La création d’une unité de police autochtone dans la mire de la police d’Ottawa

Une femme parle avec des membres de la police d'Ottawa lors d'un rassemblement devant l'hôtel de ville en soutien aux communautés autochtones et noires en novembre 2020. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / Brian Morris
Le Service de police d’Ottawa (SPO) prévoit créer une unité autochtone à l’intérieur de son corps policier. Certains membres des communautés autochtones d’Ottawa insistent sur la nécessité de poursuivre le travail d’acceptation et de compréhension.
Le SPO a publié lundi sa réponse aux diverses recommandations des appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation (CVR) du Canada et de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées (ENFFADA) ainsi que sa position par rapport à certaines de ces recommandations.
Le chef de police, Eric Stubbs, a annoncé que son service prévoyait créer une unité autochtone, mandatée à temps plein pour répondre aux recommandations des enquêtes de la CVR et de l’ENFFADA.
Une communicatrice inuk et ancienne députée territoriale du Nunavut, Manitok Thompson, qui vit aujourd’hui à Carleton Place, a salué l’idée. Mais elle souhaite aussi savoir comment cela sera organisé, car les relations avec la police sont tendues. Les membres de la communauté sont terrifiés à l’idée d’être mal jugés [ou] maltraités
, a-t-elle dit.
Il n’y a aucun policier inuk au sein du SPO, ce qui est une lacune décevante, a déploré Mme Thompson. Selon elle, ce type de diversité est nécessaire pour aider à établir des relations avec l’importante communauté inuit d’Ottawa.
Parfois, c’est simplement parce que l’on est autochtone que l’on est traité de manière injuste
, a-t-elle affirmé.

L'ancienne politicienne du Nunavut Manitok Thompson veut faire partie de la solution. (Photo d'archives)
Photo : CBC
Dans une déclaration à CBC, la police d’Ottawa a indiqué que d’abord et avant tout
la consultation sera un élément clé de la création de l’unité.
J’aurais aimé créer cette unité au printemps, mais notre situation en matière d'effectifs ne nous permet tout simplement pas de retirer davantage de personnes de la ligne de front
, a expliqué M. Stubbs lors de la réunion de la Commission de services policiers d'Ottawa qui s'est tenue lundi.
Selon le SPO, 6 % de son personnel s’identifie comme Autochtone, mais un nombre très limité d’agents parlent une langue autochtone
.
Le chef adjoint Steve Bell a également admis, lundi, que le corps policier ne parvenait pas à recruter des policiers inuit.

Le chef de la police d'Ottawa, Eric Stubbs (à gauche), et son adjoint, Steve Bell (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada
Cours de sensibilisation à la culture autochtone
La police d’Ottawa a déclaré qu’elle avait essayé d’améliorer la sensibilisation à la culture autochtone. Depuis près de deux ans, tous les membres civils et policiers doivent suivre un cours en ligne intitulé The Path : Your Journey Through Indigenous Canada [Traduction : Le chemin : votre voyage à travers le Canada autochtone].
La conceptrice principale du cours, Jennifer David, a estimé qu'il ne s'agissait que d'un premier pas vers l'humanisation des peuples autochtones et le rapprochement entre le passé et le présent.
Selon elle, si les agents ont cette compréhension, ils seront mieux à même de réagir d'une manière culturellement appropriée
.
Mme David a toutefois précisé que la nouvelle unité autochtone devait inclure des agents qui sont réellement autochtones. Elle a mentionné plusieurs cas très médiatisés de personnes non autochtones qui se sont identifiées comme autochtones, sans aucune vérification, et qui ont privé les autochtones de certaines occasions.
CBC et Radio-Canada ont couvert beaucoup d’histoires de ce genre, dont plusieurs dans des établissements d'enseignement supérieur.
Les membres de l'unité devront également être protégés contre le racisme et la discrimination au sein des forces de l'ordre, et on ne peut pas attendre d'eux qu'ils sachent tout de la culture autochtone et soient les seuls à s'en occuper
.
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Le racisme au sein de la police
Le Service de police de Toronto a créé en 1992 une unité de maintien de la paix autochtone, Toronto devenant ainsi la première grande ville canadienne à se doter d’une unité spécifiquement consacrée à la résolution des problèmes rencontrés par les Autochtones au sein de la communauté.
Depuis, Hamilton et Guelph, aussi en Ontario, ont également mis en place un agent de liaison autochtone.
Le projet d’unité autochtone de la police d’Ottawa arrive alors que le service a été confronté à des accusations de racisme à l’égard de diverses personnes, notamment lorsqu’un agent a publié des commentaires troublants en ligne après la mort de la célèbre artiste inuk Annie Pootoogook, en 2016.

Le corps d'Annie Pootoogook a été trouvé dans la rivière Rideau, à Ottawa, le 19 septembre 2016. (Photo d'archives)
Photo : Alexei Kintero
Steve Bell a mentionné lundi que le SPO s’efforçait de recruter davantage de personnes noires et d’Autochtones, tout en veillant à ce que ces recrues puissent évoluer dans l’organisation
en obtenant des postes plus élevés dans la hiérarchie.
Il a ajouté que la police a bien réussi à recruter des membres autochtones, mais [il] pense que cela ne représente qu’un premier pas
. Il a aussi convenu qu’il reste encore beaucoup de travail à faire
.
Avec les informations de Kimberley Molina, de CBC News