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Quand le prix d’un logement nuit aux études

Le ministre fédéral du Logement dit plancher sur des solutions à la crise actuelle et n'exclut pas un plafonnement du nombre d'étudiants étrangers accueillis au Canada.

Chambre à louer à Trois-Rivières.

Avant la pandémie, trouver un logement abordable à Trois-Rivières était une formalité pour les étudiants universitaires. Mais depuis 2019, le taux d’inoccupation des appartements locatifs dégringole.

Photo : Radio-Canada / Raphaël Tremblay

Trouver un logement abordable est de plus en plus difficile pour des millions de Canadiens, dont de nombreux étudiants qui, forcés de déménager, peinent à se loger pour entamer leurs études postsecondaires.

D’ici 2028, le gouvernement fédéral a prévu consacrer plus de 82 milliards de dollars, entre autres, pour la construction de 160 000 unités, mais l'offre actuelle ne suffit pas à répondre à la demande croissante.

L’an dernier, Jérémy Mignot, originaire d'Upton, en Montérégie, n’a pas été capable de trouver un logement à temps pour sa rentrée à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR). Je faisais la route à partir de chez un ami, il habitait à environ 45 minutes de l’université, je ne pouvais pas rester là la fin de semaine, raconte-t-il.

Lorsqu’il a fini par trouver un appartement, deux mois après le début des classes, il a sauté sur la première occasion, même si elle ne répondait pas à ses critères et qu’elle lui coûtait 150 $ de plus par mois que son budget prévu.

Une pénurie qui s’accentue

Avant la pandémie, trouver un logement abordable à Trois-Rivières était une formalité pour les étudiants universitaires. Mais depuis 2019, le taux d’inoccupation des appartements locatifs dégringole. Il se situe à 0,9 % depuis l’automne dernier.

Un étudiant ou une étudiante arrive cette année en août, ça fait déjà 10 mois ou 8 mois qu’on lui dit : "Trouve-toi un appartement!" explique le recteur de l’UQTR, Christian Blanchette. Les quelque 1000 résidences étudiantes sur le campus ne suffisent pas à répondre à la demande.

Le reportage de Valérie-Micaela Bain

Cette pénurie cause bien des maux de tête à l’établissement universitaire, dont seulement 36 % des étudiants détiennent une adresse permanente dans un rayon d’une heure du campus. C’est sans compter que la proportion d’étudiants internationaux est en croissance : de 11 % l’an dernier, elle est passée à 14 % cette année. Ça met une pression, explique le recteur.

M. Blanchette a une crainte : devoir dissuader des étudiants admis de fréquenter son université, faute de logements disponibles, comme c’est le cas de l’Université du Québec à Rimouski.

Un OBNL qui priorise les étudiants

L’Unité de travail pour l’implantation de logement étudiant (UTILE) pourrait lui éviter ce scénario catastrophe.

Laurent Levesque prend la pose sur un chantier de construction.

Laurent Levesque, cofondateur et directeur général de l'UTILE, veut augmenter l'offre de logements étudiants à but non lucratif.

Photo : Radio-Canada / Raphaël Tremblay

Grâce à un prêt initial de 650 000 $ de l'Association générale des étudiant(e)s de l’UQTR, l’organisme à but non lucratif livrera 180 logements abordables à Trois-Rivières.

Le projet, dont le budget est de 29,3 millions de dollars, accueillera plus de 200 étudiants à la rentrée 2024.

Notre objectif, c’est de construire le plus de logements étudiants à but non lucratif le plus vite possible, pour accélérer une sortie de crise, explique Laurent Levesque, confondateur et directeur général de l’UTILE.

Sarah Leroux occupe l'un des 418 logements que l’UTILE a livrés depuis 2020 à Montréal et à Québec.

Le coût d'un appartement de deux chambres à coucher semi-meublé s’élève à 1275 $, y compris les services. L’étudiante en musique en partage le loyer avec une colocataire.

Sans cette abordabilité, ses prêts et bourses ne couvriraient pas ses dépenses. J’aurais commencé à regarder pour une job et j’aurais essayé d’en avoir une le plus vite possible aussi.

Logement abordable à Montréal.

Ce ne sont pas tous les étudiants qui ont la chance de trouver un logement abordable qui préserve leurs prêts et bourses.

