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Liberté universitaire : l’Université Laval adopte une politique « robuste »

En adoptant sa nouvelle politique, l'Université Laval se conforme à la Loi sur la liberté académique dans le milieu universitaire au Québec.

La politique de l'Université Laval vient garantir la liberté universitaire à l'ensemble de sa communauté.

Parmi les éléments phares, la politique de l'Université Laval vient garantir la liberté universitaire à l'ensemble de sa communauté, et non plus seulement aux professeurs.

Photo : Radio-Canada / Guillaume Croteau-Langevin

La liberté universitaire ne sera plus l'apanage des professeurs à l'Université Laval. En vertu d'une nouvelle politique adoptée la semaine dernière, l'institution la garantit désormais à l'ensemble de sa communauté impliquée dans les activités d'enseignement et de recherche, dont les étudiants et les chargés de cours.

La Politique sur la liberté académique est officiellement entrée en vigueur le 17 mai, après son adoption par le conseil d'administration de l'Université Laval.

Elle découle d'une obligation imbriquée dans la Loi sur la liberté académique dans le milieu universitaire, sanctionnée à l'Assemblée nationale en juin 2022. Par cette loi, l'ex-ministre de l'Enseignement supérieur, Danielle McCann, voulait s'assurer que tous les sujets puissent être abordés et tous les mots puissent être prononcés dans un contexte pédagogique.

La législation faisait notamment suite aux débats houleux provoqués par la suspension d'une professeure de l'Université d'Ottawa, en 2020, pour avoir utilisé le mot commençant par n dans le cadre d'un cours sur la représentation des identités sexuelles.

Des étudiantes, séparées par un panneau de plexiglas, travaillent à l'ordinateur.

Les étudiantes et les étudiants auront désormais une protection claire imbriquée dans les politiques institutionnelles de l'Université Laval. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Sébastien Tanguay

Les étudiants protégés

Parmi les éléments phares, la politique de l'Université Laval vient garantir la liberté universitaire à l'ensemble de sa communauté, et non plus seulement aux professeurs. Ces derniers, représentés par le Syndicat des professeures et professeurs de l'Université (SPUL), profitaient déjà de certaines protections grâce à leur convention collective.

La politique s’applique aux professeures et professeurs, chargées et chargés de cours, étudiantes et étudiants ainsi qu’à toute autre personne membre de la communauté universitaire [...] lorsque cette personne exerce une activité contribuant à l’accomplissement de la mission de l’Université, peut-on lire dans le document dont Radio-Canada a obtenu copie.

Autrement dit, les personnes concernées participent aux activités d'enseignement et de recherche.

Sophie D’Amours en entrevue.

Sophie D’Amours est la rectrice de l'Université Laval. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada

Selon la rectrice Sophie D'Amours, cette politique vient marteler l'importance de la liberté universitaire pour l'établissement. La loi vient confirmer, dire qu'au Québec, la liberté de l'enseignement est importante et reconnaît que les universités, pour faire leur travail, doivent pouvoir s'appuyer sur cette liberté-là, souligne-t-elle en entrevue.

À l'Université Laval, ce n'était que le corps professoral qui avait ce droit-là, et maintenant avec la politique, on étend la couverture. C'est quand même assez significatif.

Une citation de Sophie D'Amours, rectrice de l'Université Laval

Mme D'Amours rappelle qu'ailleurs dans le monde, des États font pression pour empêcher les universités d'aborder certains sujets, enseignements et concepts. Des cours sont retirés en raison de pressions externes. Le gouvernement vient dire que ça ne peut pas arriver au Québec.

Ce droit comprend la liberté...

  • d’enseignement et de discussion;
  • de recherche, de création, et de publication;
  • d’exprimer son opinion sur la société, sur un établissement d'enseignement, y compris sur l’université, ainsi que sur toute doctrine, tout dogme ou toute opinion;
  • de participer librement aux activités d’organisations professionnelles ou d’organisations scolaires.

Source : Politique sur la liberté académique de l'Université Laval

Comité indépendant

La Politique sur la liberté académique prévoit, comme exigé dans la loi provinciale, la création d'un comité indépendant chargé d'évaluer les plaintes en la matière. Il sera composé de neuf personnes issues notamment du corps professoral, de la communauté étudiante, des chargés de cours et du milieu de la recherche.

Le comité travaillera de concert avec le Bureau du respect de la personne, dont la personne responsable aura à juger de l'admissibilité des plaintes.

Par cette nouvelle porte d'entrée, toute personne assujettie à la politique estimant que sa liberté universitaire est brimée pourra s'y adresser. La politique propose un délai maximal de 30 jours pour porter plainte après la connaissance des faits et de 12 mois au plus tard après les faits.

Un bâtiment par temps gris.

Par sa nouvelle politique et grâce au Comité sur la liberté académique, l'Université Laval veut faire la promotion de ces principes et sensibiliser la communauté universitaire. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Guillaume Croteau-Langevin

Par exemple, un étudiant [dans le cadre d'une activité de recherche], si on l'empêche d'explorer une hypothèse, on pourrait dire qu'on le brime dans sa liberté, explique Sophie D'Amours. Il en va de même pour toute personne ayant une charge d'enseignement, professeur ou chargé de cours, qui subirait des pressions sur le contenu présenté en classe.

Si une plainte est retenue, le comité produira un rapport et fournira des recommandations au Conseil universitaire, lequel aura à trancher si des actions sont à prendre ou non envers les personnes concernées.

Outre évaluer les plaintes, le comité aura la responsabilité de promouvoir la protection de la liberté universitaire. Les membres seront nommés au cours des prochains mois. Selon Sophie D'Amours, il ne commencera ses activités que l'automne prochain.

Une plainte peut déjà être déposée au Bureau du respect de la personne, qui pourra déterminer la recevabilité de celle-ci. D’ici à ce que le comité soit fonctionnel, il pourrait y avoir un délai dans le traitement, indique l'Université Laval. En cas d'urgence, un comité temporaire sera mis en place.

L'Université Laval réévaluera les résultats de sa politique dans trois ans.

Nouvelles options

Selon Yves Gingras, professeur au Département d'histoire de l'Université du Québec à Montréal, l'adoption de ces politiques par les universités québécoises vient assurer une protection plancher pour l'ensemble des institutions de la province.

M. Gingras rappelle que certains professeurs, dont ceux de l'Université McGill, ne sont pas syndiqués. Ces derniers n'avaient donc pas l'option de s'adresser à leur syndicat et d'éventuellement obtenir leur appui pour procéder par grief.

Yves Gingras répond aux questions de Franco Nuovo au studio 17 de Radio-Canada, à Montréal, le 8 avril 2018.

L'historien des sciences Yves Gingras (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Mathieu Arsenault

À l'Université Laval, les professeurs ont désormais deux portes d'entrée. M. Gingras y voit un gain significatif. On peut imaginer un professeur qui porte plainte, mais dont le syndicat n'est pas à l'aise de défendre ça en grief, dit-il. Le nouveau mécanisme offre une seconde voie à ces professeures et professeurs et propose une première porte d'entrée pour les chargés de cours et les étudiants.

M. Gingras vante également les délais d'action. Le comité va agir à court terme, croit-il. Les griefs, poursuit-il, impliquent dans certains cas de longs délais avant d'être entendus devant un arbitre. Ce sera au prof de choisir le chemin.

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