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Qu’est-ce que la bataille de Bakhmout?

Comment une petite ville de l'est de l'Ukraine est-elle devenue l'épicentre de la guerre?

Un soldat dans une tranchée.

Un soldat ukrainien se repose après des combats dans les environs de Bakhmout, le 11 mai 2023.

Photo : via reuters / RFE/RL/Serhii Nuzhnenko

La plupart des experts s'entendent pour dire que l'intérêt stratégique de Bakhmout est mince. Sa situation géographique, au creux d'une vallée, la rend particulièrement difficile à défendre. Mais qu'à cela ne tienne : Russes et Ukrainiens se disputent chaque kilomètre carré de cette petite ville depuis bientôt un an dans ce qui est maintenant considéré comme la bataille la plus longue et la plus meurtrière depuis le début de l'invasion russe.

Samedi, la Russie a annoncé avoir finalement pris le contrôle de Bakhmout.

Dimanche, l'Ukraine a démenti.

Comment une ville à la population équivalente à celle de Granby et à la superficie inférieure à celle de Moose Jaw est-elle devenue l'épicentre de cette guerre d'attrition? Explications.

Du vin, des roses et des cendres

Guerre en Ukraine

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Un véhicule blindé est en feu, un corps gît dans la rue.

Située dans la région de Donetsk, dans l'est de l'Ukraine, et comptant avant la guerre un peu plus de 70 000 habitants, Bakhmout était surtout réputée pour trois choses : ses usines de sel, sa production de vin mousseux et un immense massif de 5000 roses inscrit dans le livre ukrainien des records.

S'il est difficile à première vue de comprendre les raisons pour lesquelles les deux camps s'arrachent son territoire, selon Richard Blanchette, major-général à la retraite des Forces armées canadiennes, Bakhmout peut présenter un certain avantage au niveau tactique parce qu'il y a deux villes, Kramatorsk et Sloviansk, qui sont un peu plus en profondeur.

Mais si, en théorie, ces deux villes pourraient être les prochaines étapes pour les Russes, M. Blanchette doute fortement que les troupes du Kremlin aient les forces nécessaires pour s'enfoncer plus loin dans le territoire ukrainien. Il n'y a pratiquement aucune chance que les Russes parviennent à continuer une forme d'offensive, dit-il.

Dès lors, Bakhmout apparaît aux yeux des experts comme une sorte de symbole. Une victoire russe pourrait redonner un souffle à une campagne d'invasion du Donbass qui, dans l'ensemble, a accumulé les échecs.

En effet, l'Ukraine est, à la surprise de plusieurs, parvenue à tenir tête aux Russes dans la région. Pire encore pour le Kremlin, les forces de Kiev sont parvenues à repousser les Russes hors des villes de Kharkiv et de Kherson.

Vue aérienne d'un immeuble en flammes.

La ville de Bakhmout a été ravagée.

Photo : Reuters / Armée ukrainienne

Après ces deux cuisants revers, c'est sur Bakhmout que les Russes ont jeté leur dévolu avec l'aide du groupe de mercenaires Wagner. Cependant, là encore, ils ont rencontré une surprenante opposition ukrainienne.

Et donc, après plus de dix mois de combats et des dizaines de milliers de morts, il ne reste plus grand-chose de cette petite ville industrielle, sinon un champ de ruines.

Un hachoir à viande

Bakhmout a été décrite comme l'enfer sur terre par des combattants revenus du front. On la compare même à Verdun, une ville française qui a été le théâtre de la bataille la plus sanglante de la Première Guerre mondiale, où pas moins de 700 000 soldats français et allemands ont été tués ou blessés.

S'il est difficile pour l'instant d'obtenir un bilan clair, le président américain Joe Biden a dit estimer au sommet du G7 qu'à Bakhmout seulement, les pertes russes s'élevaient à 100 000 blessés et tués.

Les troupes de la Russie, menées par le groupe Wagner, auraient en effet utilisé des prisonniers pour tenter de prendre rapidement les positions ukrainiennes, ce qui aurait donné lieu à d'épouvantables carnages. Il ont été utilisés comme de la chair à canon par le groupe Wagner, soutient Richard Blanchette.

Bakhmout était une espèce de piège. C'est devenu un hachoir à viande. Excusez-moi l'expression, mais c'est vraiment une situation terrible quand on calcule les pertes incroyables que les Russes ont subies.

Une citation de Richard Blanchette, major-général à la retraite des Forces armées canadiennes

Les Ukrainiens ont également essuyé de lourdes pertes, avance M. Blanchette.

Mais mon analyse tactique, c'est qu'ils avaient tout avantage à continuer à défendre [Bakhmout], dit-il, parce que dans une guerre d'attrition de ce genre, plus il y a de pertes chez l'ennemi, plus vous avez avantage à continuer si votre zone d'abattage est efficace.

Prise ou pas?

Le chef du groupe Wagner, Evgueni Prigojine, a annoncé samedi avoir finalement pris le contrôle de l'entièreté de Bakhmout, affirmation qu'a démentie le président ukrainien Volodymyr Zelensky, jurant que ses troupes continuaient le combat.

C'est que si le centre de la ville semble en effet sous contrôle russe, les troupes de Kiev auraient monté des contre-offensives efficaces dans ses faubourgs.

Un homme qui porte un uniforme militaire et qui tient une arme automatique est debout devant des dizaines d'hommes en treillis militaires.

Capture d'écran d'une vidéo diffusée par Evgueni Prigojine, le chef du groupe paramilitaire russe Wagner, menaçant les autorités russes de retirer ses hommes de la ville ukrainienne de Bakhmout faute de munitions.

Photo : Reuters

Ces attaques sur les flancs de Bakhmout ont forcé les troupes russes à leur allouer de précieuses ressources militaires [...], comme le commandement ukrainien le souhaitait, estime le groupe de réflexion américain Institute for the Study of War (ISW), cité par l'Agence France-Presse.

Selon Richard Blanchette, il y a confusion autour du statut actuel de Bakhmout. Ce qui compte vraiment quand on parle de tenir le terrain, [c'est] l'infanterie en place, qui assure la sécurité d'un secteur pour ensuite [...], dans ce qu'on appelle l'art opérationnel, pouvoir avancer, affirme-t-il.

Le chef du groupe Wagner prétend qu'ils ont réussi à prendre complètement Bakhmout, alors que dans les faits, les combats se continuent sur les flancs, précise-t-il.

Que faire, dès lors, de la déclaration de victoire d'Evgueni Prigojine? Je pense que c'est davantage de la propagande, répond Richard Blanchette, pour permettre [au groupe Wagner] de prendre une pause opérationnelle.

D'autant, rappelle-t-il, que Kiev a promis une contre-offensive de grande envergure qui pourrait débuter prochainement.

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