La liberté de Georges Moustaki

L'auteur-compositeur-interprète Georges Moustaki avait une grande affection pour son public québécois qu'il a visité à de nombreuses reprises.
Photo : Radio-Canada / Francis J. Menten
Il y a 10 ans, le 23 mai 2013, nous quittait l’auteur-compositeur-interprète Georges Moustaki. Tirée de nos archives, une entrevue qu’il a accordée à la journaliste Azeb Wolde-Giorghis en 1996 nous permet d’en connaître davantage sur son parcours et sa philosophie de vie qui en ont fait un grand parolier.
Né en 1934 à Alexandrie, de parents grecs, Georges Moustaki s’installe à Paris dans les années 50.
Dans le Saint-Germain-des-Prés de l’après-guerre, il devient compositeur et parolier pour de grands noms de la chanson française avant de lui-même parcourir le monde comme auteur-compositeur-interprète.

Georges Moustaki interprète sa chanson « Le métèque » pour les téléspectateurs canadiens.
Ce segment de l’émission Vedettes en direct du 11 décembre 1973 nous le montre chantant son grand succès Le métèque lors d’un de ses nombreux passages au Québec.
Composée dans le tumulte de mai 68, cette pièce est celle qui a lancé sa carrière de chanteur à l’international.
Auparavant, en 1958, il avait offert à Édith Piaf la chanson Milord, l’une des plus connues du répertoire de la chanteuse française, en plus d’écrire pour Barbara, Yves Montand et Serge Reggiani.

Entrevue de la journaliste Azeb Wolde-Giorghis avec Georges Moustaki qui revient sur son parcours à travers les chansons de son répertoire.
À l’émission Le point du 18 août 1996, la journaliste Azeb Wolde-Giorghis nous propose une longue entrevue avec Georges Moustaki ponctuée de ses plus belles chansons.
Sur les notes de Ma liberté, l’auteur-compositeur-interprète explique ce que représente le voyage pour lui. Je fais partie d'une famille de gens qui voyagent, raconte-t-il. Il n’y a personne de ma famille qui soit mort à l'endroit où il est né.
Georges Moustaki appartient aussi à la famille des artistes qu’on surnomme les gens du voyage
parce qu'ils trouvent plus d’intérêt à promener leur art qu'à jouer toujours au même endroit.
La chanson Alexandrie, relate-t-il, est inspirée de la ville égyptienne chargée d’histoire où il a grandi dans un environnement multiculturel.
Fils d’un libraire qui recevait tous les intellectuels de passage en Égypte, Georges Moustaki s’est frotté tôt à la culture et à la littérature françaises.
À l’âge de 17 ans, il a souhaité voir ce qui se passait de l’autre côté de la Méditerranée. Je voulais savoir ce que j'avais envie de faire et ce que j'avais envie de ne pas faire
, explique-t-il à la journaliste sur son arrivée en France.
Arbre déraciné, je vais de berge en berge, sans jamais m’arrêter à l’une ou l’autre auberge
, chante Georges Moustaki dans J’ai vu des rois serviles.
Parmi ses rencontres les plus marquantes, le musicien nomme celle avec Brassens, son maître, qui lui a fait comprendre qu’il pouvait exister dans le milieu de la chanson. Puis celle avec Édith Piaf, qui lui a montré qu’il fallait vivre avec passion et qui a permis à ses chansons de franchir le petit cercle de la Rive gauche pour atteindre le monde entier.
En mai 68, Georges Moustaki se sent interpellé par les revendications des jeunes contestataires. Avec sa guitare, il se rend dans le Quartier latin de Paris pour aller à leur rencontre. C'est là que j'ai eu envie de devenir un chanteur, de monter sur une scène
, raconte-t-il.
Tout au long de sa carrière, l’artiste dont le cœur bat à gauche a chanté la paix, l’amour, la liberté. La chanson Il y avait un jardin, dont il explique les paroles à la journaliste, capte bien sa vision de la vie, mais aussi de l’avenir.
D’un monde de philosophie, d’amour et d’humour, le monde se dirige vers un cloisonnement qui est pénible, croit Georges Moustaki, qui voit les nouvelles technologies comme des instruments de contrôle.
« Tous les progrès sont à double tranchant et souvent le tranchant est plus dangereux et prend plus d'importance. »
Nous vivons sur une planète où on pourrait trouver beaucoup de bonheur et on s'évertue à fabriquer des armes, exprime celui qui se définit comme un pessimiste gai. On s'évertue à bureaucratiser notre relation humaine.
C'est à chacun de nous, s'il le peut, de ne pas se laisser piéger
, philosophe Georges Moustaki en 1996 avant de revenir sur ses chansons Le métèque et Joseph.