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Que fera Toronto de ses 450 000 tonnes de déchets annuels?

Une ville du Nord de l'Ontario dit à Radio-Canada qu'elle pourrait être intéressée par les ordures de Toronto.

Un éboueur vide le contenu d'une poubelle dans un camion d'ordures.

Toronto gère 450 000 tonnes de déchets chaque année.

Photo : Radio-Canada / Michel Bolduc

Acheter un autre dépotoir, mais où? Incinérer? Toronto a lancé un processus d'évaluation des différentes options possibles pour ses ordures, alors que le dépotoir acquis par la Ville en 2007 dans le Sud-Ouest de la province se remplit rapidement.

La métropole canadienne gère actuellement 450 000 tonnes de déchets annuellement.

À ce rythme-là, le dépotoir Green Lane, où Toronto envoie ses ordures, sera plein d'ici 2034-2035, selon la Ville, qui ajoute qu'il n'y a pas de place pour un dépotoir à Toronto.

Il est essentiel que la Ville continue à planifier pour l'avenir [...], étant donné que la construction de nouvelles infrastructures de gestion des déchets peut prendre plus de 10 ans, souligne Toronto dans un communiqué publié en juin, lorsque les élus ont lancé le processus d'évaluation.

Tout en insistant sur l'importance du recyclage, la Ville dit qu'il est nécessaire de penser à une solution de remplacement au dépotoir Green Lane.

Taux de recyclage et compostage à Toronto (2022)

Type de résidenceTaux de recyclage et compostage
Résidences63,7 %
Immeubles/condominiums25,1 %
Moyenne52,5 %

Source : Ville de Toronto

Les options sur la table :

  • Conclure une entente avec un dépotoir existant ailleurs en Ontario pour prolonger la durée de vie de celui de Green Lane.
  • Faire un appel d'offres pour voir si d'autres villes sont prêtes à ouvrir un dépotoir afin d'accueillir les ordures de Toronto.
  • Envoyer des déchets dans l'un des incinérateurs existants dans la province ou acheter ces installations.
  • Construire un incinérateur à Toronto.
Enseigne à l'extérieur du dépotoir.

Au rythme actuel, le dépotoir Green Lane, à St. Thomas sera plein d'ici 2034-2035, indique Toronto. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Colin Butler

Dianne Saxe, conseillère municipale à Toronto et ex-commissaire provinciale à l'environnement, dit que la priorité de la Ville Reine devrait être d'accroître son taux de recyclage et de compostage et, en deuxième lieu, de trouver un autre dépotoir.

Si ce n'est pas possible, elle ne ferme pas la porte à l'incinération.

Il faut que la technologie [d'incinération] qui est contemplée soit parmi les meilleures du monde et que ça ne va pas créer de la pollution de l'air, qui n'est pas acceptable.

Une citation de Dianne Saxe, conseillère municipale

Selon elle, la technologie s'est améliorée au cours des 30 dernières années, citant l'exemple d'incinérateurs moins polluants en Europe. Ça coûte plus cher, mais ça vaut le coup, soutient-elle.

Dianne Saxe sourit à côté d'un arbre.

La conseillère municipale Dianne Saxe ne ferme pas la porte à l'incinération. (Photo d'archives)

Photo : Commissaire à l'Environnement de l'Ontario

Le bureau de la nouvelle mairesse Olivia Chow n'a pas répondu à nos questions.

Dur, dur de trouver un autre dépotoir

Selon la conseillère Saxe, il ne sera pas facile pour Toronto de trouver un autre site d'enfouissement. Elle accuse le gouvernement de Doug Ford d'avoir créé des obstacles à ce chapitre.

Elle souligne que la province a resserré les règles entourant les nouveaux dépotoirs en 2020. Les municipalités ont maintenant le pouvoir de s'opposer à tout projet situé à 3,5 km ou moins de leurs frontières.

Gary Wheeler, porte-parole du ministère ontarien de l'Environnement, rétorque qu'il s'agit d'une approche équilibrée pour s'assurer d'avoir un appui local pour un nouveau dépotoir, avant la soumission d'une demande d'approbation auprès du Ministère.

Kirkland Lake à la rescousse?

Près de 20 ans après la saga de la mine Adams à Kirkland Lake, où Toronto avait envisagé d'envoyer ses déchets, la municipalité du Nord de l'Ontario est ouverte aux offres pour son dépotoir, affirme à Radio-Canada le directeur municipal Alan Smith.

Pour lui, il pourrait s'agir d'une source de revenus et d'emplois pour la petite municipalité.

Il ajoute toutefois que le dépotoir municipal devrait être agrandi et qu'il devrait y avoir des consultations et des évaluations environnementales, compte tenu de l'envergure considérable d'un tel projet, ce qui pourrait prendre plusieurs années.

L'incinération, une solution verte?

Les partisans de l'incinération soutiennent qu'il s'agit d'une option durable, parce qu'elle permet de se débarrasser des déchets sans les enfouir, tout en produisant de l'électricité.

L'incinérateur de Clarington, par exemple, produit suffisamment d'électricité pour 10 000 demeures, ce qui aide à conserver les combustibles fossiles, fait valoir la région de Durham, qui ajoute qu'elle a un programme robuste de recyclage et de compostage.

