Québec et Mashteuiatsh en désaccord avec le blocage autochtone près de Girardville

Le blocage est en place depuis dimanche soir.
Photo : Radio-Canada / Steeven Tremblay
Le ministre provincial responsable des Relations avec les Premières Nations et les Inuits, Ian Lafrenière, et le chef du conseil de bande de Mashteuiatsh, Gilbert Dominique, critiquent la tenue du blocage d’un chemin forestier près de Girardville par deux aînées innues.
Le député demande notamment aux deux femmes de lever le blocage, qui est en cours depuis dimanche soir, et de négocier avec le gouvernement et le conseil de bande.
Ces kukums, des grands-mères innues, souhaitent la protection de leur territoire ancestral et le transfert de gouvernance des conseils de bande aux chefs héréditaires. Elles demandent également à avoir droit aux redevances des entreprises forestières qui coupent le bois sur leur territoire. Cet argent est actuellement remis au conseil de bande de Mashteuiatsh.
On peut être en désaccord, mais on ne peut pas chacun se lever debout en disant : "Moi, ce sont mes droits individuels et on va virer ça de bord", a dit le ministre Lafrenière en entrevue à l’émission C’est jamais pareil. Ça devient impossible à gérer. On va commencer par une relation de nation à nation avec un conseil de bande dûment élu et si les gens ne sont pas d’accord sur une base individuelle, on va refaire autre chose.
Le ministre admet toutefois que le gouvernement doit revoir sa manière de consulter les communautés autochtones et les familles. J'envoie un message à ces gens, a-t-il lancé. Je comprends très bien leur revendication parce qu'ils parlent de vérité dans tout ça. On doit revoir la manière qu'on consulte et on le sait. C'est juste que le chemin qui est utilisé, c'est-à-dire le blocage, ça cause des enjeux pour la région.
Le ministre affirme que ce genre de moyen nuit à l’industrie forestière. Il estime que ces blocages empêchent la récolte de bois brûlé des feux de forêt, une collecte généralement approuvée par les groupes autochtones à l’origine des blocages.
Ce qui était mentionné par les groupes, ceux-ci nous reprochaient de ne pas ramasser le bois brûlé : "Vous y allez juste avec du bois vert". Je vous confirme que c'est l'inverse. Le bois brûlé commence à être récolté parce que c'est important. On sait ce qu'on a vécu récemment. Les grands feux qui ont eu lieu dans votre région, il faut récolter ce bois-là pour ne pas le perdre.
Lundi, le Conseil de l’industrie forestière du Québec (CIFQ) a aussi fait part de ses inquiétudes quant aux conséquences de ces moyens de pression. Le président-directeur général craint notamment les impacts sur la collecte du bois brûlé par les feux de forêt.
Le gouvernement fédéral affirme pour sa part suivre la situation, mais que la foresterie relève de la province. Une porte-parole de Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada, Carolanne Gratton, a indiqué par courriel que Le Canada croit que la meilleure façon de résoudre les questions en suspens est d'avoir un dialogue respectueux et collaboratif.
Le chef de Mashteuiatsh lance un appel au ralliement
De son côté, le chef du conseil de bande de Mashteuiatsh se dit lui aussi en désaccord avec les moyens de pression utilisés par les groupes pour se faire entendre. Il craint les impacts sur d'autres membres de sa communauté.
Je ne suis pas d'accord avec le type de moyen utilisé à ce moment-ci qui, assurément, cause des dommages, notamment lors de l'accès à des emplois pour des membres de notre communauté, a expliqué Gilbert Dominique, également en entrevue à C’est jamais pareil. Depuis hier, on est envahis de plusieurs appels de gens de la communauté qui sont inquiets pour leur travail au cours des prochaines journées. Donc, on considère que ce n'est pas nécessairement le meilleur moyen utilisé pour se faire entendre.

Gilbert Dominique soutient que des membres de sa communauté sont inquiets quant aux conséquences des blocages.
Photo : Radio-Canada / Laurie Gobeil
Il déplore toutefois le manque de communication avec le gouvernement, qui donne les autorisations de coupe aux entrepreneurs forestiers. L’élu invite donc les kukums à se rallier aux représentants officiels de la communauté pour rectifier le tir avec le gouvernement.
On émet, bien entendu, pour les familles, des recommandations, des propositions d'accommodement et, la plupart du temps, ce n’est pas respecté par le gouvernement, a-t-il ajouté. Donc, le gouvernement donne des autorisations à des forestières pour aller récolter du bois ici sans justifier la décision à notre égard, et c’est là que ça pose problème.
Des discussions en cours
Diane Blacksmith et Denyse Xavier amorceront des discussions mardi soir concernant le maintient de leur moyen de pression. Les deux femmes tiennent le blocage entre Saint-Thomas-Didyme et Girardville depuis dimanche.
Elles se sont déplacées à quelques reprises pour bloquer le chemin aux travailleurs forestiers. Vers 6 h, mardi matin, le groupe se situait au kilomètre 59 du chemin de la Domtar.
Il s’agit du troisième blocage autochtone qui prend place cet été. Les deux autres ont été tenus par le collectif Mashk Assi, dont les deux aînées se dissocient.
Selon des entrevues de Jean-François Coulombe