Adoption d’une stratégie commune d’adaptation aux changements climatiques

Vue aérienne de Carleton-sur-Mer, dans la Baie-des-Chaleurs.
Photo : Ville de Carleton-sur-Mer
Carleton-sur-Mer, Maria, New Richmond et Bonaventure ont adopté une stratégie commune d’adaptation aux changements climatiques lors de leurs séances régulières respectives, lundi soir. Le document comprend 64 objectifs concrets pour lesquels les quatre administrations municipales de la Baie-des-Chaleurs devront établir leurs propres priorités, échéanciers et budgets.
Le défi, il est devant nous, qu'on le veuille ou non. Les changements climatiques, ça fait partie de notre quotidien. Ça va continuer de le faire au fil des prochaines années, des prochaines décennies
, affirme Jean-Simon Landry, conseiller municipal et maire suppléant de Carleton-sur-Mer.
Avec l'outil qu'on a maintenant, ça ne risque pas nécessairement d'être plus facile de le faire, mais au moins [on va] savoir où on s'en va. C'est comme un guide, ce plan d'adaptation au changement climatique. C’est un guide que chacune des localités suivra à sa manière, selon sa propre réalité
, ajoute-t-il.

Jean-Simon Landry est conseiller municipal et maire suppléant de Carleton-sur-Mer. (Photo d'archives)
Photo : Gracieuseté de la Ville de Carleton-sur-Mer
Le développement de la stratégie a nécessité quatre années d’études, de consultations et d’analyse en collaboration avec le Cégep de la Gaspésie et des Îles et son Centre d’initiation à la recherche et d’aide au développement durable (CIRADD), le Comité ZIP Gaspésie et les MRC Avignon et Bonaventure.
Quatre axes d’intervention
La stratégie d’adaptation comprend 64 objectifs répartis selon 4 grands axes : la gouvernance participative, l’aménagement du territoire, la protection et la valorisation des milieux naturels, et le développement communautaire.
Concernant la gouvernance participative, le directeur de l’urbanisme de New Richmond, Jean-Sébastien Bourque, explique que chaque citoyen, chaque commerçant, chaque industrie sera touché par ça
. Il ajoute que les municipalités veulent apprendre comment amener chaque individu et chaque entreprise à se sentir interpellé par la problématique des changements climatiques et à participer à la recherche de solutions.
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En ce qui a trait à l’aménagement du territoire, le rapport invite les municipalités à revoir leurs façons de faire.
Est-ce qu'on va asphalter tel ou tel stationnement, versus le garder en poussière de pierre? S’il fait une moyenne de 3 à 5 degrés Celsius plus chaud d'ici 50 ans, un stationnement d'asphalte devient une problématique pour la santé des populations qui sont plus à risque, les personnes âgées, les femmes enceintes
, explique Jean-Simon Landry, maire suppléant de Carleton-sur-Mer.
Il n’y a pas seulement l'érosion côtière, il y a la résilience, la santé publique. Ça peut être abordé d’une multitude d'angles. C’est ce qui fait que c’est si complexe
, résume-t-il.
Le troisième axe invite à la protection et à la valorisation des milieux naturels. Quand on parle de milieux naturels, on parle autant des forêts, des cours d'eau, des milieux humides. Comment on peut protéger ça? Comment on peut convaincre les gens que c'est important de protéger ces éléments-là?
, se questionne Jean-Sébastien Bourque.

