Trop vieux pour être Ken? Ryan Gosling face au mouvement #NotMyKen

Ryan Gosling est la cible d'internautes qui le trouvent trop vieux pour jouer le personnage de Ken.
Photo : Getty Images / Alberto E. Rodriguez
Il serait trop vieux, trop ridé, bref pas assez plastique pour se glisser dans la peau de la poupée faite du même matériau. À 42 ans, Ryan Gosling balaie du revers de la main les critiques, souvent âgistes, qui ont accompagné sa sélection pour le rôle de Ken dans le film Barbie de Greta Gerwig.
Ryan Gosling est trop laid et trop vieux pour jouer Ken
, peut-on lire dans un gazouillis (Nouvelle fenêtre). Sur Twitter, plus de 17 000 tweets affichent le mot-clic #NotMyKen (#PasMonKen en français).
J’ai accidentellement fait une capture d’écran de la bande-annonce et Ken a l’air de grand-papa Ken
, a écrit une utilisatrice de TikTok (Nouvelle fenêtre). Sur ce réseau social, les vidéos en rapport avec Ryan Gosling et Ken cumulent 34 millions de vues.
Ce genre de commentaire pullule sur les réseaux sociaux depuis le dévoilement d’un premier extrait du film Barbie, de la réalisatrice Greta Gerwig, en décembre 2022. La diffusion de la bande-annonce la semaine dernière n’a fait qu’intensifier un débat qui fait rage en ligne (Nouvelle fenêtre) : la réalisatrice a-t-elle fait le bon choix en retenant les services de l’acteur canadien Ryan Gosling pour incarner Ken?
Un des points principaux de la discorde concerne l’âge du comédien, 42 ans. Plusieurs internautes ont affirmé qu’il était trop vieux, voire ancien
, pour enfiler les patins à roulettes de Ken.
Ça m’a fait sentir vieille!
, dit en riant Stéfany Boisvert, professeure à l’École des médias de l’UQAM.
Selon celle qui est codirectrice du Laboratoire sur la culture de grande consommation et la culture médiatique au Québec, cette controverse montre bien les préjugés âgistes auxquels doivent faire face les vedettes, surtout à Hollywood, où l’image est survalorisée et exploitée dans les contenus promotionnels.
Mais au-delà des commentaires désobligeants sur le manque d’hydratation du visage de Ryan Gosling ou de ses rides trop apparentes, le mouvement #NotMyKen est symptomatique d’une tendance observée depuis quelques années : le phénomène des anti-fans.
Ce qu’on constate, c’est que presque toutes les productions médiatiques populaires mènent à la création d’un mouvement d’opposition sur les réseaux sociaux. Dans le cas de Ryan Gosling, ça reste somme toute assez modéré, mais ça peut aller très loin et ce sont surtout les femmes et les personnes racisées qui en sont victimes
, souligne Stéfany Boisvert.

La chanteuse Halle Bailey incarne La petite sirène dans la nouvelle adaptation de Disney.
Photo : YouTube/Disney
Récemment, le dévoilement de la bande-annonce du film La petite sirène avait entraîné plus de 2 millions de réactions négatives sur YouTube, en plus d’un déferlement de commentaires racistes envers l’actrice Halle Bailey. (Nouvelle fenêtre) La série Les anneaux de pouvoir, une adaptation d’une partie de l'œuvre de J.R.R. Tolkien par Amazon Prime, s’était aussi attiré les foudres d’une frange d’internautes (Nouvelle fenêtre) après avoir embauché des interprètes à la peau noire ou asiatiques.
Une autre grande marque, Star Wars, n’a pas non plus été épargnée : l’acteur John Boyega a révélé lors d’une entrevue donnée au magazine GQ en 2020 avoir reçu des menaces de mort à caractère raciste (Nouvelle fenêtre) après avoir été choisi pour le rôle de Finn dans la nouvelle trilogie lancée en 2015.

Ryan Gosling dans le rôle de Ken, dans le film Barbie, de Greta Gerwig
Photo : Capture d'écran YouTube, Warner Brothers
Une controverse payante
La controverse entourant Ryan Gosling n'a pas pris de proportions aussi inquiétantes, bien qu'elle puisse créer un pincement au cœur à toute personne âgée de plus de 40 ans. Étonnamment, ce genre d'événement peut avoir des effets bénéfiques pour la production.
Ça nourrit la visibilité du film. Il y a récemment eu une campagne promotionnelle qui a fait grand bruit, mais le film ne sort qu’en juillet. Ce genre de controverse peut être utilisée par les studios pour garder le film dans la mémoire des gens
, explique Stéfany Boisvert.
Ryan Gosling a d’ailleurs profité d’une entrevue, parue dans le magazine GQ le 31 mai (Nouvelle fenêtre), pour revenir sur les critiques à son endroit.
C’est drôle, cette espèce d’outrage de #NotMyKen. Genre, avez-vous déjà pensé à Ken avant ça?
, a-t-il dit.
Selon lui, la poupée masculine asexuée ne possédait pas beaucoup de substance avant que la réalisatrice Greta Gerwig, qui a écrit le scénario du film avec son mari, Noah Baumbach, ne s’y intéresse.
L’intérêt soudain des cinéphiles pour le personnage de Ken sonne donc faux, à son avis.
Soudainement, les gens disent : "On se souciait de Ken pendant tout ce temps." Non. Ce n’est pas vrai. Ça ne vous a jamais dérangé. Barbie ne s’est jamais souciée de Ken. Si vous aviez eu de l'intérêt pour Ken, vous sauriez que personne ne s’est jamais intéressé à Ken. Votre hypocrisie est évidente.
Sur ce point, il a raison! La production s’est même servie de ce message pour sa campagne publicitaire
, ajoute Stéfany Boisvert.

L'affiche du film Barbie, de Greta Gerwig.
Photo : Warner Brothers
Le comédien dit être totalement investi dans son personnage, voire qu’il est né pour jouer ce rôle.
Jusqu’à présent, je ne connaissais Ken qu’à distance. Je ne connaissais pas mon Ken intérieur. Je doutais de ma "Ken-ergie". Je ne la voyais pas. Mais Margot Robbie et Greta Gerwig l’ont conjuré en moi
, a-t-il ajouté lors du CinemaCon de Las Vegas le 25 avril. (Nouvelle fenêtre)
Négligé, éternel second, arrière-pensée : qu’on le veuille ou non, Ken recevra enfin l’attention qu’il n’a jamais eue grâce à l’interprétation de Ryan Gosling. Eva Mendes, sa compagne, prédit même qu'on assistera peut-être cet été à la « Ken-aissance (Nouvelle fenêtre) » qu’on n’espérait plus.
Et comme l’a dit Ryan Gosling : si on n’aime pas sa version de Ken, il y aura toujours d’autres poupées avec lesquelles jouer.