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Le ministre Dubé veut créer une « compétition » dans le financement des hôpitaux

D’ici cinq ans, le ministère de la Santé veut étendre un nouveau mode de financement à tous les soins physiques prodigués dans les hôpitaux, les CLSC et les cliniques.

Le ministre Dubé dans son bureau.

Christian Dubé, ministre de la Santé

Photo : Radio-Canada

Depuis quelques semaines, les députés de l’Assemblée nationale se penchent sur une vaste réforme des structures du réseau de la santé afin de le rendre à terme « plus efficace ».

Or, en coulisse, les gestionnaires du réseau sont déjà à intégrer une petite révolution dans le financement des soins de santé afin de contenir la hausse des coûts.

Depuis le mois d’avril par exemple, autour de 30 000 interventions chirurgicales par mois sont financées par le financement axé sur le patient (FAP).

Comme l’explique en entrevue le sous-ministre adjoint à la Direction générale du financement, de l’allocation des ressources et du budget, Pierre-Albert Coubat, le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) utilise désormais une grille tarifaire uniforme pour chaque type d’intervention chirurgicale afin de déterminer ce qui sera versé aux hôpitaux.

Pour le retrait de la vésicule biliaire par exemple, le tarif est de 2195 $, dont 640 $ en fournitures, même si certains établissements comptabilisent à l'heure actuelle un coût 50 % plus élevé, jusqu’à 3200 $.

Il se peut qu'un établissement utilise des agences de placement privées qui sont plus chères ou utilise des fournitures plus chères, précise M. Coubat pour expliquer cette différence. Un établissement qui hospitalise un patient quatre jours plutôt que deux jours va amener des coûts additionnels, ajoute-t-il.

Pierre-Albert Coubat dans son bureau.

Pierre-Albert Coubat, sous-ministre adjoint à la Direction générale du financement, de l’allocation des ressources et du budget, MSSS

Photo : Radio-Canada

Les hôpitaux seront incités à minimiser les écarts de coûts par rapport au tarif versé. Autrement, ils devront puiser ailleurs dans leur budget.

M. Coubat précise que les petits établissements qui n'ont pas un volume critique seront exclus du FAP et conserveront leur financement historique.

C'est pas juste une évolution majeure, c'est une révolution budgétaire qu'on est en train de mener.

Une citation de Pierre-Albert Coubat, sous-ministre adjoint à la Direction générale du financement, de l'allocation des ressources et du budget, MSSS

Le ministre Christian Dubé reconnaît pour sa part que des établissements pourraient au final recevoir moins d’argent.

Il y en a qui vont peut-être en avoir moins et certains vont en avoir plus, parce qu'effectivement, à certains endroits, le vieillissement de la population est plus rapide, il y a plus de retraités, il faut en tenir compte, dit-il.

M. Dubé cite également l’exemple des régions qui voient leur population augmenter lors des saisons touristiques. On veut être capable de dire que peu importe où vous vivez au Québec, vous allez avoir les mêmes soins partout, indépendamment de l'endroit d'où vous venez.

Le ministre de la Santé souhaite également susciter une émulation dans le réseau.

Maintenant que les coûts sont connus, on va dire aux hôpitaux : si au lieu de faire 10 000 cataractes vous en faites 15 000 et que vous êtes plus efficaces, vous allez avoir plus de budget pour le faire.

Il y a cette notion-là que cette compétition peut amener une meilleure performance dans les établissements.

Une citation de Christian Dubé, ministre de la Santé

Objectif 2027

Dans son document budgétaire rendu public au mois de mars, le ministère des Finances donnait l’exemple du secteur des coloscopies et des endoscopies digestives, pour lequel le nouveau mode de financement a été déployé en 2018-2019 dans les hôpitaux. Avec des gains significatifs.

Selon les plans de Québec, le mode de financement FAP sera notamment étendu en 2024 aux urgences et à la dialyse, en 2025 à l’ensemble des activités en électrophysiologie et en endoscopie, en 2026 aux services ambulatoires, puis en 2027 à la pharmacie, aux laboratoires préopératoires et postopératoires.

En tout, plus de 12 milliards de dollars en soins physiques seront versés par le filtre de la FAP dans cinq ans, sans compter le soutien à domicile et les soins en santé mentale, éventuellement.

Ce mode de financement survient au moment où Québec est engagé dans un plan de rattrapage des opérations hors délai. Un plan doté d’une rémunération incitative au personnel soignant qui se rendra disponible pour opérer les soirs et les week-ends, notamment.

Des médecins spécialistes favorables

À la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ), la Dre Josée Parent se dit favorable au FAP.

Il y a des éléments intéressants et il était temps qu'on connaisse le coût des interventions à l'hôpital, dit-elle.

Une des forces, c'est qu'on peut partager entre nous les bonnes pratiques [...] les façons d'être plus productifs ou plus performants, et de trouver de meilleurs coûts de fournitures, affirme la directrice adjointe aux affaires économiques de la FMSQ.

La Dre Josée Parent dans son bureau.

La Dre Josée Parent, directrice adjointe aux affaires économiques à la FMSQ

Photo : Radio-Canada

Néanmoins, elle met en garde l’utilisation du FAP contre des effets pervers.

Le danger, c'est le sous-financement, parce que la médiane, c'est bon pour le patient moyen qui reçoit l'opération moyenne, mais dans notre système, il y a plusieurs variations.

Une citation de Dre Josée Parent, directrice adjointe aux affaires économiques de la FMSQ

La Dre Parent cite également les hôpitaux universitaires où on doit prendre plus de temps pour former des étudiants ou développer de nouvelles techniques.

La CSQ s’y oppose

À la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), on suit le dossier du financement du réseau de la santé depuis de nombreuses années.

Pour nous, on s’oppose à ce système-là et on suggère une analyse, une étude sur les projets pilotes avant de poursuivre, insiste le secrétaire-trésorier à la CSQ, Luc Beauregard.

On a rencontré le cabinet sur ce dossier-là en novembre 2021 et ils nous ont répondu que ce ne serait pas mur à mur, précise-t-il.

Ainsi, bien des questions restent à éclaircir. La trajectoire patient financée, ça commence quand, finit quand, notamment pour les soins à domicile? Si on doit changer la hanche d’un patient avec des conditions de comorbidité, comment en tiendra-t-on compte?, demande-t-il.

Ce dernier souligne également les coûts invisibles, que ce soit le 15 minutes à rassurer un patient, le 30 minutes à expliquer au proche aidant la situation, le temps consacré pour aider un collègue, etc..

La CSQ et sa Fédération de la santé du Québec (FSQ-CSQ) représentent notamment plus de 5000 infirmières, infirmières auxiliaires et inhalothérapeutes travaillant dans des établissements de tous les secteurs de la santé.

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