Un long trajet pour les évacués du Nord-du-Québec

Des lits ont été installés au Centre sportif Benoît-Lévesque, à Roberval.
Photo : Radio-Canada / Louis Martineau
Des habitants de Chibougamau et d’Oujé-Bougoumou, dans le Nord-du-Québec, ont commencé à arriver à Roberval et à Saguenay au terme d’un voyage pénible.
En début de journée mercredi, environ 400 d’entre eux se sont retrouvés au Centre sportif Benoît-Lévesque, à Roberval, visiblement épuisés.
Environ 450 lits ont été installés dans l’amphithéâtre. Les évacués ont pu s’y reposer, mais aussi y trouver de la nourriture et des rafraîchissements.
Mardi soir, ils ont été contraints de quitter leurs demeures abruptement en raison de la progression inquiétante des flammes qui s'approchent dangereusement des deux communautés.
D’ailleurs, la mairesse de Chibougamau, Manon Cyr, a ouvertement reconnu qu’ils partaient tandis qu’il était encore temps
de le faire.

Les évacués ont dû s’armer de patience. Dans certains cas, le trajet a duré de six à huit heures en raison de la densité soudaine de la circulation sur des axes routiers généralement beaucoup moins fréquentés.
Normalement, le voyage aurait dû durer moins de trois heures.
Élan de solidarité
À Roberval, l’accueil a été chaleureux. Le maire de l’endroit, Serge Bergeron, a tenu à recevoir lui-même les évacués.
Plusieurs de ses concitoyens ont contacté les autorités municipales pour offrir des lieux d’hébergement potentiels pour les nouveaux venus dans la communauté.
En outre, des commerces locaux ont prolongé leurs heures d’ouverture pour qu’ils puissent se procurer les denrées et les médicaments dont ils avaient besoin.
Selon M. Bergeron, bien des gens d'affaires ont aussi prêté main-forte. Il a entre autres salué la générosité des hôteliers locaux.
« Leurs établissements sont déjà pleins. Ils ne peuvent plus accueillir personne. Par contre, les municipalités environnantes ont offert des salles. On a eu une très bonne collaboration, ce qui fait que si on a un débordement, on va savoir où aller cogner », a-t-il soutenu.
À son avis, malgré les efforts de tout un chacun, l'abattement se fait sentir parmi les sinistrés.
« Il y a des personnes qui pleurent. C’est triste parce que ces gens-là sont dans l’incertitude. Ils ne savent pas ce qui va se passer. On tente de les encourager », a mentionné Serge Bergeron avec empathie.
Une autre destination
Malgré leur fatigue, des évacués ont aussi pris la direction de Saguenay.
Au début de la journée de mercredi, le conseiller aux communications de cette ville, Martin Lavoie, a indiqué que de 400 à 425 évacués provenant exclusivement d’Oujé-Bougoumou étaient arrivés sur place.
On leur offre un toit, de la nourriture, du réconfort, de l’aide psychosociale
, a-t-il énuméré.
Ils sont dans un état d’esprit assez précaire
, a-t-il pu constater.
M. Lavoie a ajouté qu’à Saguenay, on pourrait peut-être éventuellement se rendre jusqu’à 1000 évacués
.
Au total, quatre centres d’hébergement pourraient les recevoir. L’un d’entre eux a été aménagé au Cégep de Chicoutimi.

Un centre d'hébergement a été mis en place au Cégep de Chicoutimi.
Photo : Radio-Canada / Annie-Claude Brisson
Les autres lieux d’accueil n’ont pas été dévoilés publiquement.
Le son de cloche du gouvernement du Québec
Dans ce contexte difficile, la ministre responsable de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, Andrée Laforest, a cherché à se faire rassurante.
Comme gouvernement, on est à l’écoute. On répond tout de suite aux demandes [formulées par les élus des communautés touchées par les évacuations]. Il faut agir très, très rapidement. On est en mode collaboration, évidemment
, a-t-elle insisté.
En tant que détentrice du portefeuille des Affaires municipales, Mme Laforest a aussi lancé un message sans équivoque aux gens qui se trouvent dans des collectivités susceptibles d’être évacuées en raison des feux de forêt.
On est en alerte. L’important, c’est de partir. Si vos élus vous demandent de le faire, agissez maintenant
, a-t-elle déclaré sans ambages.
S’exprimant sur la gravité de la situation, elle a soutenu que c’était vraiment du jamais-vu
au Québec.
Le plus récent portrait de la situation de la SOPFEU
Le feu menaçant les communautés de Chibougamau et d’Oujé-Bougoumou fait l’objet d’une surveillance étroite et continue de la part de la Société de protection des forêts contre le feu (SOPFEU). L’incendie avait déjà ravagé une zone de plus de 50 000 hectares mercredi matin.
Rien ne donnait à penser que la situation allait s’améliorer dans un horizon rapproché.
Le feu a une vitesse de propagation vraiment importante depuis le début de la semaine
, a souligné l’agente à la prévention et aux communications de la SOPFEU Josée Poitras.
Si le vent ne change pas de direction, l’incendie va se diriger vers Chibougamau et vers Oujé-Bougoumou
, a-t-elle précisé.
Mme Poitras a enchaîné en disant qu’on n’y attendait pas de pluie avant vendredi
et que dans un climat aussi sec, le combustible brûlait très rapidement.
Dans de telles circonstances, il est impensable d’utiliser les avions-citernes. Ce serait risqué et ce serait peine perdue. Il y a des limites de combat avec ces appareils
, a-t-elle admis.
Par contre, elle a pris le soin de dire que des renforts étaient attendus en provenance notamment de l’étranger sans fournir plus d'informations à ce sujet.
Une présence policière dans les communautés désertées
La Sûreté du Québec (SQ) entend faire sentir sa présence dans les collectivités évacuées.
Le sergent Hugues Beaulieu, qui est porte-parole pour la SQ, a dépeint la mission de son organisation de manière succincte. « Le mandat, c'est de s'assurer qu'il n'y ait pas d'actes criminels comme des introductions par effraction », a-t-il résumé.
Pour ce faire, des patrouilles régulières seront effectuées, et ce, autant de jour que de nuit. « On va s'assurer que les biens des gens seront en sécurité pour qu'ils n'aient pas de mauvaises surprises » une fois qu'ils pourront rentrer chez eux.