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Brutalité policière et mal-logement : le TIFF porte les luttes sociales au grand écran

Un immeuble de logements où des affiches qui demandent justice pour une victime de brutalité policière.

Dans cette scène du film, les résidents d'un quartier de banlieue réclament justice à la suite de la mort du jeune Karim aux mains de policiers qu'ils l'ont violemment frappé.

Photo : Gracieuseté du TIFF

Des cinéastes s'emparent du grand écran pour rappeler le manque de justice sociale. De Paris à Chicago, le Festival international du film de Toronto (TIFF) offre une vitrine à ces histoires où les personnages sont victimes de violences et de difficultés, comme la brutalité policière et le mal-logement.

Par leurs récits bouleversants, les réalisateurs Ladj Ly (Les Indésirables), Mehdi Fikri (Avant que les flammes ne s'éteignent) et Minhal Baig (We Grown Now) illustrent des luttes, des peines et des mouvements inspirés de faits vécus.

Le point commun : rendre hommage à ces communautés marginalisées et améliorer les choses en allumant une étincelle chez les politiciens et les cinéphiles.

Le logement, une crise universelle

Ces cinéastes y arrivent en abordant avec brio des sujets comme la crise du logement, la brutalité policière et l'esprit de communauté, entre autres, qui sont des questions toujours d'actualité.

Festival international du film de Toronto 2023

Consulter le dossier complet

Affiche officielle du Festival international du film de Toronto 2023.

Dans son film Les Indésirables, Ladj Ly peint le manque d'humanisme des institutions, et de ceux qui les maintiennent, au détriment des résidents du bâtiment 5, en banlieue de Paris, une communauté négligée par l'État et violemment expulsée.

Un bâtiment est détruit.

Les inégalités perpétuelles mises en lumière par Ladj Ly plongent le public dans l'angoisse, le dégoût et la frustration tout au long du film.

Photo : Gracieuseté du TIFF

Le réalisateur franco-malien décrit une histoire personnelle aux couloirs étroits, à l'ascenseur brisé depuis des années (comme c'est aussi le cas dans le film We Grown Now) et à la surveillance policière étouffante.

C'est ma mission de témoigner des conditions de vie des habitants de ce quartier. Je pense que c'est important de le faire parce qu'on est très peu écoutés, pour être très franc, explique le réalisateur.

Dès la scène d'ouverture, on voit un cercueil cogner dans tous les sens alors qu'il est descendu dans une cage d'escalier.

C'est alors qu'un des personnages s'exclame : Comment peut-on vivre et mourir dans ces conditions?

Un homme assis face à une femme.

Après son film « Les Misérables », le réalisateur franco-malien Ladj Ly est de retour au TIFF avec « Les Indésirables » (Bâtiment 5).

Photo : Radio-Canada / Alexis Raymon

Ce n'est pas la première fois que Ladj Ly dénonce de tels problèmes sociaux. Il l'a notamment fait lors de sa dernière visite à Toronto, en 2019, avec son film à succès Les Misérables.

Se faire déloger de chez soi est d'une violence inouïe. Du jour au lendemain, on vous dit que vous devez quitter votre appartement avec toutes vos affaires, tous vos biens. Pour l'avoir vécu, c'est quelque chose qui fait très mal [et] qui est traumatisant.

Une citation de Ladj Ly, réalisateur du film Les Indésirables

On se rend compte qu'à travers le monde, ce sont les mêmes problématiques : expropriation, gentrification, spéculation immobilière, constate Ladj Ly, qui a lancé son film en première mondiale à Toronto.

J'en profite pour parler des différents problèmes dans les quartiers, que ce soit les violences policières, le mal-logement ou la misère sociale en général. Ce sont des sujets qui me tiennent vraiment à cœur, soutient-il.

Une femme étreint son fils.

La réalisatrice Minhal Baig s'est inspirée de son rapport à la communauté pour raconter l'histoire des résidents de Cabrini-Green, à Chicago.

Photo : Gracieuseté du TIFF

Le film We Grown Now raconte, lui, l'histoire d'un groupe de résidents d'un quartier défavorisé aux États-Unis.

Le récit se déroule dans le complexe de logements sociaux de Cabrini-Green, à Chicago, en 1992.

Ces logements pour personnes à faibles revenus n'existent plus aujourd'hui.

