AnalyseLe mariage de raison des conservateurs unis a tenu bon

Danielle Smith a été réélue le 29 mai 2023, en Alberta.
Photo : Radio-Canada / Jocelyn Boissonneault
Les conservateurs unis poussent un soupir de soulagement. Ayant remporté une cinquantaine de circonscriptions, ils conservent le pouvoir en Alberta, malgré une cheffe, Danielle Smith, qui aurait pu torpiller leurs chances de victoire. Cette élection montre qu’il pourrait bien être impossible pour le Nouveau Parti démocratique (NPD) de vaincre la droite conservatrice tant qu’elle restera unie.
Le Parti progressiste-conservateur et le Parti Wildrose ont fusionné en 2017 pour vaincre les néo-démocrates et rétablir leur règne. Malgré un premier mandat rocambolesque et une nouvelle cheffe imprévisible, la coalition conservatrice a tenu le coup.
Elle est solide au point d’avoir empêché la cheffe la plus populaire de l’histoire du NPD albertain de battre l’une des cheffes les plus polarisantes des conservateurs.
Devant de tels résultats, les deux partis doivent toutefois faire une introspection.
Danielle Smith réaffirme sa légitimité... pour le moment
Les conservateurs, dans une province où ils peuvent remporter des supermajorités comme celle de Jason Kenney avec 63 des 87 sièges en 2019, voudront-ils encore risquer des élections aussi serrées que celles-ci? Préféreront-ils un chef qui plaît à un plus grand public, pour ne pas devoir se battre aussi férocement tous les quatre ans?
Pour l’instant, Danielle Smith reste en selle. Cette victoire vient renforcer sa légitimité comme première ministre, mais elle est quand même assise sur un siège éjectable.

Les partisans du PCU ont célébré les victoires des différents députés au quartier général du Parti conservateur uni.
Photo : Radio-Canada / Jocelyn Boissonneault
Dans un parti qui a tendance à se débarrasser de ses chefs lorsqu’ils deviennent des boulets, elle devra naviguer habilement pour être encore aux commandes du parti dans quatre ans.
Tant que le groupe militant Take Back Alberta l’appuie, elle devrait être sauve, mais elle subira de sa part la pression d’implanter des politiques plus libertariennes.
Ce sera maintenant l’occasion de voir la réelle idéologie de Danielle Smith dans ce deuxième mandat.
Par ailleurs, dans son discours de victoire, Danielle Smith n’a pas perdu une minute pour recentrer ses attaques sur son autre grand adversaire, le premier ministre du Canada, Justin Trudeau. Il n’y a aucune raison pour elle de lui tendre la main, alors qu’il est un adversaire si utile politiquement. La relation continuera d’être difficile entre eux.
Une grande introspection pour le NPD
Pour le NPD, une révision de la stratégie est nécessaire. Le parti bénéficiait de conditions électorales relativement favorables : le Parti conservateur uni (PCU) a connu des déchirements importants durant la pandémie, mené par une première ministre sortante très polarisante, dont les actions ont été qualifiées de menaces à la démocratie par la commissaire à l’éthique.
Pourtant, le NPD n’a pas réussi à battre le PCU. Il aurait peut-être eu une meilleure chance si l’économie allait mal, car cela aurait scié les jambes de la campagne conservatrice basée sur l’économie.

Rachel Notley a promis de rester en poste comme chef de l'opposition officielle.
Photo : Radio-Canada / Richard Marion
Le NPD doit se demander si ses attaques répétées envers la cheffe du parti adverse sont la bonne stratégie à adopter. Il avait fait de même en 2019 contre Jason Kenney, sans le succès escompté.
Depuis des années, Rachel Notley a tout fait pour normaliser son parti et séduire les conservateurs modérés. Cela n’a pas été suffisant. Il est difficile de voir comment le parti peut se recentrer davantage sans renier ses valeurs progressistes profondes.
Il est fort possible que le chemin de la victoire soit pour toujours bloqué pour le NPD tant que la coalition conservatrice tiendra bon en Alberta.