est principalement des gens de l’industrie qui y participent. À Toronto, on parle avec le vrai public, il y a des rencontres qui sont organisées, c’est un reflet de la réalité.

Une équipe de film sur un tapis rouge.

La première du film « Les Jours heureux » de Chloé Robichaud a eu lieu à l'occasion du 48e Festival international du film de Toronto.

Photo : Radio-Canada / Teaghan Beaudette

Une passerelle vers le marché nord-américain

Steven Spielberg en 2022, Pedro Almodóvar en 2023 : ce sont souvent les réalisateurs d’envergure que le grand public retient de son expérience au TIFF. Mais qui se souvient que le Festival a été un tremplin pour des réalisateurs alors inconnus comme Christopher Nolan? Le TIFF est perçu par les réalisateurs comme le moyen de se faire connaître du public nord-américain.

Le sud-coréen Kim Taeyang, invité à présenter Mimang, son premier long métrage, voit dans le TIFFun tournant important dans sa carrière qui va lui permettre de développer son travail.

Pied à l’étrier pour certains, il est une confirmation pour d’autres. Le Franco-Malien Ladj Ly, réalisateur des Indésirables, a voulu présenter son film en première mondiale à Toronto, car il se souvenait du succès des Misérables, son précédent opus, auprès du public de la Ville Reine : Mon film touche à un sujet international. C’était important pour moi de viser les marchés étrangers, c’est donc pour ça que j’ai choisi Toronto.

Le critique de cinéma Elijah Baron constate que l’événement reste un point de rencontre très important en Amérique du Nord : il est absolument irremplaçable. C’est ce que pense aussi Théodore Pellerin, l’acteur principal de Solo : Quand je pense au TIFF, je pense "marché" et "visibilité".

Le public est un acteur à part entière de la réussite, selon Cameron Bailey : C’est devant ces cinéphiles que le cinéma du monde entier veut montrer ses films.

Un homme qui porte des lunettes.

Le PDG du TIFF, Cameron Bailey

Photo : Radio-Canada

Le moment où Toronto rivalise avec New York et Los Angeles

Le TIFF, c’est glamour, et au Canada, avoir un événement glamour, c’est rare, pense le Torontois M. H. Murray. Lui-même un réalisateur émergent, il assure que le TIFF est un rêve pour les cinéastes canadiens, et même si certains ne veulent pas l’admettre, tout le monde veut y être. Mark Clennon ajoute ceci : Toronto n’est pas Los Angeles ou New York, mais une fois par année, on a l’impression que Toronto est Los Angeles et New York à la fois.

Un avis partagé par D. W. Waterson, elle aussi torontoise : C’est un moment de magie à Toronto, on passe de l’été à l’automne en regardant des films, c’est incroyable.

Il est vrai qu’il n’est pas rare, les premiers jours, d’enlever sa veste lors du passage d’une salle climatisée à la rue tant la chaleur est écrasante. À la fin du Festival, on s'aperçoit qu’on n'a pas quitté la même veste de la journée à cause de la chute des températures.

Un homme marche dans la rue.

Le TIFF s'est déroulé à Toronto du 7 au 17 septembre.

Photo : (Michael Wilson/CBC)

La relative absence de vedettes américaines a-t-elle vraiment pesé sur l’ambiance du TIFF? On disait çà et là que la 48e édition était bien moindre que celle de l’an dernier, où Steven Spielberg était venu présenter The Fablemans en première mondiale.

Force est de constater qu’à l’aube de ses 50 ans (en 2025), le Festival a encore rempli sa mission : satisfaire le public torontois avec certains des plus grands films de l’année et, en même temps, faire émerger les talents de demain. Voilà une belle identité.

Saura-t-elle néanmoins perdurer alors que le Festival fait face à plusieurs défis, comme la perte de Bell, son principal commanditaire (Nouvelle fenêtre) (en anglais), et la pression de certains professionnels pour que l’institution coupe ses liens avec la banque RBC? Est-ce que ces questions d’ordre financier seront l’occasion de redéfinir les valeurs du TIFF? Rendez-vous l’an prochain pour connaître la réponse.

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