Ukraine : le refroidissement des réacteurs nucléaires devrait « pouvoir se poursuivre »

Une vue générale de la centrale nucléaire de Zaporijia, en septembre 2022.
Photo : Getty Images / AFP / STRINGER
Plus tôt jeudi, l'opérateur du barrage avait annoncé que le niveau du réservoir d'eau alimenté par le barrage de Kakhovka, dans le sud de l'Ukraine, ne permettait plus d'assurer le refroidissement des réacteurs de la centrale nucléaire de Zaporijia. L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a assuré le contraire, en soirée.
La centrale nucléaire de Zaporijjia, dans le sud de l'Ukraine, continue à pomper de l'eau du barrage de Kakhovka pour refroidir le combustible et éviter un accident, a déclaré jeudi l'AIEA.
Une annonce rassurante après que le grand patron d’Ukrhydroenergo, Igor Syrota, a déclaré plus tôt que le niveau du réservoir d’eau qui sert à refroidir les réacteurs était passé sous le seuil critique des 12,7 mètres. Il s'agissait, selon lui, d'une conséquence directe de la destruction du barrage de Kakhovka, mardi, sur le fleuve Dniepr.
Après examen, il s'est avéré que les opérations de pompage devraient pouvoir se poursuivre même si le niveau descendait au-dessous du seuil actuel de 12,7 mètres
, précédemment jugé critique, a expliqué l'instance onusienne dans un communiqué, qui fixe désormais la limite à 11 mètres, voire plus bas
.
Dans ces circonstances difficiles, cela nous laisse un peu plus de temps avant d'éventuellement passer à d'autres sources d'approvisionnement
, a souligné le chef de l'AIEA Rafael Grossi, attendu sur les lieux la semaine prochaine.
Quand le barrage ne pourra plus être utilisé, la centrale pourra avoir recours à un grand bassin de rétention situé à proximité ainsi qu'à des réserves plus petites et à des puits sur place qui peuvent fournir de l'eau de refroidissement pour plusieurs mois
.

Le barrage hydroélectrique de Kakhovka a été complètement submergé par les flots après s'être rompu sous la force de puissantes explosions.
Photo : via reuters / TASS
S’ils ne peuvent plus être refroidis, les piscines d'entreposage et les cœurs des réacteurs de la centrale – la plus grosse en Europe avec une capacité de 6000 mégawatts – pourraient entrer en fusion, ce qui produirait une catastrophe nucléaire.
Située à Enerhodar, 150 kilomètres en amont du barrage de Kakhovka sur le fleuve Dniepr, la centrale nucléaire est occupée par les forces russes depuis le début de l’invasion de l’Ukraine, mais elle est toujours opérée par des équipes ukrainiennes.
Le chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi, qui doit se rendre dans la centrale la semaine prochaine, a lui-même constaté en début de semaine que l'eau ne pourrait plus être pompée dans les réacteurs si le niveau du réservoir descendait au-dessous de 12,7 mètres.
Un bassin de secours
La présence d’un grand bassin d’eau actuellement plein situé à proximité du site pourrait alimenter la centrale pendant plusieurs mois, selon M. Grossi, car les six réacteurs ont été arrêtés, mais ils doivent être refroidis en permanence tout de même.
Il est vital que ce bassin reste intact. Rien ne doit être fait pour porter atteinte à son intégrité.
La moindre goutte d’eau est désormais rationnée à la centrale de Zaporijia, où la consommation d'eau est strictement réservée aux activités liées à la sécurité nucléaire essentielle
.
Mardi, le barrage hydroélectrique de Khakovka a été partiellement détruit par une puissante explosion dont s’accusent mutuellement les Russes et les Ukrainiens, ce qui a provoqué une inondation massive en aval du barrage dans la région de Kherson.

Le récit de Lise Villeneuve
Plus de 600 kilomètres carrés de terre, de villes et de villages sont désormais sous les eaux, chassant de chez eux des dizaines de milliers de civils.
En amont du barrage par contre, le niveau des eaux a beaucoup diminué, privant notamment la Crimée d’un important apport en eau tout comme les six réacteurs de la centrale de Zaporijia.
Située en pleine zone de guerre, la centrale nucléaire a été la cible de tirs à plusieurs reprises depuis le début du conflit. Elle a dû être coupée du réseau électrique ukrainien à sept reprises depuis le 4 mars 2022.
Les zones sinistrées bombardées

Des milliers de maisons, de bâtiments et d'infrastructures ont été submergés en aval du barrage, le long du fleuve Dniepr.
Photo : Associated Press / Libkos
Un malheur n'arrivant jamais seul, des tirs d'artillerie russe ont fait au moins un mort et 18 blessés jeudi à Kherson, où se déroulent de laborieuses opérations d'évacuation de milliers de civils. Kiev affirme que des membres des services d'urgences étaient directement visés par des frappes russes.
Selon Moscou, les forces russes répondaient à des tirs ukrainiens qui ont aussi tué des civils dans les zones occupées.
Le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, a par ailleurs affirmé que ses troupes avaient contré une offensive ukrainienne dans la région de Zaporijia, au nord-est de Kherson, à l'heure où Kiev se dit prêt à lancer un assaut pour reconquérir les territoires occupés par Moscou.
Aujourd'hui, à 1 h 30 du matin dans la zone de Zaporijia, l'ennemi a tenté de percer nos défenses avec [...] jusqu'à 1500 hommes et 150 véhicules blindés
, a affirmé M. Choïgou dans un communiqué.
L'ennemi est stoppé et recule avec de lourdes pertes
, a-t-il affirmé.
Des affirmations toutefois invérifiables de source indépendante. Les autorités ukrainiennes n'ont pas fait mention de ces événements dans l'immédiat.
Les secours s'organisent

La police évacue comme elle peut les habitants d'une zone inondée à Kherson.
Photo : Reuters
Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a de son côté déploré l'absence d'aide humanitaire des Nations unies et de la Croix-Rouge aux populations sinistrées.
La Croix-Rouge lui a répondu participer aux opérations d'évacuation en territoire ukrainien, avec une cinquantaine de volontaires.
À Bruxelles, le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, a exhorté jeudi les 31 pays de l'Alliance à apporter rapidement
un soutien aux victimes des inondations lors d'une réunion avec le chef de la diplomatie ukrainienne.
Plusieurs membres fournissent déjà du matériel de premiers secours, notamment des filtres à eau, des pompes, des générateurs et des équipements d'abris, a précisé l'OTAN.
Le Centre euro-atlantique de coordination des réactions en cas de catastrophe (EADRCC) a de son côté établi une liste détaillée des besoins les plus urgents de l'Ukraine tandis que l'Organisation mondiale de la santé affirme avoir renforcé la surveillance sanitaire dans les zones sinistrées pour y prévenir la propagation de maladies hydriques, notamment le choléra.
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Avec les informations de Agence France-Presse