Le transport scolaire en Ontario coûte cher aux conseils scolaires francophones
Une nouvelle formule de financement de la province crée des déficits plus importants.

Le changement à la formule de financement des transports scolaires en Ontario coûte cher aux conseils scolaires francophones.
Photo : Radio-Canada / Evan Mitsui
Des conseils scolaires francophones de l’Ontario font pression auprès du gouvernement ontarien pour modifier une nouvelle formule de financement pour le transport scolaire qui leur coûte cher, alors que plusieurs d’entre eux commencent l’année scolaire avec un budget déficitaire.
L’Association franco-ontarienne des conseils scolaires catholiques (AFOCSC) n’est pas passée par quatre chemins pour exprimer son désaccord au ministre de l’Éducation Stephen Lecce par rapport à la nouvelle formule de financement en juin dernier, d’après une lettre dont Radio-Canada a obtenu copie.
La nouvelle formule est préjudiciable à la plupart de nos conseils scolaires catholiques de langue française
puisqu’elle ne tient pas compte des petits autobus ou des minifourgonnettes, lit-on dans la lettre signée par la présidente de l'AFOCSC, Johanne Lacombe, et son directeur général Yves Lévesque.
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Sans changement aux paramètres de financement, Yves Lévesque affirme que chacun des huit conseils catholiques francophones sera déficitaire pour l’année scolaire 2024-2025.
Le Conseil scolaire Viamonde a pour sa part présenté un budget déficitaire de 6,2 millions de dollars cette année; 65 % du déficit, ou 4,1 millions de dollars, est dû aux transports.
Les dépenses ont augmenté plus que le financement, donc le défi est plus important en transport scolaire
, a fait savoir la directrice des communications du Conseil scolaire du Grand Nord, Carole Dubé.
Le financement pour le transport a augmenté, mais comme les exigences liées au financement ont elles aussi augmenté, une majorité de conseils scolaires ne sont pas gagnants
, explique Isabelle Girard, directrice générale de l'Association des conseils scolaires des écoles publiques de l'Ontario (ACEPO).

Le directeur général de l'Association franco-ontarienne des conseils scolaires catholiques, Yves Lévesque, affirme que les huit conseils scolaires catholiques seront déficitaires l'an prochain sans changement à la formule de financement.
Photo : Gracieuseté de l'Association franco-ontarienne des conseils scolaires catholiques
Le ministère de l'Éducation a clairement indiqué qu’il n’y aurait "aucun impact négatif"
sur les conseils scolaires en raison de la nouvelle formule, relève l’AFOCSC dans sa missive. Le contraire semble s’être produit, cependant : plusieurs conseils scolaires francophones ont prévu des déficits plus importants pour l’année scolaire 2023-2024 que l’année dernière.
Ces manques à gagner ne sont pas sans conséquence pour les élèves. Les conseils déficitaires doivent présenter à la province un plan pour retrouver l’équilibre. Si nous n’arrivons pas à modifier la formule, nous devrons identifier des éléments où couper
, explique Geneviève Oger, présidente du Conseil scolaire Viamonde. Elle précise toutefois qu’aucun service aux élèves ne sera touché en 2023-2024.
Les conseils scolaires déficitaires doivent puiser dans leurs réserves pour être fonctionnels cette année, mais ils préféreraient ne pas y avoir recours. L’un d’entre eux compare la situation à puiser dans ses REER pour payer l’épicerie. Les réserves, souligne Yves Lévesque, directeur général de l’AFOCSC, sont là pour investir dans de nouvelles classes et d’autres projets d'immobilisation, par exemple, pas pour des dépenses opérationnelles.
Déficits interdits
Les conseils scolaires ontariens sont obligés de présenter des budgets équilibrés, à quelques exceptions près. Ils peuvent prévoir un déficit représentant moins de 1 % de leurs revenus, sans obtenir l’autorisation de la province. Si tel est le cas, ils doivent tout de même présenter un plan de redressement et ils ne peuvent être déficitaires trois ans de suite.
Les conseils scolaires qui, comme Viamonde, ont un déficit plus élevé que ce taux de 1 % doivent quant à eux demander la permission de la province pour se servir de leurs réserves pour équilibrer leur budget. Selon Steve Lapierre, porte-parole de Viamonde, une demande en ce sens a été envoyée en mai dernier, mais aucune approbation n’a encore été reçue.

Le Conseil scolaire Viamonde est particulièrement touché par la nouvelle formule de financement des transports. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / Pierre-Mathieu Tremblay
Le conseil notait dans son budget que la formule ne tient pas compte de l’utilisation de fourgonnettes, qui représentent environ 22 % des véhicules utilisés par son consortium de transport principal, Francobus.
95 % des élèves des conseils scolaires catholiques francophones se rendent à l’école en transport scolaire, selon Yves Lévesque. Plusieurs d’entre eux le font en fourgonnette, tout comme les élèves du Conseil scolaire Viamonde.
Notre conseil estime qu’une fourgonnette demeure le meilleur moyen de transport : le plus efficace et le plus économique pour plusieurs de nos routes
, affirme Geneviève Oger de Viamonde. Pour l’instant, la présidente affirme que le conseil essaie de travailler en bonne entente
avec le ministère de l’Éducation.
Depuis quatre ans, notre gouvernement a augmenté le financement en éducation aux niveaux les plus élevés de l’histoire de l’Ontario
, écrit Grace Lee, porte-parole du ministère de l’Éducation Stephen Lecce. La province note qu’elle a octroyé 22,1 millions de dollars à Viamonde pour le transport scolaire pour l’année scolaire 2023-2024.
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Plus de problèmes à l’horizon?
L’ACEPO est aussi impliquée dans les démarches auprès de la province, a confirmé Isabelle Girard. Ce n'est pas qu'on demande un traitement préférentiel, on demande juste une formule qui marche pour nous aussi. Si elle marche pour les anglophones, elle devrait aussi marcher pour les francophones
, dit-elle. C'est là qu'on va revendiquer, qu'on revendique et qu'on va continuer à revendiquer
, poursuit-elle.
Yves Lévesque souligne qu’il y a peu de place où absorber les déficits. Les salaires payés au personnel représentent la majorité des dépenses des conseils scolaires.
L’Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens affirme qu’il est trop tôt
pour commenter le déficit, mais qu’elle surveille la situation de près.
Certains conseils scolaires anglophones ont aussi des inquiétudes quant à la nouvelle formule de financement. Le conseil scolaire Lambton Kent, durant une réunion du conseil en mai 2023, a demandé à son président d'envoyer une lettre au ministre de l’Éducation décrivant l’impact négatif
de la nouvelle formule sur son budget. La lettre devrait spécifier que notre budget était équilibré et qu’il ne l’est plus
, indiquent les documents de la rencontre. Dans une lettre envoyée au ministre en juin 2023, le conseil scolaire de la région de Waterloo a aussi dénoncé l’impact de la nouvelle formule.