L’ex-amie d’un policier de Toronto avoue l’avoir dénoncé pour le vol présumé d’un héritage
Robert Konashewych est accusé d'avoir créé un faux testament pour obtenir 800 000 $ d'un vieil homme dont les biens étaient administrés par la curatelle publique de l'Ontario.

Le policier Robert Konashewych est accusé de vol.
Photo : La Presse canadienne
À Toronto, Candice Dixon a révélé, vendredi, au procès de Robert Konashewych, qu'elle avait vendu la mèche à son sujet après avoir eu des doutes sur les finances de son ancien fiancé. La Couronne accuse l'agent d'avoir escroqué pour un montant de plus de 800 000 $ la curatelle publique de l'Ontario, en prétendant être le seul héritier de Heinz Sommerfeld, dont les biens étaient gérés par l'organisme provincial.
Dans ce procès devant jury, Robert Konashewych fait face à la justice aux côtés de sa maîtresse présumée, Adellene Balgobin, qui est également accusée de vol de plus de 5000 $.

Candice Dixon est l'ancienne petite amie de Robert Konashewych et l'un des témoins à charge de la Couronne dans ce procès.
Photo : Facebook/Candice Dixon
M. Konashewych et Mme Balgobin ont plaidé non coupables à une accusation chacun de vol de plus de 5000 $ à l'ouverture des audiences mercredi en Cour supérieure de l'Ontario.
Mme Balgobin fait face à une accusation additionnelle d'abus de confiance.
Informations privilégiées
Adellene Balgobin travaillait au moment des faits reprochés au Bureau du tuteur et curateur public de l'Ontario, qui est chargé d'administrer l'argent des Ontariens qui sont dans l'incapacité de le faire ou qui meurent sans héritier.
Elle était à l'époque responsable du dossier de Heinz Sommerfeld, qui est mort en 2017 de l'alzheimer à l'âge de 77 ans, à la résidence de soins prolongés Tyndall Seniors Village à Toronto.
Sans savoir qu'il avait un demi-frère et se croyant sans famille, le vieil homme n'a laissé aucun héritage, si bien que son argent a été placé sous la surveillance de la curatelle publique dès 2008 à cause de sa santé précaire.

Le Bureau du tuteur et curateur public de l'Ontario se trouve dans cet édifice au centre-ville de Toronto.
Photo : Capture d’écran - Google Map
Selon la Couronne, l'agent Konashewych s'est toutefois fait passer pour un certain Bob Kay, en prétendant être le seul héritier de M. Sommerfeld.
Il aurait fabriqué un faux testament daté de 2006 et inventé de faux témoins pour berner la curatelle publique.
Les procureurs allèguent qu'il a obtenu l'information de sa présumée complice, qui avait accès au dossier de M. Sommerfeld.
Allégations d'adultère
Dans la fin de son interrogatoire, l'ex-petite amie de M. Konashewych, Candice Dixon, explique qu'elle a entamé une relation avec le policier en 2011 et qu'elle est restée avec lui jusqu'en novembre 2018.
Nous avons été à la même école primaire à Oakville et je l'ai revu plus tard dans une boîte de nuit en 2011
, se rappelle la femme de 39 ans.
Le couple vivait dans le même logement en copropriété à Toronto qu'il a dû vendre pour s'en partager les profits.
À la suite d'une divulgation indiscrète dans un salon de coiffure, Candice Dixon a appris l'existence d'Adellene Balgobin.
Elle pensait que le policier la trompait avec une autre femme, même s'il a nié les faits après avoir été confronté à ce sujet plusieurs fois.
Les femmes ont communiqué entre elles, mais Mme Balgobin lui a assuré qu'elle n'était pas en relation avec son conjoint.

