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L’Ontario, « capitale » des zoos privés et seule province à ne pas les réglementer

Des lions allongés sur un abri dans un parc clôturé.

L'organisme World Animal Protection demande à la province de durcir ses règles pour mieux protéger la faune en captivité.

Photo : World Animal Protection

Radio-Canada

Des singes isolés, des enclos trop petits ou encore des clôtures en mauvais état... Des organismes de défense des droits des animaux et des associations municipales s'allient pour demander au gouvernement provincial de légiférer et de mieux encadrer les zoos « improvisés » qui pullulent dans la province.

Les zoos en bordure de route sont souvent de petites attractions éphémères en dehors des grandes villes qui peuvent présenter de nombreux animaux exotiques et domestiques avec lesquels les clients peuvent interagir.

Ces parcs animaliers improvisés offrent de petits enclos aux bêtes mais n'offrent pas beaucoup plus que de la nourriture, de l’eau et un abri, ce qui a un effet négatif sur le comportement des animaux, selon l’organisation à but non lucratif World Animal Protection, qui est à l'origine de cette campagne et qui demande à l'Ontario de faire de cette année la dernière année pour les zoos en bordure de route.

Cette organisation estime que les installations de ces zoos sont inférieures aux normes et qu’elles abritent principalement des animaux sauvages dans des conditions pauvres et stériles.

Un singe derrière un grillage.

Les défenseurs des animaux disent que la loi est trop vague en Ontario pour être interprétée de manière efficace et cohérente pour chaque animal exotique.

Photo : World Animal Protection

Même son de cloche du côté du groupe Animal Justice, qui estime qu’il y a beaucoup de zoos [dans la province] dont les standards sont très bas et où les animaux souffrent de blessures extrêmes et de détresse psychologique.

La directrice de ce groupe, Camille Lanchuk, explique que dans les zoos de bordure de route, il est plus facile pour les animaux de s'échapper et d’avoir des interactions négatives avec des humains.

L'Ontario, c’est le Far West pour les zoos et c’est la capitale des zoos en bordure de route au Canada.

Une citation de Camille Lanchuk, directrice d'Animal Justice

En 2022, lorsque l'organisme a visité une grande partie des zoos de la province avec une caméra cachée, elle a constaté des conditions de captivité très tristes, raconte Mme Lanchuk, qui dit avoir vu des animaux blessés, morts ou en détresse psychologique extrême.

On a aussi découvert des risques pour la santé et la sécurité publique, poursuit-elle en précisant que certains animaux sont dans des cages qui ne sont pas assez hautes pour s'assurer qu’ils restent dedans.

Une question de volonté politique

Pourtant, rien n'empêche vraiment le gouvernement de s'attaquer à ce problème, indique Michèle Hamers, responsable de campagne à la World Animal Protection.

C'est une question de volonté et de priorités politiques, et nous ne voulons pas attendre jusqu'à ce qu'une autre évasion ou un autre incident se produise, poursuit-elle.

Comparativement aux autres provinces et territoires du Canada, l'Ontario est à la traîne.

Une citation de Michèle Hamers, responsable de campagne à la World Animal Protection
Un lion derrière un grillage.

La réglementation de ce secteur s’est toutefois améliorée en Ontario grâce à la loi provinciale sur les services animaliers, entrée en vigueur en 2019.

Photo : World Animal Protection

La réglementation de ce secteur s’est toutefois améliorée en Ontario au cours des dernières années, notamment grâce à la loi provinciale sur les services animaliers, entrée en vigueur en 2019, qui établit des normes de soins de base pour certaines bêtes.

Cependant, les défenseurs des animaux disent que cette loi est trop vague pour être interprétée de manière efficace et cohérente pour chaque animal exotique, ce qui laisse les municipalités libres de réglementer elles-mêmes les zoos.

Selon la World Animal Protection, tant que la province n'aura pas mis en œuvre des règles plus claires pour les installations fauniques et consacré plus de ressources à la réglementation de ce secteur d'activité, le problème ne fera que persister, car environ 50 % des municipalités n'interdisent pas de posséder des animaux sauvages.

C'est formidable que nous ayons certaines dispositions, certaines réglementations, admet Michèle Hamers. Mais si ce n'est pas correctement appliqué et si nous ne pouvons pas tenir les installations responsables de ce qu'elles font, c'est très problématique.

Un problème de longue date

C'est un problème de longue date qui laisse les municipalités aux prises avec des problèmes en matière de gestion des animaux exotiques, estime l'Association of Municipal Managers, Clerks and Treasurers de l’Ontario, la plus grande association de professionnels des administrations locales de la province.

Les municipalités font en quelque sorte du mieux qu'elles peuvent avec les informations dont elles disposent, explique le directeur général de l’association, David Arbuckle.

Et malgré les efforts déployés par les autorités locales pour fermer certaines installations, l'association affirme qu'un zoo en bordure de route peut toujours déménager dans une autre municipalité.