Karen Wirsig, du groupe Environmental Defence, affirme au contraire qu'il faut absolument éviter l'incinération. Elle affirme que cette méthode produit des gaz empoisonnés pour les résidents habitant à proximité, sans parler des cendres toxiques qui doivent être enfouies dans des dépotoirs spécialisés.

Brûler les déchets, c'est complètement contraire aux intérêts environnementaux et à la santé humaine.

Une citation de Karen Wirsig, responsable du programme des plastiques, Environmental Defence
Karen Wirsig en entrevue.

Karen Wirsig du groupe Environmental Defence s'oppose de façon véhémente à l'incinération. Pour elle, l'enfouissement est moins dommageable pour l'environnement. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada

Emily Alfred, de l'Alliance environnementale de Toronto, est du même avis. Elle soutient que ce qui génère le plus d'électricité grâce à l'incinération, c'est de brûler des plastiques, qui devraient plutôt être recyclés, dit-elle. Ce n'est pas de l'énergie renouvelable, lance-t-elle.

Pour l'environnementaliste, Toronto devrait en priorité accroître de façon marquée son taux de recyclage et de compostage, faisant valoir que 70 % des matières résiduelles actuelles pourraient être recyclées ou réutilisées, plutôt que d'être envoyées au dépotoir.

Recycler plus

Sous l'ancien maire David Miller (de 2003 à 2010), Toronto s'était fixé comme objectif de recycler 70 % de ses déchets à l'horizon 2010, une cible que la Ville Reine n'a toujours pas atteinte. Le taux était de 52,5 % l'an dernier, selon les données municipales.

En guise de comparaison, le taux moyen de recyclage et de compostage dans l'agglomération de Montréal était de 63 % en 2021. Toronto compte toutefois un très grand nombre de tours d'habitation où le taux de recyclage est beaucoup plus faible que pour les maisons.

Myra Hird, professeure en études environnementales à l'Université Queen's, à Kingston, pense que Toronto et le Canada pourraient en faire beaucoup plus pour réduire la quantité de déchets que leurs résidents produisent. Cela aiderait aussi la Ville Reine à prolonger la durée de vie de son dépotoir, note-t-elle.

Le Canada tire véritablement de l'arrière en matière de politiques pour réduire les emballages.

Une citation de Myra Hird, professeure à l'Université Queen's

Or, les emballages représentent 70 % des déchets produits par les villes au pays actuellement, dit-elle.

Myra Hird en entrevue sur Zoom.

Toronto devrait en priorité recycler beaucoup plus, afin de prolonger la durée de vie de son dépotoir, selon la professeure Myra Hird.

Photo : Radio-Canada

La professeure cite l'exemple de l'Europe, qui a adopté une combinaison d'incitatifs et de pénalités pour forcer les manufacturiers à réduire leurs emballages et à employer des matières plus vertes.

Les villes doivent aussi mettre sur pied, selon elle, des programmes de compostage beaucoup plus gros, pour éviter que ces matières organiques occupent de l'espace dans les sites d'enfouissement, en plus d'y produire du méthane en pourrissant.

Elle ajoute que Toronto et les autres municipalités devraient soutenir des programmes de réutilisation et de partage entre résidents comme cela se fait ailleurs dans le monde. Pourquoi chaque résident devrait-il s'acheter une tondeuse, demande-t-elle, alors que plusieurs résidents d'un même quartier pourraient en partager une?

Pour elle, l'incinération n'est pas une panacée. Elle cite l'exemple de la Suède, où les incinérateurs continuent à produire des cendres toxiques malgré l'utilisation de nouvelles technologies. C'est sans parler, dit-elle, de la nécessité de nourrir la bête, les incinérateurs devant toujours être en train de brûler des matières pour maintenir une température minimale, ce qui peut freiner le recyclage.

Consultations à venir

Toronto doit lancer l'an prochain un appel d'intérêt pour un nouveau dépotoir et des consultations au sujet de l'incinération. La Ville n'a pas de date précise pour l'instant.

Radio-Canada a contacté plusieurs exploitants de dépotoirs en Ontario. La compagnie Waste Management indique que les capacités annuelles de nos sites sont utilisées à l’heure actuelle. La firme Walker répond, pour sa part, qu'elle ne peut pas faire de commentaire sur toute conversation officieuse avec la Ville de Toronto.

La compagnie Emerald, qui exploite l'incinérateur de Brampton, précise qu'elle ne pourrait pas brûler plus de 25 000 à 50 000 tonnes par année des déchets de Toronto avec ses installations actuelles, mais l'entreprise envisage une expansion de sa capacité.

Pour sa part, l'incinérateur des régions de York et de Durham, à Clarington, peut seulement brûler les ordures des résidents des deux régions, en vertu des conditions d'exploitation provinciales.

La conseillère municipale de Toronto Dianne Saxe affirme qu'il est peut-être temps d'abandonner les sacs de poubelle noirs en faveur de sacs transparents. Pour qu'on puisse s'assurer qu'ils ne contiennent pas de nourriture [compostable], explique-t-elle.

Elle souhaiterait également que l'Ontario établisse un système de consigne pour les bouteilles et les canettes, afin d'accroître le taux de recyclage.

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