Plusieurs résidences et commerces de New Richmond ont été inondés en 2020. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada
Il invite la population à aller visionner les deux vidéos qui ont été publiées sur le site web du projet pour mieux comprendre à quoi servent les milieux humides et apprendre à identifier et à protéger ces zones sur les propriétés.
Les milieux humides, c'est notre bouclier contre les changements climatiques
, affirme-t-il. Le gestionnaire explique que c’est une zone tampon qui peut absorber le surplus d’eau en cas de submersion côtière. Si tout est asphalté et qu’on a des constructions partout, on est beaucoup plus vulnérables quand arrive un coup d’eau
, explique M. Bourque.
Enfin, le dernier axe concerne le développement communautaire. Le rapport révèle que les populations les plus vulnérables vont être les plus durement touchées par les changements climatiques. Les objectifs nous aident à réfléchir à comment on peut s’assurer qu’on va traiter les changements climatiques avec justice
, souligne le directeur de l'urbanisme.
Il faudra essayer d’amoindrir les impacts non seulement sur la population générale, mais sur ceux qui vont en avoir le plus besoin.
Il explique que les municipalités et villes vont être amenées à prendre des décisions pour qu’il y ait plus de justice sociale dans l’avenir, en tenant compte de l’inégalité devant les aléas climatiques.
De grands défis
Dans le rapport, on peut par exemple lire qu’à Maria, l’ensemble du secteur entre la route 132 et la mer, de la rue des Cardinaux à la Pointe-Verte, sera submergé d’ici 2070.
Les impacts potentiels sur les infrastructures des quatre municipalités et villes à prévoir en 2050 et 2100 sont d'ailleurs énumérés. Parmi les infrastructures situées dans les zones identifiées comme prioritaires, les plus à risque d’être touchées par les aléas climatiques dans les prochaines décennies, chaque municipalité devra prioriser ce qu’il faut préserver ou déplacer.
Les infrastructures les plus vulnérables selon les municipalités, d’ici 2050
Carleton-sur-Mer | 21,8 % des sentiers situés dans les zones prioritaires |
Maria | 58 bâtiments situés dans les zones prioritaires |
New Richmond | 284 bâtiments situés dans les zones prioritaires |
Bonaventure | 20,2 % du réseau d’aqueduc et d'égout situé dans les zones prioritaires |
Selon le directeur de l’urbanisme de New Richmond, le dépôt de la stratégie a été la partie la plus facile. Le plus difficile reste à venir.
C'est tellement d'investissements à faire, qu'on a de la misère à voir où on s'en va
, affirme Jean-Sébastien Bourque.
Pour lui, un des plus grands défis pour les administrations municipales est d'aller chercher les ressources financières pour la prévention.
À son avis, la meilleure façon d'investir de l'argent pour les changements climatiques, c'est de l'investir dans la prévention des sinistres, plutôt que d'attendre qu’ils surviennent. Parce que quand ils vont arriver, ça va coûter beaucoup plus cher
, explique-t-il.

Une résidence de la rue des Hérons, à Maria, inondée en décembre 2020.
Photo : Radio-Canada / Isabelle Larose
Quand on a commencé le projet, un dollar investi en prévention sauvait cinq dollars en réparations. Aujourd’hui, on parle plus que pour chaque dollar investi en prévention, on sauve jusqu’à 15 dollars en réparations
, souligne-t-il.
Selon lui, les programmes actuels de subvention sont élaborés pour réagir aux catastrophes. Or, l'adaptation aux changements climatiques passe par la prévention des dégâts, affirme M. Bourque.
Il demeure cependant confiant. Je pense qu'on est déjà en avance sur plusieurs municipalités, d’autres villes du Québec. C’est sûr qu’on ne peut jamais se prendre trop d’avance. Oui, on est déjà en retard, mais je ne pense pas qu’il est trop tard. On va faire de notre mieux et essayer d’éviter le plus de pertes possible
, estime le directeur de l’urbanisme.

La route 132 a été submergée en décembre 2020 à New Richmond.
Photo : Radio-Canada / Luc Paradis_Rad
Avec cette stratégie, il pense que Carleton-sur-Mer, Maria, New Richmond et Bonaventure ont un excellent plan de match. Il voit la volonté politique dans la région pour que ce rapport soit véritablement intégré à toutes les décisions, ce que Jean-Simon Landry confirme. Ce plan d'action, on va l'intégrer dans nos processus, on va l'intégrer dans notre planification stratégique, parce que les changements climatiques, ça touche tous les aspects de la société
, conclut-il.