Le coût total du REM sera de 7,95 milliards de dollars, 26 % de plus qu’annoncé

Depuis la mise en service du tronçon du réseau entre la Gare centrale et Brossard, plus d'un million de passages ont été enregistrés à bord du REM.
Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers
Les différents ajustements apportés au projet ainsi que la pandémie et les retards provoqués par le tunnel Mont-Royal et celui sous la station McGill, notamment, auront fait gonfler la facture du Réseau express métropolitain (REM) de plus du quart, ont annoncé les dirigeants du projet mercredi. La facture totale devrait donc s'établir à 7,95 milliards de dollars plutôt qu'à 6,3 milliards, comme prévu en 2018, lors de la première pelletée de terre.
Lors d'une conférence de presse, Jean-Marc Arbaud, le président et chef de la direction de CDPQ Infra, l'organisation qui chapeaute le gigantesque chantier, s'est bien défendu de tracer un portrait plus positif de ces dépassements de coûts.
Selon lui, le choix de 2018 comme année de référence plutôt que 2016, l'année où le premier concept avait été dévoilé, accompagné d'une facture de 5,5 milliards, s'explique par le fait qu'au moment de retenir les services des entreprises sélectionnées pour la construction, le projet du REM avait été largement bonifié.
On avait ainsi ajouté trois stations aux plans initiaux, en plus de s'assurer de connexions avec les lignes verte et bleue du métro, a-t-il affirmé. Cela est venu s'ajouter aux ajustements effectués pour réduire le bruit lors du passage des trains dans certains quartiers, entre autres.
Et parmi les débours supplémentaires depuis le début des travaux, en 2018, M. Arbaud rappelle l'impact de la pandémie, qui a provoqué de l'inflation et une perte de productivité
.
Par ailleurs, 20 % des dépassements de coûts seraient attribuables à deux situations problématiques dans deux tunnels : la présence de vieux explosifs dans le tunnel Mont-Royal et la nécessité de stabiliser la voûte du tunnel rejoignant la station de métro McGill, dans le centre-ville, affirme M. Arbaud.
Des excédents courants dans les projets d'infrastructures
Qu'à cela ne tienne, assure ce dernier : CDPQ Infra absorbe l'ensemble des excédents de coûts
, comme prévu dans le contrat signé avec Québec, à l'époque du gouvernement Couillard. La branche de la Caisse de dépôt et placement du Québec vise toujours un rendement de 8 %, a ajouté M. Arbaud.
Toujours au dire de celui-ci, ce dépassement de coûts de 26 % est une source de fierté
. Après tout, soutient-il, en évoquant une étude du cabinet McKinsey portant sur plus de 500 grands projets d'infrastructures, les excédents des projets sont de 79 %
en moyenne. Et pour les projets impliquant du transport ferroviaire, ces dépassements excéderaient souvent les 100 %, dit-il.
De passage à l'émission Zone économie, le président de la Caisse, Charles Émond, a assuré que le montant de 7,95 milliards était le meilleur estimé du projet, à ce jour
, sans toutefois assurer que c'était là le prix final
du chantier.
Les gros risques, les gros travaux sont derrière nous
, a soutenu M. Émond.
Interrogée au sujet de ce dépassement de coûts lors d'une mêlée de presse à l'Assemblée nationale, la ministre des Transports, Geneviève Guilbault, a affirmé qu'on le sait, dans les projets d'infrastructures, entre autres les projets de transport collectif, il y a des [excédents financiers]; les projets coûtent finalement plus cher que prévu
.
Reprenant à son compte l'avis selon lequel la pandémie est largement responsable de cette facture gonflée, la ministre a rappelé que la part du gouvernement demeure la même
.
Dans tous les cas, on a un projet qui est livré; le premier tronçon fonctionne bien.
Et à Montréal, la responsable du transport au sein du comité exécutif, Sophie Mauzerolle, a fait savoir que la Ville suit l’évolution du projet de très près, car c’est un projet essentiel qui va complètement transformer la mobilité à Montréal
.
On doit s’assurer que le déploiement se poursuit dans les meilleurs délais et surtout qu’on apporte les ajustements nécessaires le plus rapidement possible pour pallier [les problèmes] actuels, notamment la question du bruit qui affecte la qualité de vie des résidents de l’ouest de l’île
, a-t-elle ajouté par courriel.

Le reportage de Jacques Bissonnet
Le public au rendez-vous... malgré des accrocs
Pour sa part, Philippe Batani, premier vice-président aux affaires publiques, communications et stratégie de CDPQ Infra, n'en démord pas : depuis l'inauguration du tronçon entre la gare Centrale, au centre-ville de Montréal, et Brossard, sur la Rive-Sud, le fonctionnement du REM est un succès.
La performance est très satisfaisante
, a-t-il déclaré, toujours lors de la conférence de presse de mercredi après-midi.
De fait, au cours des six semaines d'activité écoulées depuis la mise en service de ce tronçon, plus d'un million de passages ont été dénombrés, a affirmé M. Batani.
En date de mardi de la semaine dernière, d'ailleurs, un pic de 35 000 passages aurait été enregistré, alors que l'achalandage prévu oscillait autour de 20 000 personnes sur une base quotidienne. En moyenne, ce sont 30 000 passages qui sont recensés chaque jour.
Oui, a reconnu M. Batani, des incidents sont survenus, incidents qui ont entraîné des ralentissements, voire des interruptions de service. Y compris une panne majeure lors de la première journée officielle d'activité, à la fin juillet.
Toutefois, dans l'ensemble, la fiabilité du service atteint les 99 % avec près de 900 heures de service accumulées
, a-t-il souligné.
Nous sommes encore en période de rodage
, a déclaré M. Batani, ce qui implique des améliorations comme la question du bruit lors du déplacement des trains, les bris d'escaliers mécaniques et des ascenseurs ou encore les communications avec le public lors de pannes.
Des tests sur d'autres tronçons au printemps
Et la suite des choses? Selon M. Arbaud, le projet est complété à 85 %
.
Il reste la finition des différentes stations, la mise en place des équipements, des caméras... Il y a aussi du génie civil à finir
, a-t-il expliqué. D'importants travaux doivent aussi être réalisés dans le tunnel Mont-Royal, où les rails doivent être installés. Idem pour le tronçon vers l'aéroport, dont la mise en service est prévue pour 2027.
Malgré tout, le président et chef de la direction de CDPQ Infra se montre optimiste : selon lui, les tests de circulation des trains sur d'autres tronçons du réseau débuteront au printemps 2024
.