Un chemin de croix persistant pour les personnes trans et non binaires du Québec
Québec solidaire déplore que certains organismes étatiques, notamment la SAAQ et la RAMQ, ne permettent pas encore la mention « X » comme marqueur de sexe sur les documents officiels.

De plus en plus de formulaires gouvernementaux permettent aux gens de s'identifier comme non-binaires.
Photo : iStock
Plus d'un an après l'adoption de la loi qui permet aux personnes trans et non binaires de modifier leur marqueur de sexe pour la mention « X » auprès de l'état civil, des ministères et organismes du gouvernement du Québec ne sont pas encore en mesure d'emboîter le pas. Une situation déplorée par Québec solidaire.
C'est le notamment le cas pour la Régie de l'assurance maladie du Québec (RAMQ) et pour la Société de l'assurance automobile du Québec (SAAQ).
La députée de Québec solidaire (QS) Manon Massé a soulevé la question auprès de la ministre responsable de la Condition féminine, Martine Biron, dans une lettre envoyée le vendredi 4 août.
En marge des événements de la Fierté, il est inquiétant de constater que l'engagement du gouvernement de reconnaître un marqueur de genre non binaire n'est pas encore rempli
, écrit la députée de la circonscription montréalaise de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Malgré tous mes échanges avec vous et vos collègues, la mise en œuvre de la loi piétine encore et toujours.

Manon Massé, députée de Sainte-Marie–Saint-Jacques, lors d'une entrevue sur les ondes d'ICI Première. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / Marie-Eve Cloutier
Le 17 juin 2022, l'Assemblée nationale du Québec a adopté le projet de loi 2 (Loi portant sur la réforme du droit de la famille en matière de filiation et modifiant le Code civil en matière de droits de la personnalité et d’état civil) à l'unanimité. Cette loi reconnaît entre autres la mention « X » non binaire comme identification de sexe sur les documents officiels de l'État québécois.
C'est une avancée importante pour les personnes trans et non binaires, qui n'auront plus à vivre des situations de mégenrage et de coming-out forcé lorsqu’elles interagissent avec les services publics.
Or, la formation solidaire dénonce le fait que des organismes gouvernementaux – la RAMQ et la SAAQ, notamment – ne se soient pas conformés à la loi, selon elle.
Dans les faits, la loi concerne uniquement les actes de l’état civil, précise le cabinet de la ministre Biron. Une personne trans ou non binaire qui veut faire changer son marqueur de sexe doit faire sa demande auprès de l'état civil, avec tous les documents nécessaires. Une fois que l'état civil approuve la demande, les changements se font sur le certificat de naissance ou sur l'acte de mariage, par exemple.
Ensuite, il revient à la personne de contacter chaque ministère et chaque organisme pour faire officialiser le changement dans ses autres documents officiels. Et c'est là que le bât blesse, selon Manon Massé.

La RAMQ et la SAAQ se défendent
La RAMQ et la SAAQ se rangent derrière Québec et se défendent en affirmant que la loi s'applique au directeur de l'état civil, et pas à l’ensemble des ministères et organismes provinciaux.
Par contre, ils reconnaissent qu'ils ne sont pas encore en mesure de changer le marqueur de sexe sur les documents officiels, comme le permis de conduire et la carte d'assurance maladie, mais qu'un plan pour parvenir à cette fin est sur la planche à dessin, en collaboration avec d'autres organismes et ministères québécois.
Du côté de la SAAQ, le travail est entamé pour implanter les changements informatiques requis pour permettre la mention "X" sur les permis de conduire d’ici la fin de l’année 2023
, précise par courriel Gino Desrosiers, coordonnateur des relations avec les médias. Les communications avec les clients seront également ajustées, ajoute-t-il.
À la RAMQ, le retrait du marqueur de sexe sur la carte d’assurance maladie ou l’ajout du "X" ne peut relever d’une décision unilatérale de la RAMQ, considérant qu’il soutient l’accès aux soins et aux services cliniques offerts dans le réseau de la santé et des services sociaux
, explique pour sa part la porte-parole de l'organisme, Caroline Dupont.
Une solution dans les cartons

La ministre québécoise des Relations internationales et de la Francophonie et ministre responsable de la Condition féminine, Martine Biron, en point de presse le 21 juin 2023. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / Sylvain Roy Roussel
Tous deux participent aux travaux d'un comité interministériel sur les marqueurs de genre/sexe, où siègent une vingtaine de ministères et organismes, dont l'objectif est de mettre de l'avant des actions gouvernementales concertées, en tenant compte des considérations propres à chacun des organismes concernés.
Les changements à la RAMQ s’orchestreront, le cas échéant, en étroite collaboration avec les autres ministères et organismes publics et privés
, indique la porte-parole de la RAMQ.
Des orientations sont attendues pour l'automne afin de dire aux ministères et organismes comment recueillir l'information pertinente pour changer le marqueur de sexe, comment traiter l'information, comment l'afficher sur les documents, comment parler à la clientèle, etc.
Une solution temporaire aurait pu être mise en place rapidement. Ça n'a pas été fait. J'espère que [le] gouvernement va rattraper son retard dès ce mois-ci en présentant une solution permanente.
Ce comité interministériel relève du Bureau de lutte contre l'homophobie et la transphobie du Secrétariat à la condition féminine.
Enfin, le cabinet de la ministre Biron confirme avoir reçu la lettre de Mme Massé et note vouloir prendre le temps de la lire et faire les suivis nécessaires
.
En marge des événements de la Fierté qui se poursuivent toute la semaine, Manon Massé espère recevoir de bonnes nouvelles de la part de Martine Biron.
Avec les informations de Alexandre Duval