À travers l'amitié entre deux jeunes garçons, Malik et Eric, la réalisatrice aborde la violence armée, la brutalité policière et l'appartenance à une communauté.

La migration des résidents du sud des États-Unis vers Chicago est la première violence, la fusillade mortelle qui a causé la mort d'un jeune garçon [dans l'histoire] en est une autre, précise Minhal Baig.

La réalisatrice, originaire de Chicago, a recueilli les témoignages d'anciens résidents des logements de Cabrini-Green, aujourd'hui démolis, pour rassembler leurs histoires et ensuite les raconter.

Une femme assise.

Minhal Baig a grandi à Chicago avant de déménager à Los Angeles. Après la mort de son père, elle décide de revenir dans sa communauté pour y tisser des liens.

Photo : Radio-Canada / Alexis Raymon

Dans le film, les résidents sont déshumanisés par des fouilles policières délibérées et agressives dans leurs logements.

À l'époque, comme on le voit dans le film, tous les habitants du quartier devaient donner leur identité et prouver qu'ils y résidaient.

L'accès à un logement adéquat est aussi un thème central du film We Grown Now.

Pas de justice, pas de paix

La violence policière est omniprésente dans ces trois films présentés au TIFF, mais elle n'est jamais au premier plan.

Le film Avant que les flammes ne s'éteignent raconte l'histoire d'une femme arabe [...] qui a 30 ans, qui a un mari, qui a un gosse et qui va devoir apprendre et avoir un parcours d'initiation politique pour saisir la mort de son petit frère, explique le réalisateur Mehdi Fikri.

Pour moi, ce n'est pas un film sur les violences policières, c'est un film sur la lutte contre les violences policières, croit-il.

Une femme pose des affiches pour réclamer justice.

L'histoire de Karim raconté par le réalisateur Mehdi Fikri dans son film veut rendre hommage à toutes les victimes de violences policières incluant le jeune Nahel, tué à 17 ans par un policier en France, cet été.

Photo : Gracieuseté du TIFF

Dans son tout premier long métrage, Mehdi Fikri, autrefois journaliste, décide de parler de la brutalité policière différemment en misant sur la lutte contre cette violence par la mobilisation d'une communauté de Strasbourg.

Mehdi Fikri commence le récit avec la mort de Karim, un jeune du quartier, aux mains de la police.

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Cette tragédie fictive rappelle la mort réelle du jeune Nahel, 17 ans en France cet été, alors que le film était déjà en postproduction.

Ça nous a bouleversés d'avoir la réalité qui nous revient dans la gueule. C'était terrible.

Une citation de Mehdi Fikri, réalisateur du film Avant que les flammes ne s'éteignent

Dans le film, il y a deux couches de violences : la mort de ce jeune homme et l'impunité, quand le pouvoir politique refuse de poursuivre des policiers qui sont responsables, estime-t-il.

La violence policière originelle est redoublée par la violence judiciaire et par le refus des autorités de prendre en compte la souffrance des familles, poursuit Mehdi Fikri.

La mobilisation citoyenne

Le devoir de mémoire, la prise de parole et la transmission du savoir sont au cœur du premier film de Mehdi Fikri.

La dimension de l'apprentissage m'intéressait beaucoup. Mes parents étaient militants politiques, raconte-t-il.

On dit que les quartiers populaires sont des déserts politiques. [Ils sont souvent vus] comme étant des endroits de désespérance, de misère, note Mehdi Fikri, qui est en désaccord avec cette idée stéréotypée des quartiers défavorisés.

Un homme vêtu d'un veston bleu.

« Avant que les flammes ne s'éteignent » est le premier long métrage du réalisateur franco-marocain Mehdi Fikri.

Photo : Radio-Canada / Spencer Gallichan-Lowe

Aujourd'hui, en France, tu as le malaise postcolonial, la gestion sécuritaire des quartiers, le refus absolu du gouvernement d'adopter un compromis social, un dialogue social en période de crise économique, pense-t-il.

L'éducation politique que j'ai reçue m'a aidé à me construire.

Une citation de Mehdi Fikri, réalisateur du film Avant que les flammes ne s'éteignent

Ces cinéastes veulent voir des changements concrets aux conditions de vie des personnes dont ils s'inspirent dans leurs productions cinématographiques.

Ce serait bien qu'il y ait un vrai engagement politique [dans les banlieues], en passant ces messages, en faisant nos films, conclut Ladj Ly, le créateur du film Les Indésirables.

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