C'est au cas par cas, et les municipalités peuvent s'en occuper de différentes façons, poursuit M. Arbuckle.

Ce serait formidable qu'il y ait une loi provinciale globale qui fournisse plus de conseils aux organismes et à ceux qui sont appelés à faire appliquer les règles.

Un singe derrière un grillage.

Selon la World Animal Protection, environ 50 % des municipalités n'interdisent pas de posséder des animaux sauvages.

Photo : World Animal Protection

Il s'agit d'un point de vue que partage l’Association des agents chargés de l’application des lois municipales, qui pense qu'un cadre provincial et une sensibilisation sur la question sont nécessaires pour assurer la sécurité des citoyens et des agents.

[Les agents] ne sont peut-être pas tous formés pour gérer les types d'animaux avec lesquels ils ont été appelés à interagir, croit le président de l'association, Doug Godfrey, qui ajoute qu'ils n'ont peut-être pas toujours les moyens ou les ressources pour interagir avec les animaux.

L'Ontario, la province la plus sévère?

Le ministère du Solliciteur général de l'Ontario, qui est responsable de faire appliquer la loi sur les services de protection des animaux (PAWS), indique pour sa part que la province est un chef de file en matière de protection des animaux avec les peines les plus sévères et le premier système d'application de ce type dans tout le pays. Le ministère n'a toutefois pas précisé si une nouvelle loi était en préparation.

Les services de protection des animaux n'hésiteront pas à émettre des ordonnances si une organisation, une entreprise ou un individu ne respecte pas toutes les règles et les normes de soins concernant le bien-être des animaux.

Une citation de Le ministère du Solliciteur général de l'Ontario

Le ministère ajoute que depuis janvier 2020, les services de bien-être animalier de la province ont donné 7600 ordres, porté 600 accusations et retiré plus de 5200 animaux dont le bien-être était à risque.

Le zoo de Toronto, le plus grand du pays, affirme qu'il soutient la campagne de la World Animal Protection et plaide depuis des années pour une meilleure protection des animaux.

Nous ne voulons pas simplement suivre une norme, nous voulons établir une norme, souligne le PDG du Zoo, Dolf DeJong.

Il affirme que les principales différences qui distinguent son zoo de ceux qui sont établis en bordure de route sont l'accent mis sur la conservation, l'éducation et la transparence.

Beaucoup de gens visitent le zoo pour une journée de divertissement en famille et nous nous engageons à tirer le meilleur parti de ce temps pour nous assurer qu'ils repartent avec des messages sur ce qu'ils peuvent faire pour aider, ajoute M. DeJong.

Nous allons continuer à prendre ces mesures pour nous assurer que tout le monde reparte mieux équipé pour être un intendant de la faune.

Une citation de Dolf DeJong, PDG du Zoo de Toronto

De son côté, l’animalerie Northern Exotics à Sudbury est considérée par la World Animal Protection comme un zoo de bordure de route.

Cette installation, qui possède aussi un centre d'éducation pour les visiteurs, abrite en grande partie des reptiles qui lui sont confiés ou qui sont abandonnés.

Le propriétaire et gestionnaire du centre, Dennis Epp, réfute l'appellation de zoo de bordure de route pour son animalerie. Je n'aime pas vraiment [cette appellation], car ça ne montre pas qui nous sommes. Les zoos décident des animaux qu’ils ont et c’est pour gagner de l’argent. Ce que nous gagnons revient aux animaux, assure-t-il.

Des reptiles en captivité.

Un couple d'uromastyx sahariens, une espèce de lézard endémique d'Afrique du Nord, photographié dans son enclos au centre d'éducation de Northern Exotic à Sudbury.

Photo : (CBC News) / Sam Juric

Dennis Epp dénonce par ailleurs le rapport de la World Animal Protection qui considère que son installation n'est pas adaptée alors que l’organisme n'a pas réussi à identifier de nombreux animaux. C’est fâchant qu’ils disent comment il faut prendre soin des animaux : ils devraient au moins savoir de quels animaux ils parlent.

Dennis Epp souligne par ailleurs que toutes les installations animalières sont inspectées deux fois par an par la province et que son installation est elle-même inspectée régulièrement.

Mon principal problème avec la réglementation en Ontario, c’est qu'elle n’est pas suffisamment précise, elle est trop générale.

Une citation de Dennis Epp propriétaire et gestionnaire de Northern Exotics

Dennis Epp regrette donc que les règles provinciales en la matière soient laissées à l'appréciation des inspecteurs.

Pour sa part, Michèle Hamers dit que les familles qui cherchent à soutenir des établissements zoologiques plus fiables devraient éviter les endroits avec des clôtures en mauvais état ou ceux où on permet aux gens de toucher et de nourrir les animaux sauvages.

Avec les informations d’Andréane Williams, de Rozenn Nicolle et de CBC

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