Intelligence artificielle : les Occidentaux veulent un « code de conduite » commun

Le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken (à droite), et la vice-présidente de la Commission européenne chargée de la concurrence, Margrethe Vestager, ont discuté d'encadrement de l'IA à l'occasion de la réunion du Conseil du commerce et des technologies en Suède.
Photo : tt news agency/afp via getty images / JONAS EKSTROMER
L'Union européenne et les États-Unis ont annoncé mercredi un projet de « code de conduite » commun sur l'intelligence artificielle (IA), à l'application volontaire, pour les entreprises de ce secteur, face au risque de voir la Chine donner le ton pour réguler un domaine en pleine explosion.
Des responsables politiques aux concepteurs de la technologie eux-mêmes, un consensus mondial émerge sur le besoin d'encadrer, plus ou moins librement, une technologie aux effets révolutionnaires mais aux risques élevés de dérapage.
Après une réunion de haut niveau dans le nord de la Suède, le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, a affirmé que les Occidentaux ressentent l'urgence féroce
d'agir face à l'irruption sur le devant de la scène de cette technologie, symbolisée par des outils comme le robot conversationnel ChatGPT.
Le code de conduite annoncé mercredi serait ouvert à tous les pays partageant les mêmes idées
, a-t-il dit lors d'une conférence de presse commune avec des poids lourds de Bruxelles.
La vice-présidente de la Commission européenne chargée de la concurrence, Margrethe Vestager, connue pour ses bras de fer avec les géants américains du numérique, a indiqué qu'une version préliminaire sera présentée dans les prochaines semaines
.
Nous pensons que c'est vraiment important que les citoyens puissent voir que les démocraties agissent.
L'idée est d'aboutir très, très bientôt
à une proposition finale, en espérant rallier le cercle le plus large possible
, a-t-elle dit, citant nos amis au Canada, au Royaume-Uni, au Japon, en Inde
.
Américains et Européens craignent entre autres de voir des standards chinois s'imposer si l'Occident ne s'unit pas.
L'Union européenne (UE) prépare un cadre juridique complet et impératif qui s'appliquerait en matière d'IA dans quelques années – au plus tôt fin 2025 –, mais le code de conduite conçu avec Washington sera d'application volontaire, a indiqué Mme Vestager.
Un secteur en plein essor
Le monde a découvert avec stupéfaction ces derniers mois les capacités de cette technologie en phase de maturation avec ses machines et ses logiciels capables d'apprendre à vitesse grand V pour améliorer leurs performances.
Le secteur est dominé par des géants américains comme Microsoft – actionnaire principal d'OpenAI, la firme qui exploite ChatGPT – ou encore Meta ou Google.
Toutefois, l'écosystème évolue très vite, notamment avec les plateformes de source ouverte capables de rivaliser, voire de prendre le devant technologique très rapidement.
La Computer & Communications Industry Association, un lobby du secteur qui regroupe Amazon, Apple, Meta, Google ou encore Twitter, a salué un engagement transatlantique accru et de pointe, en particulier à un moment où l'UE poursuit son ambitieux programme de réglementation numérique qui façonnera le marché pour les années à venir
.
L'Union européenne (UE) veut être la première au monde à se doter d'un cadre juridique complet et obligatoire pour limiter les dérives de l'intelligence artificielle, mais son entrée en vigueur, portée notamment par le commissaire Thierry Breton, prendra quelques années.
Bruxelles, avec le soutien de géants comme Google, pousse en faveur de règles volontaires.
La Chine a également des projets de régulation, notamment une inspection de sécurité
des outils d'intelligence artificielle.
Côté américain, malgré de nombreuses discussions, aucun projet impératif n'est pour l'instant sur la table.
L'UE et les États-Unis sur la même longueur d'onde
En présence du fondateur de ChatGPT et patron d'OpenAI, Sam Altman, la question de l'IA a été un des sujets principaux de la réunion du Conseil du commerce et des technologies à Luleå.
Des collaborations sur la 6G, la sixième génération de télécommunications mobiles, rare domaine technologique où les Européens dominent, ont également été actées.
L'organe avait été créé en 2021 entre les États membres de l'UE et Washington pour tourner la page des brouilles commerciales des années Trump.
L'UE et les États-Unis partagent le point de vue commun selon lequel les technologies d'intelligence artificielle comportent de grandes possibilités mais présentent également des risques pour nos sociétés
, ont déclaré les deux grandes puissances dans un communiqué final.
Comme un écho, la première ministre danoise Mette Frederiksen a prononcé jeudi matin un discours au Parlement en partie rédigé par ChatGPT pour en souligner non seulement les performances mais aussi les risques en matière de démocratie.
Même s'il n'a pas toujours mis dans le mille, tant sur les détails du programme de travail du gouvernement que sur la ponctuation [...], ce dont [ChatGPT] est capable est à la fois fascinant et terrifiant.