•  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  

L’art périlleux de la décolonisation : le MBAC, un cas d’école

Un grand corridor lumineux à l'intérieur du Musée des beaux-arts du Canada.

Après deux ans de tempête, la nomination du nouveau directeur général du MBAC, Jean-François Bélisle, rassure le milieu artistique.

Photo : Radio-Canada / Aïda Semlali

La nomination mercredi de Jean-François Bélisle, nouveau directeur général du Musée des beaux-arts du Canada (MBAC), survient après deux ans de tempête. En toile de fond, un chantier demeure périlleux : la décolonisation des collections et des équipes.

En 2020, le MBAC annonçait son intention de mieux représenter la diversité au pays. Mais la tentative de concrétiser ce souhait s’est révélée ardue. Au cœur de la discorde : le plan stratégique 2021-2026 du MBAC, un document qui dresse pour les années à venir les priorités de l'établissement sous la bannière Transformer ensemble.

Avec un titre volontairement rassembleur, comment un document ponctuant ses intentions des mots diversité et inclusion a-t-il fini par diviser autant?

Le professeur titulaire de muséologie à l'Université du Québec à Montréal (UQAM) et titulaire de la Chaire de recherche sur la gouvernance des musées et le droit de la culture, Yves Bergeron, rappelle que la décolonisation est originellement une tendance internationale entamée avec le mouvement de la nouvelle muséologie il y a plus de 50 ans.

Tout ça a débuté à Santiago au Chili en 1972, où un grand rassemblement de l'UNESCO et des représentants des musées se sont entendus sur le principe que les musées ne devraient pas être seulement centrés sur le patrimoine et les collections, mais que la première grande responsabilité des musées, c'était la fonction sociale.

Une citation de Yves Bergeron, professeur titulaire de muséologie à l'UQAM et titulaire de la Chaire de recherche sur la gouvernance des musées et le droit de la culture.

Cinq décennies plus tard, le mouvement de décolonisation bouscule ce qu'on pourrait appeler le régime de valeur dans le monde des musées, constate M. Bergeron, avec des répercussions dans toutes les fonctions.

Jean-François Bélisle, l’homme providentiel?

Dans sa volonté de s'inscrire dans ce mouvement, le MBAC a connu sa part de ratés au moment de concrétiser son plan stratégique, du départ à mi-mandat de l’ex-directrice générale Sasha Suda en 2020, jusqu’aux licenciements d’employés à des postes clés en novembre dernier durant l'intérim d’Angela Cassie.

Angela Cassie, vêtue d'un veston texturé, regarde l'objectif en souriant.

DG par intérim sortante du MBAC, Angela Cassie a contribué au plan stratégique intitulé «Transformer ensemble». (Photo d'archives)

Photo : Avec la gracieuseté du MBAC

Tous ces bouleversements ont soulevé l’inquiétude du milieu muséal, incluant les groupes de mécènes et de collectionneurs, en plus de l’indignation d’anciens employés. La présidente du conseil d’administration du MBAC, Françoise Lyon, avait d’ailleurs concédé qu’on aurait dû ralentir un peu [pour] s’assurer que tout le monde embarque sur le voyage avec nous, en marge de l’assemblée publique annuelle du 5 avril dernier.

C’est dans ce contexte que Jean-François Bélisle prend la barre du Musée.

C’est une institution tellement importante pour notre milieu, pour notre pays, que ce n’est pas une situation présente ou temporaire qui m’influence, ni positivement ni négativement.

Une citation de Jean-François Bélisle, nouveau directeur général du MBAC

Sa nomination rassure le milieu. On lui reconnaît des compétences solides, lui qui vient du contexte muséal et qui a de l'expérience dans l’art contemporain, relève l’ancien conservateur en chef du département d'art canadien au MBAC, Charles Hill.

Jean-François Bélisle, souriant, qui pose pour la caméra.

Jean-François Bélisle, nouveau directeur général du MBAC.

Photo : Claudia Morin-Arbour

Directeur général et conservateur en chef du Musée d’art de Joliette depuis sept ans, Jean-François Bélisle est aussi quelqu'un qui écoute quand on lui parle, soutient de son côté l’ancien directeur général du MBAC, Marc Mayer.

Je pense que c'est quelqu'un qui exerce un leadership positif, souligne pour sa part Yves Bergeron. C’est quelqu’un qui est assez sensible à tous ces enjeux [de décolonisation].

Pendant son mandat à Joliette, Jean-François Bélisle a mis en lumière des artistes autochtones, et Jennifer Brazeau, qui est Anichinabée, membre de la communauté de Kitigan Zibi et directrice générale du Centre d’amitié autochtone de Lanaudière, a joint le C. A. du Musée.

Le Musée d'Art de Joliette.

Derrière les vitres du Musée d’art de Joliette, la murale de l’artiste atikamekw Eruoma Awashish représente Joyce Echaquan et sa famille. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Anne-Marie Yvon

Pour M. Bergeron, ces qualités représentent des atouts essentiels pour faire consensus afin de relever les défis qui s’annoncent et de redéfinir les objectifs à la lumière des orientations développées dans ce plan stratégique.

Et aux personnes qui pourraient s’étonner du choix d’un homme non issu de la diversité pour occuper le poste, Françoise Lyon répond que les compétences et la vision de Jean-François Bélisle priment la symbolique du privilège blanc.

Le nouveau directeur général du MBAC reconnaît pour sa part qu’être un homme blanc [a] des faiblesses et des forces. Dans sa volonté de construire des ponts, il mise sur un travail collaboratif.

C’est ce que je veux faire avec l'ensemble de l’équipe, mais aussi les parties prenantes, les artistes, les partenaires externes, les alliés politiques… À tous les niveaux, ce travail-là doit être fait en continu, assure M. Bélisle.

Ce dernier pourra justement compter sur l’appui du groupe philanthropique Mécènes distingués. Dans une réponse écrite à Radio-Canada, son fondateur, Thomas d’Aquino, considère que M. Bélisle a toutes les qualités requises pour le poste et qu’il comprend que le MBAC doit servir les intérêts de TOUS les Canadiens, conformément à la Loi sur les musées.

Son succès est essentiel à l'avenir de la principale institution d'arts visuels du Canada et à la position du Musée dans la communauté artistique mondiale, conclut M. d’Aquino, qui est aussi le président de la Fondation du MBAC.

Vous souhaitez signaler une erreur?Écrivez-nous (Nouvelle fenêtre)

Vous voulez signaler un événement dont vous êtes témoin?Écrivez-nous en toute confidentialité (Nouvelle fenêtre)

Vous aimeriez en savoir plus sur le travail de journaliste?Consultez nos normes et pratiques journalistiques (Nouvelle fenêtre)

En cours de chargement...

Infolettre ICI Ottawa-Gatineau

Une fois par jour, recevez l’essentiel de l’actualité régionale.

Formulaire pour s’abonner à l’infolettre d’ICI Ottawa-Gatineau.