La densification douce à venir à Vancouver provoque des remous

Le projet de la ville permettrait de densifier des zones qui sont pour l'instant principalement occupées par des résidences unifamiliales détachées.
Photo : Camille Vernet
Pour faire face à la crise du logement, le conseil municipal de Vancouver mise sur la stratégie du chaînon manquant, qui favoriserait la construction de multiplex dans des quartiers à basse densité, comme Point Grey ou Mount Pleasant.
Alors que la ville invite la population à se prononcer sur la proposition le 14 septembre, l’opinion publique semble déjà partagée sur le fait de permettre des bâtiments qui incluront jusqu'à six logements dans les secteurs dont le zonage est pour l'instant unifamilial, soit environ 50 % du territoire de la ville.
Dans les cartons depuis février, la stratégie du chaînon manquant permettrait de combler le vide entre les maisons résidentielles unifamiliales et les tours à condo en créant des duplex et des multiplex, entre autres, mais des Vancouvérois craignent que ce plan puisse entraîner la perte d’espaces verts.
C’est bien d’avoir des familles qui ont accès à des maisons résidentielles unifamiliales avec les enfants qui peuvent se promener d’une cour arrière à l’autre,
explique Kevin Shudy, un jeune père de famille de Joyce-Collingwood, qui reconnaît néanmoins que les zones plus habitées ont aussi des avantages.
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D’autres, comme Mark Finley, résident à Mount Pleasant depuis 2005, saluent l’initiative de la ville.
Je vis dans un condo, alors je ne m’attends pas à avoir une cour et beaucoup d’espace. J’utilise les parcs autour donc ce n’est pas un enjeu
, explique-t-il en installant un cadenas sur son vélo le long de la rue Main.
C’est mieux d’avoir plus de densification pour aider à soutenir les commerces et réduire la dépendance des résidents aux voitures
, précise-t-il, jetant un coup d'œil au flot incessant de voitures près de lui.
Ça peut menacer le charme d’un petit quartier comme celui-ci. Tu as des petits commerces familiaux et artisanaux, des places qui sont des institutions depuis belle lurette. Cela m’inquiète, mais tu ne peux arrêter le changement.
Enfin, d’autres voient les deux côtés de la médaille, comme Colm McEoin : Les gens se retrouvent à devoir louer vers des quartiers de plus en plus excentrés, donc plus d’habitations c’est mieux, même si je comprends que les gens ne veuillent pas voir des gratte-ciels sortir partout de terre.

Certaines familles recherchent les quartiers à plus faible densité pour offrir à leurs enfants plus d'espaces de jeux à l'extérieur.
Photo : Radio-Canada / François Gagnon
Pas de solution magique
Frances Bula, chroniqueuse municipale au Globe and Mail, reconnaît que cette stratégie peut susciter des craintes sur la perte d’un mode de vie : Il y aura des changements et cela va mettre des pressions sur la ville, mais s’il n’y a pas de pression ici, il y en aura ailleurs. Il n’y a pas de solution magique.
Sandy James, urbaniste et directrice de Walk Metro Vancouver, estime que la Ville pourrait établir un plan de match plus clair pour les nouveaux zonages, ce qui pourrait rassurer les résidents.

Le quartier West Point Grey est souvent cité en exemple par les experts comme secteur à faible densité, mais il n'est pas clair si les projets de la ville permettent de créer du logement dans cette zone.
Photo : Google Maps
Elle estime aussi que la majorité des constructions à six logements qui seront créées sera probablement entreprise par des investisseurs qui auront les moyens de se lancer dans une telle aventure : On a toujours été une ville pour les promoteurs immobiliers, c’est le cas depuis les années 1900.
L’approche préconisée par Vancouver a déjà été adoptée ailleurs au pays sur différentes échelles, notamment à Victoria et à Toronto, ainsi qu’aux États-Unis pour répondre aux mêmes problèmes. Frances Bula précise que la stratégie n’a pas encore eu le temps de faire ses preuves à plusieurs endroits et qu’il est difficile de mesurer l’effet précis d’une telle politique sur la disponibilité du logement.
Le rapport du personnel municipal qui inclut les recommandations finales sur le projet a été déposé en juillet dernier. La nouvelle politique devrait être mise en place en 2024.