La pétrolière Irving Oil envisage une vente

La direction d'Irving Oil « évalue diverses options liées à l'avenir de l'entreprise ». (Photo d'archives)
Photo : CBC / Mike Heenan
L'entreprise Irving Oil annonce qu'elle entreprend une révision de sa structure et qu'elle « évalue diverses options liées à son avenir ».
Dans un communiqué signé par le président du conseil d’administration Arthur Irving, le président Ian Whitcomb et la vice-présidente administrative et cheffe de la gestion de marque Sarah Irving, l'entreprise précise qu’aucune décision n’a encore été prise.
Toutefois, plusieurs options sont sur la table, incluant une nouvelle structure de propriété, une vente complète ou partielle ou des changements dans le portfolio de ses actifs et la manière dont ils sont gérés
.
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La déclaration se termine en réitérant l’engagement d’Irving Oil envers ses clients au cours des prochains mois, pendant lesquels les diverses options seront évaluées.
Irving Oil est la plus importante société au Nouveau-Brunswick avec environ 4000 employés. Elle possède la plus grande raffinerie de pétrole au Canada, à Saint-Jean, et gère un réseau de 900 stations-service.

Les dirigeants d'Irving. De gauche à droite : la vice-présidente Sarah Irving, le chef de la direction Arthur Irving et le président Ian Whitcomb, photographiés à Dartmouth en Nouvelle-Écosse le 20 octobre 2016.
Photo : La Presse canadienne
Bien que les intentions réelles d’Irving ne soient pas encore bien comprises, la multinationale est possiblement à l’aube d’un important changement de cap, croit Yvan Cliche, chercheur en énergie au CÉRIUM, le Centre d'études et de recherches internationales de l'Université de Montréal.
L'industrie pétrolière a connu en 2022 une année record en termes de profits. Les prix ont beaucoup augmenté et les entreprises qui sont dans ce secteur ont fait des profits absolument faramineux, notamment les producteurs de pétrole
, a expliqué M. Cliche dans une entrevue, mercredi après-midi.
Sachant cela, il peut donc sembler illogique qu’Irving s’apprête à faire de tels bouleversements. Or, Irving ne produit pas de pétrole ou de gaz, mais raffine des produits pétroliers et gaziers.
On a vu l'année dernière qu'il y a eu une année record en termes de vente de véhicules électriques
, souligne M. Cliche. Les énergies renouvelables ont dépassé, en termes d'investissements, l'industrie fossile. C'était une première.
Ça annonce évidemment un certain déclin. Pas rapide, mais certainement un certain déclin dans l'utilisation du pétrole
, affirme-t-il.

Une station-service Irving à Pointe-à-la-Croix, à la frontière du Québec et du Nouveau-Brunswick. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / Isabelle Larose
Cela se conjugue par ailleurs à un accroissement des mesures contraignantes
envers l’industrie fossile, observe M. Cliche. Il note les mesures environnementales contenues dans l’Inflation Reduction Act adopté l’an passé aux États-Unis et la stratégie REPowerEU en Europe. Au Canada, on a aussi adopté un budget très conséquent. Quatre-vingts milliards de dollars en faveur des énergies décarbonées.
L’expert en énergie croit qu’Irving perçoit un message clair : l’entreprise anticipe une diminution des besoins pour ses produits.
Il est légitime de spéculer sur le fait que Irving, voyant cette nouvelle réalité se déployer devant elle, s'est dit qu'il faut nous aussi peut-être qu'on bouge plus vite et qu'on adopte un nouveau plan stratégique qui soit mieux adapté au contexte actuel qu'on voit poindre et se dessiner en Amérique du Nord
, avance M. Cliche.
Blaine Higgs s'inquiète de la vente possible d'Irving
Le premier ministre du Nouveau-Brunswick, Blaine Higgs, qui a été haut dirigeant d’Irving pendant une trentaine d’années, a dit mercredi ne pas être surpris par l’annonce de la compagnie.

Le premier ministre Blaine Higgs préférerait qu'Irving reste entre les mains de propriétaires néo-brunswickois. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / Michel Corriveau
Il s’est dit préoccupé par l’onde de choc qu’une vente d’Irving pourrait avoir dans la province. Il a dit espérer que l’on n’en arrive pas là. J’aimerais que les propriétaires restent des Néo-Brunswickois. Ce serait le meilleur scénario, mais c’est une entreprise privée qui a le droit d’étudier ses options et qui est prudente de le faire.
Blaine Higgs a affirmé que les cibles de réduction des gaz à effet de serre sont imposées par la force
à l’industrie pétrolière et gazière. Je suis très inquiet des règles et des règlements qui sont imposés à cette industrie, au moment où nous essayons de gérer le prix des biens essentiels et le coût de la vie
, a-t-il déclaré.
Quel impact sur l'économie du Nouveau-Brunswick?
L’expert en énergies Yvan Cliche estime que l’on devra attendre d’en savoir plus sur les intentions réelles d’Irving avant de spéculer sur les conséquences pour l’économie du Nouveau-Brunswick.
C'est clair que les annonces qui vont être faites prochainement ont un grand poids, une grande importance pour la province
, dit-il.
Est-ce qu'on va se lancer dans l'hydrogène? Est-ce qu'on va se lancer plus avant dans les énergies renouvelables?
, avance-t-il. De la nature précise de ces décisions, on pourra ensuite déterminer quelles sont les conséquences pour l'économie du Nouveau-Brunswick.
Dans tous les cas, Yvan Cliche ne pense pas que ce sera un virage brusque. Il y a quand même encore aujourd'hui une demande pour les différents produits qu'elle raffine dans ses deux raffineries
, résume-t-il. C'est clair que le pétrole ne va pas subir une chute dramatique de demande au cours des prochaines années. Mais il va y avoir certainement un déclin. On ne s'attend pas à une augmentation.
Avec des renseignements de Frédéric Cammarano et de Mia Urquhart (CBC)