Fredericton veut se donner le pouvoir de supprimer ou de modifier des arrêtés municipaux

Une disposition du projet de loi 45 du gouvernement de Blaine Higgs fait craindre aux municipalités une érosion de leur pouvoir décisionnel.
Photo : iStock
Les municipalités du Nouveau-Brunswick craignent une érosion de leur pouvoir démocratique si le projet de loi 45 du gouvernement de Blaine Higgs sur la création d’une commission de la gouvernance locale est adopté dans son état actuel.
Le projet de loi prévoit, entre autres, de donner au ministre des Gouvernements locaux et de la Réforme de la gouvernance locale le pouvoir de supprimer ou de modifier les arrêtés municipaux.
Cette partie-là, ce qui est inquiétant, c’est qu’on a des élus dans chacune des municipalités qui mettent en place des arrêtés pour le bien de leurs citoyens, et qu’à ce moment-ci le ministre aurait le pouvoir de les changer ou de les abroger
, déplore Yvon Godin, président de l'Association francophone des municipalités du Nouveau-Brunswick (AFMNB) au cours d’une entrevue accordée mercredi à l’émission La matinale, d’ICI Acadie.
La mairesse de Fredericton, Kate Rogers, partage son avis.
Lorsque l’on donne carte blanche à un ministre pour infirmer les décisions prises par une municipalité, c’est une érosion de la démocratie.
C'est un genre recul, on pense. Ce n’est pas [ce à quoi] on s'attendait dans la commission
, poursuit Dan Murphy, directeur général de l’Union des municipalités du Nouveau-Brunswick.
Le livre blanc sur la réforme municipale du ministre des Gouvernements locaux et de la Réforme de la gouvernance locale, Daniel Allain, prévoit la création d’une commission qui serait chargée, par exemple, de trancher des questions de conflit d’intérêts, de réviser de possibles ententes de partage des coûts entre municipalités et d’examiner les demandes de modification du territoire municipal.

Kate Rogers, mairesse de Fredericton, demande au gouvernement de modifier la section du projet de loi qui prévoit de donner au ministre des Gouvernements locaux le pouvoir de supprimer ou modifier des arrêtés municipaux.
Photo : Radio-Canada / Aidan Cox
Le maire de Campbellton et porte-parole des Cités du Nouveau-Brunswick, Jean-Guy Levesque croit aussi que le ministre doit reconsidérer son projet de loi. C’est une claque au visage qu’on vient de recevoir
, dit-il. Il faut que le ministre comprenne qu’on a été élu par la population, qu’on représente le peuple.
Ainsi, les trois regroupements des municipalités du Nouveau-Brunswick font front commun. Les municipalités souhaitent une telle commission, selon Yvon Godin, mais la section du projet de loi qui donne ce pouvoir au ministre est pour elles une mauvaise surprise.
L’objectif principal de la réforme, c’était de donner plus de pouvoirs aux municipalités, et là on vient en soustraire un très important.
Craintes d'interventions à des fins politiques ou économiques
Yvon Godin craint que cela ouvre la porte à des modifications d’arrêtés municipaux pour des raisons politiques.
Je crois quand même que le gouvernement est sérieux et qu’il veut faire quelque chose de bien avec ça, mais il y a quelque chose qui n’est pas clair dans la démarche. Et quand ç’a une couleur politique, c’est un peu plus inquiétant
, dit-il.

Yvon Godin, président de l’Association francophone des municipalités du Nouveau-Brunswick, est aussi conseiller municipal de Rivière-du-Nord. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / Pascal Raiche-Nogue
Yvon Godin craint aussi que le ministre vienne à subir des pressions d’entreprises privées qui souhaiteraient faire modifier en leur faveur des arrêtés municipaux.
À ce moment-là, ce qui risque d’arriver, c’est un genre de guerre entre le ministre et les municipalités parce que l’un a changé les décisions de l’autre
, ajoute-t-il.
Le ministre Allain se veut rassurant
Le ministre Allain confirme être au courant des préoccupations des municipalités et indique que son ministère travaillera avec les associations les représentant pour s’assurer que ces articles sont bien compris.
Ces changements visent à offrir un filet de sécurité
pour les imprévus, avance-t-il.
Il ne faut pas aller très loin pour trouver des conseils municipaux qui ont pris ou qui prévoyaient prendre des décisions qui pourraient nuire à la création d’emplois, à l’économie et au mode de vie des gens.
Le ministre Allain précise que la révision des arrêtés serait effectuée selon un processus robuste qui ne sera pas pris à la légère
et leurs abrogations ne seraient faites qu’en dernier recours.
Le projet de loi 45 a été déposé par le ministre Allain le 9 mai. Il a franchi l’étape de la deuxième lecture le 17 mai. Avec le ministère, le ministre Allain comparaîtra devant le Comité permanent de la politique économique de l’Assemblée législative le 26 mai.
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Avec les renseignements de La matinale, d’ICI Acadie, et d’Aidan Cox, de CBC, et de Serge Bouchard