L'agent Konashewych est suspendu du service de police de Toronto avec salaire tandis que Mme Balgobin ne travaille plus à la curatelle publique.
Photo : Radio-Canada / Andy Hincenbergs
Mme Dixon explique à la barre des témoins qu'elle a ramassé un jour le courrier à l'appartement qu'elle avait racheté à M. Konashewych et qu'elle a vu une lettre suspecte qui lui a mis la puce à l'oreille.
Il s'agissait d'une lettre d'une banque qui indiquait au policier le rendement de ses placements et que Mme Dixon a gardée dans un tiroir durant la période des fêtes de fin d'année en 2018.
J'ai revu Rob le 8 janvier 2019 et je lui ai remis la lettre tout en lui posant des questions, mais il m'a dit que c'était une erreur de la banque et il en a profité pour faire une blague sur les taux d'intérêt bancaires
, dit-elle.
Elle reconnaît qu'ils partageaient un compte conjoint pour les paiements de l'hypothèque à l'époque où ils vivaient ensemble, mais qu'ils avaient chacun un compte personnel pour le versement de leurs salaires par exemple.
Je n'étais pas trop au courant de ses finances personnelles
, reconnaît-elle.
Mme Dixon explique que le couple s'est revu quelques semaines plus tard pour sceller le rachat du condo.
Elle avait d'ailleurs embauché un avocat à ce sujet, puisqu'elle avait décidé de garder l'appartement. Il était en colère lorsqu'on s'est revu parce qu'il pensait que nous allions recommencer à vivre ensemble
, poursuit-elle.
Autre lettre suspecte
Elle ajoute qu'elle a par la suite reçu une seconde lettre, d'un cabinet d'avocats cette fois, au sujet des dernières volontés de M. Sommerfeld, qu'elle a envoyée à son propre avocat.
Mme Dixon précise qu'elle a notifié à ce sujet son ex-conjoint le lendemain au téléphone. C'est la dernière fois que nous nous sommes parlé au téléphone
, dit-elle.
Entretemps, elle souligne que son avocat avait commandé à la curatelle le dossier de M. Sommerfeld grâce au numéro qui était inscrit sur la lettre et dans laquelle le nom d'Adellene Balgobin figurait.
Elle confirme à la Couronne que M. Konashewych avait encore des boîtes dans l'entrepôt de leur logement et qu'elle y est allée faire un tour pour découvrir dans des caisses les preuves concernant ses craintes sur son infidélité.

Le procès de Robert Konashewych et d'Adellene Balgobin doit durer quatre semaines au palais de justice de Toronto.
Photo : CBC
Mme Dixon y trouvera notamment des cartes de Noël et de la St-Valentin dans lesquelles Adellene Balgobin exprime son amour pour le policier et que la Couronne prend le soin de projeter sur écran pour le jury.
Elle comprend alors que son ex-conjoint entretenait en effet une relation secrète de plusieurs mois avec Mme Balgobin, lorsqu'ils vivaient encore ensemble.
C'est à ce moment-là, le 6 mars 2019, que je suis allée à la police tout lui raconter au sujet de mes soupçons
, poursuit Mme Dixon, qui vit aujourd'hui en Floride.
Mme Dixon affirme qu'en sept ans de vie commune, Robert Konashewych ne lui a jamais parlé de l'existence de Heinz Sommerfeld, qu'il ne lui a jamais dit qu'il rendait visite à un homme âgé dans un hospice et qu'il ne lui a jamais dit qu'il avait reçu un héritage de plus de 800 000 $.
Contre-interrogatoire
Dans son contre-interrogatoire, la défense du policier a tenté de faire dire à Mme Dixon qu'elle n'avait pas quitté son client pour une présumée liaison secrète, mais parce qu'elle voulait se marier et avoir des enfants, alors qu'il n'en voulait pas.
Oui, je voulais me marier, mais je ne lui ai jamais lancé d'ultimatum
, se défend-elle.
La défense laisse entendre que Candice Dixon était jalouse et qu'elle s'intéressait de près à l'héritage de son ex-conjoint.
Mme Dixon admet que les fonds de 800 000 $ ont fait l'objet de discussions avec son avocat au moment de la vente et du rachat de leur appartement.
Nous voulions comprendre la nature de ses avoirs et son accès à ses biens
, déclare-t-elle.
Le contre-interrogatoire se poursuit lundi.