Photo : Radio-Canada / Raphaël Tremblay

Elle constate qu’occuper un appartement abordable et de qualité est bon pour sa santé mentale et pour ses études. Ce privilège n’est toutefois pas donné à tous les étudiants.

Je parle à des amis, puis des histoires d’horreur, j’en ai entendu. J’ai des amis qui ont de la misère à payer leur loyer. Ça devient difficile et ils sont stressés.

Une citation de Sarah Leroux, étudiante en musique

Selon une étude de l’UTILE, on compte 1,5 million d’étudiants qui vivent en appartement au Canada, dont 64 % consacrent plus de 30 % de leur revenu annuel au paiement de leur loyer.

Soutien financier du gouvernement fédéral

Au total, les quatre projets de l’UTILE ont bénéficié de plus de 55 millions de dollars du gouvernement fédéral, par l’entremise de la Stratégie nationale sur le logement.

Cette stratégie annoncée en 2017 par le gouvernement de Justin Trudeau et bonifiée en 2023 vise à construire jusqu’à 160 000 logements d’ici 2028. À ce jour, 106 501 logements ont été construits.

Laurent Levesque juge que les règles de qualification pour du financement sont laborieuses.

Le grand défi après, c’est de faire entrer nos projets dans les boîtes, dans les paramètres; aucun des programmes existants, d’aucun ordre de gouvernement en ce moment, n’a été conçu pour le logement étudiant, déplore-t-il.

Un chantier de construction à Trois-Rivières.

Un chantier de construction de l'UTILE à Trois-Rivières

Photo : Radio-Canada / Valérie Micaela Bain

L’UTILE a bien l’intention de poursuivre sur sa lancée, malgré les embûches. L’organisme compte une dizaine de projets en développement au Québec, dont à Sherbrooke. Leur objectif : loger près de 3000 étudiants d’ici 2027.

L’université, c’est un ascenseur social, c’est un moyen de combattre les inégalités sociales, donc il faut, pour le faire, qu’il y ait un logement adéquat.

Une citation de Christian Blanchette, recteur de l'Université du Québec à Trois-Rivières

Faute de logements abordables, c’est l’accessibilité aux études qui pourrait être compromise.

Plus de logements... ou moins d'étudiants?

Le ministre fédéral du Logement, de l'Infrastructure et des Collectivités, Sean Fraser, affirme plancher sur des solutions.

En travaillant avec des partenaires pour abolir des règles qui posent problème, il est possible de créer de nouveaux logements, dit-il.

Sean Fraser marche devant des drapeaux du Canada dans une salle de presse.

Le ministre du Logement, de l'Infrastructure et des Collectivités, Sean Fraser, a tenu un point de presse en marge de la réunion du Cabinet de Justin Trudeau à Charlottetown, à l'Île-du-Prince-Édouard.

Photo : La Presse canadienne / Darren Calabrese

En marge de la réunion du Cabinet de Justin Trudeau à Charlottetown, à l’Île-du-Prince-Édouard, lundi, le ministre Fraser n’a pas exclu non plus la possibilité de plafonner le nombre d’étudiants étrangers pour alléger la pression sur le marché du logement.

Selon des données gouvernementales, le Canada a accueilli plus de 800 000 étudiants étrangers l’an dernier.

Je crois que nous devons avoir une sérieuse réflexion, a déclaré M. Fraser en précisant qu’il s’agissait d’une des options à envisager.

Si [les institutions d’enseignement postsecondaire] continuent de faire venir des étudiants en nombres records, elles devraient faire partie de la solution en s’assurant qu’ils ont un endroit où rester, a-t-il ajouté. Quand on voit que certaines de ces institutions accueillent cinq à six fois plus d’étudiants que la capacité de l’immeuble… on doit commencer à se poser de sérieuses questions.

Le ministre Fraser a toutefois lancé une mise en garde : il ne faudrait pas faire porter aux immigrants la responsabilité du manque de logements abordables. Intéressons-nous à la cause réelle des défis auxquels nous faisons face et reconnaissons que l’immigration peut être un outil pour attirer les travailleurs dont nous avons besoin pour construire plus d’habitations, a-t-il dit.

Avec la collaboration de Marie Chabot-Johnson et des informations de CBC

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