Réduire la production de plastique : un défi pour un accord mondial, dit Guilbeault

La pollution plastique est devenue un fléau mondial, car elle étouffe la vie marine et contribue à la perte de biodiversité. (Photo d'archives)
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Le Canada est ouvert à l'idée d'inclure une obligation de réduire la production de plastique dans un nouveau traité mondial destiné à éliminer la pollution liée à cette matière, a déclaré vendredi le ministre fédéral de l'Environnement, Steven Guilbeault.
Le ministre Guilbeault estime que cette mesure pourrait toutefois devenir un des plus gros points de friction dans les négociations en cours, censées se conclure à la fin de l'année prochaine.
L'idée que nous devrons peut-être nous engager à réduire l'utilisation du plastique sera difficile à accepter pour certains pays
, a mentionné M. Guilbeault.
Lors de l'Assemblée des Nations unies pour l'environnement en mars 2022, 175 pays ont décidé d’entreprendre des pourparlers pour créer un traité mondial sur les plastiques afin d'éliminer les déchets plastiques d'ici la fin de 2024.
La deuxième ronde de négociations s'est terminée vendredi à Paris avec un accord pour commencer à rédiger ce traité. Celui-ci devrait être prêt d'ici la fin de 2024.
Trois autres sessions de discussions sont prévues d'ici là. M. Guilbeault a indiqué que le Canada accueillera la prochaine session dans environ un an.

Le ministre canadien de l'Environnement et du Changement climatique, Steven Guilbeault (Photo d'archives)
Photo : La Presse canadienne / Chris Young
La pollution plastique est devenue un fléau mondial, car elle étouffe la vie marine et contribue à la perte de biodiversité. Moins d'un dixième du plastique est recyclé, y compris au Canada, et les scientifiques estiment que près de neuf millions de tonnes de plastique finissent dans les océans chaque année.
Les Canadiens produisent annuellement environ 2,9 millions de tonnes de déchets plastiques qui ne sont ni recyclés ni incinérés.
Le Canada s'est fixé comme objectif national d'éliminer les déchets plastiques d'ici 2030.
La production de plastique augmente
Les groupes environnementaux affirment que la seule véritable façon d'éliminer la pollution plastique est de fabriquer moins de plastique en premier lieu.
Nous avons besoin de réductions notables de la production [de plastique] et nous devons ultimement en éliminer la production
, a déclaré Sarah King, responsable de la campagne sur les plastiques chez Greenpeace Canada. Il faut que le Canada soutienne [ce principe] publiquement et le défende dans les négociations de traités.
Greenpeace indique dans un communiqué que « la production mondiale de matières plastiques a fortement augmenté » au cours des 50 dernières années, passant de 15 millions de tonnes en 1964 à plus de 390 millions de tonnes en 2021. L'organisme environnemental soutient que si la tendance actuelle se poursuit, la production de plastique pourrait doubler d'ici 2030-2035 et même tripler d'ici 2050.
Aujourd'hui plus que jamais, le Canada doit défendre un traité fort qui prévoit de plafonner et de réduire progressivement la production de plastique à un rythme qui corresponde à la gravité des crises planétaires que nous connaissons
, soutient Mme King par voie de communiqué.

Les scientifiques estiment que près de neuf millions de tonnes de plastique finissent dans les océans chaque année. (Photo d'archives)
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Le président français Emmanuel Macron a déclaré au début des négociations de Paris, plus tôt cette semaine, que les pourparlers devraient donner la priorité à la réduction de la production de plastique.
Selon Mme King, le Canada est favorable à la restriction de cette production. Elle a spécifié que le traité devrait absolument établir un plafond direct sur la production de plastique et prévoir une réduction progressive.
M. Guilbeault a déclaré qu'il n'est pas opposé
à l'imposition de limites à la production.
L'idée de produire du plastique et de l'utiliser pendant cinq minutes ou une heure, un jour ou deux semaines, puis de le jeter appartiendra au passé. Est-ce que cela signifiera que nous consommerons moins de plastique? C'est difficile à dire, mais je pense qu'une réponse raisonnable serait oui.
Le député néo-démocrate Gord Johns, qui a réussi à faire adopter, il y a cinq ans, une motion au Parlement appelant à une stratégie nationale de lutte contre la pollution plastique, a déclaré que la position du Canada dans ce domaine doit être plus claire.
En ce moment, nous entendons le président Macron prendre le leadership et s'engager à réduire la production en amont, a affirmé M. Johns. Et nous avons besoin du même leadership de la part du premier ministre ici au Canada.
Envoyer les déchets ailleurs
Après l'embarras causé par la découverte de déchets plastiques canadiens aux Philippines en 2019, le Canada a déclaré qu'il collaborerait avec l'Agence des services frontaliers du Canada pour mettre un terme aux exportations de plastique contaminé.
Il a également accepté des modifications à la Convention de Bâle des Nations unies qui stipulaient qu'après le 1er janvier 2021, le Canada ne devait exporter des déchets plastiques qu'aux autres membres de la convention avec le consentement et la confirmation de la façon dont les déchets seront éliminés.
Au cours des deux années suivantes, les exportations canadiennes de déchets plastiques ont augmenté, principalement vers les États-Unis, qui ne font pas partie de cette convention. Cela signifie que le Canada ne sait pas ce qu'il advient véritablement de ses déchets plastiques.

La production mondiale de matières plastiques a fortement augmenté au cours des 50 dernières années, passant de 15 millions de tonnes en 1964 à plus de 390 millions de tonnes en 2021, selon Greenpeace. (Photo d'archives)
Photo : Fournie par Gerald Struys
Le Réseau d'action de Bâle a fait savoir que les exportations de plastique du Canada avaient augmenté de 13 % en 2021 pour atteindre 170 millions de kilogrammes et de 8 % supplémentaires en 2022 pour atteindre 183 millions de kilogrammes. Cela équivaut à peu près au poids de 30 000 éléphants.
Plus de 90 % des exportations effectuées au cours des deux années étaient initialement destinées aux États-Unis.
Il y a plus d'un an, le ministre Guilbeault s’était engagé à demander à son ministère de mettre fin à cette pratique. Il a déclaré vendredi qu'une annonce sera bientôt faite à ce sujet.
Il a également déclaré qu'il avait l'intention de piloter une autre mise à jour de la loi canadienne sur la protection de l'environnement qui comprendra des pouvoirs plus forts pour s'attaquer à ce problème. Ce projet de loi, connu sous le nom de CEPA, en est aux dernières étapes du débat au Sénat avant son adoption.