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AnalyseL’identité de genre a pris le pas sur l’inflation lors de la rentrée parlementaire

Bernard Drainville répond aux questions des journalistes lors d'un impromptu de presse à l'Assemblée nationale.

Le ministre de l’Éducation du Québec, Bernard Drainville, a exprimé sa volonté de constituer un groupe d’experts pour faire le point sur les questions d’identité de genre.

Photo : Radio-Canada / Sylvain Roy Roussel

Alors qu’on avait prédit une rentrée parlementaire marquée par l’enjeu de l’inflation et du coût de la vie, c’est finalement la question du genre qui s’est imposée.

Cela n’est bien sûr pas étranger au fait que les militants du Parti conservateur du Canada aient adopté, la fin de semaine dernière, une proposition visant à interdire les interventions médicales ou chirurgicales sur les mineurs qui souhaitent amorcer une transition de genre.

Des événements récents ont aussi forcé le gouvernement québécois à s’avancer, qu’il s’agisse de cette enseignante de la Montérégie qui a demandé à se faire appeler Mx Martine ou encore, de la décision d’une école de Rouyn-Noranda d’aménager des toilettes mixtes dans ses murs.

Alors que l’identité de genre est au cœur du débat politique depuis déjà plusieurs années aux États-Unis, elle a jusqu’ici fait bien peu de vagues à l’Assemblée nationale.

En 2016, des jeunes et leurs parents étaient venus à l’hôtel du Parlement réclamer le droit de faire modifier les informations inscrites à leur sujet dans les registres de l’état civil. Le gouvernement libéral de l’époque avait déposé un projet de loi permettant aux mineurs, dès l’âge de 14 ans, de demander seuls un changement de nom et de faire modifier la mention de sexe apparaissant sur leur acte de naissance. Ce projet de loi avait été adopté à l’unanimité.

D’autres modifications ont été apportées au Code civil l’an dernier pour permettre aux personnes non binaires de se représenter comme telles dans les registres officiels de l’État. Les parlementaires ont de nouveau été unanimes sur la question. Le gouvernement, qui souhaitait initialement rendre conditionnel à la réalisation d’une chirurgie génitale la modification de la mention de sexe, y a finalement renoncé.

Pareils changements auraient sans doute fait grand bruit dans d'autres juridictions, mais le débat s'est déroulé ici sans grands heurts, et surtout, sans qu’on en parle beaucoup. Le même constat s’applique à l’adoption, en 2021, du Guide à l'intention des milieux scolaires – Pour une meilleure prise en compte de la diversité sexuelle et de genre par le ministère de l’Éducation.

Dans l’arène politique

L'accumulation de cas particuliers, rapportés çà et là par les médias au cours des derniers mois, semble toutefois vouloir faire basculer le débat dans l’arène politique.

Ce genre de question là, les toilettes, les pronoms, les nouvelles théories d'écriture inclusive doivent être débattus ici, à l'Assemblée nationale, a plaidé Paul St-Pierre Plamondon en début de semaine, disant voir dans ces débats beaucoup d'idéologie en provenance de la gauche radicale. Il a depuis promis de clarifier sa pensée par écrit.

Craignant qu’une commission parlementaire sur ces sujets ne soit instrumentalisée à des fins partisanes, Bernard Drainville a indiqué hier qu’il préférait plutôt s’en remettre à un comité d’experts.

Si la prudence du ministre l’honore, il ne faudrait pas non plus croire que la mise en place d’un tel comité aplanira toute controverse. Non seulement le mandat et la composition du comité risquent-ils de faire l’objet de critiques, mais des représentants du milieu remettent déjà en doute la pertinence d’une telle initiative. Québec solidaire, de son côté, insiste surtout pour que les experts consultent les principaux intéressés. Dans tous les cas, le politique aura le dernier mot, si d’aventure les experts émettent des recommandations ou préconisent la révision de certaines orientations.

Des risques inhérents

La mise en place d’un comité ou d’une commission n’est jamais sans risque, mais pareil exercice peut aussi comporter des bénéfices, ne serait-ce que pour faire la pédagogie des changements proposés aux différentes politiques touchées par ces nouvelles réalités.

Si des élus et des citoyens ressentent la nécessité de s’exprimer sur ces sujets jusqu’ici largement passés sous le radar politique, du moins en territoire québécois, c’est peut-être parce qu’ils ont l'impression qu'on n'a pas encore pleinement fait le tour de la question. Ne pas donner la chance à chacun de s’exprimer pourrait avoir des effets pervers, tout comme l’expression mal encadrée de points de vue dissonants.

Les débats hargneux et très polarisés auxquels on a assisté, que ce soit aux États-Unis ou même, ailleurs au Canada, sur des sujets apparentés, ne sont certes pas de nature à rassurer. Au-delà du type de forum retenu, les parlementaires québécois ont toutefois déjà démontré qu’ils étaient capables, lorsqu’ils s’en donnent la peine, de discuter sereinement de sujets délicats. On pense bien sûr au débat sur l’aide médicale à mourir. D’autres exemples ont cependant été moins heureux, comme le débat sur la Charte des valeurs, qui a donné lieu à des excès de langage de toutes sortes.

Jusqu’ici, la question de l’identité de genre a généralement été abordée avec grande prudence par les partis représentés à l’Assemblée nationale. Comité ou commission, l’exercice proposé n’est pas sans risque, mais l’absence de discussion pourrait aussi laisser des traces.

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